
Avis :
Fondé en 2005 en Ile-de-France, Hangman’s Chair ne s’est pas de suite imposé. Il faut dire que leur métal Stoner à tendance Sludge qui pointe vers des éléments Doom n’est pas à la portée de tous, et le groupe s’enferme dans une niche très précise. Pour autant, la formation sort son premier album en 2006 et après un changement de bassiste et de chanteur/guitariste en 2008, le groupe va trouver une sorte de stabilité pour sortir plusieurs albums de façon plus ou moins régulière. En effet, on a droit à un nouvel opus tous les trois/quatre ans, et depuis A Loner en 2022, nous n’avions plus trop de nouvelles. C’est alors que surgit Saddiction, toujours chez Nuclear Blast, et le disque était attendu par les fans, car le précédent album était une grande réussite. Qu’en est-il de ce septième skeud studio ?
Un peu comme à son habitude, le groupe propose un album qui possède peu de pistes. Seulement neuf nouveaux morceaux, mais on a une durée de plus de quarante-six minutes, ce qui permet de bien se focaliser sur chaque titre, et de profiter de chaque instant. Car oui, ce nouvel effort est d’une puissance phénoménale, et il est même meilleur que son prédécesseur, ce qui n’était pas une mince affaire. En fait, on remarque qu’il y a une grande cohérence chez Hangman’s Chair. Une cohérence entre l’artwork, fait de bâtiments partiellement éclairés, de néons et d’une lumière diffuse en arrière-plan, et la musique en elle-même, qui fait penser à une introspection au sein d’une cité sombre, peuplée de dépressifs et de gens sans espoir de renouveau. Et cette machine nocturne, ou tout du moins à mi-chemin entre le crépuscule et la nuit, est très addictive.
Une addiction à la tristesse, comme quoi, même le titre n’est pas choisi au hasard. Et tout commence avec To Know the Night, un morceau énervé qui laisse beaucoup de place à la batterie, qui se veut percutante et éclatante. On perçoit aussi une volonté du groupe de « noyer » ses sonorités, donnant alors un aspect mélancolique à l’ensemble, presque désespéré, et ça se marie parfaitement avec ce que l’on attend des français. The Worst is Yet to Come continue dans cette rythmique assez nerveuse pour le groupe. On a un gros riff de guitare qui se couple parfaitement avec la basse, et les couplets bénéficient encore de cette mélodie un peu aqueuse, qui colle au chant qui est modifié pour donner plus de sens aux paroles et à l’ambiance recherchée. Tout est parfaitement pensé dans les moindres détails.

En abordant In Disguise, on retrouve un Hangman’s Chair qui est plus en corrélation avec son dernier album. On a droit à un titre plus lent, plus doux, qui arbore toujours son aspect dépressif, mais qui propose un vrai voyage intéressant et introspectif. Chose que l’on aura moins sur Kowloon Lights qui arborera des riffs assez lumineux, avant de clôturer sur quelque chose de plus costaud et de plus lourd. Le titre est vraiment bon, mais il marque moins que les suivants. Notamment 2 AM Thoughts qui baigne vraiment dans une ambiance dépressive à souhait. La batterie permet de lancer un riff puissant, avant de se contrebalancer avec une autre sonorité de guitare plus douce, plus aérienne. Il y a vraiment plusieurs pistes de lecture dans ce morceau, et c’est d’une richesse folle. Tout comme Canvas qui alterne phase nerveuse avec moment plus calme et éthéré.
Neglect fait partie de ces titres qui ne sont pas faciles à aborder au premier coup. Le début est froid, calme, planant, puis petit à petit, il y a une montée crescendo vers quelque chose de plus percutant, de plus violent. La construction est progressive, et c’est vraiment une belle démonstration de la part du groupe. 44 YOD contient aussi des éléments plus progressifs, avec une ambiance sublime, douce, liquoreuse, qui fait presque du bien. On y retrouverait presque des éléments de Shoegaze. Enfin, Healed ? clôture l’album de la plus belle des façons, avec un morceau synthétique de tout l’album. C’est non seulement beau, mais c’est d’une puissance lourde, assommante, n’oubliant jamais le côté mélancolique de l’ensemble. C’est vraiment implacable et d’une maestria qui force le respect, de faire se côtoyer la noirceur avec la lumière, la puissance avec la douceur.
Au final, Saddiction, le dernier album de Hangman’s Chair, est une réussite sur tous les plans, et l’un des meilleurs albums de l’année. Continuant son exploration de notre mélancolie, alliant à cela une ambiance urbaine en proie à une perdition nocturne en pleine cité, les français signent un skeud dense, puissant, à la fois sombre et lumineux, doté d’une poésie folle insoupçonnée. Bref, un album qui rentre d’ors et déjà à la postérité.
- 01. To Know the Night
- 02. The Worst is Yet to Come
- 03. In Disguise
- 04. Kowloon Lights
- 05. 2 AM Thoughts
- 06. Canvas
- 07. Neglect
- 08. 44 YOD
- 09 Healed ?
Note : 19/20
Par AqME