mai 2, 2024

Quand Vient la Nuit

Titre Original : The Drop

De : Michaël R. Roskam

Avec Tom Hardy, James Gandolfini, Noomi Rapace, Matthias Schoenaerts

Année : 2014

Pays : Etats-Unis

Genre : Thriller

Résumé :

Bob Saginowski, barman solitaire, suit d’un regard désabusé le système de blanchiment d’argent basé sur des bars-dépôts – appelés « Drop bars » – qui sévit dans les bas-fonds de Brooklyn. Avec son cousin et employeur Marv, Bob se retrouve au centre d’un braquage qui tourne mal. Il est bientôt mêlé à une enquête qui va réveiller des drames enfouis du passé…

Avis :

Parmi les auteurs de polars américains qui ont la côte au cinéma, Dennis Lehane tient la dragée haute à de nombreux autres écrivains. On peut compter sur d’excellents films qui ont été adaptés de ses œuvres, comme Gone Baby Gone, Mystic River ou encore Shutter Island. Ce que l’on sait moins, c’est que Dennis Lehane écrit aussi pour le petit écran, notamment sur des séries comme The Wire ou Boardwalk Empire. Avec Quand Vient la Nuit (ou The Drop en VO, qui claque un peu plus), le romancier écrit de sa plume, et pour la première fois pour le grand écran, le scénario d’un thriller vénéneux, très lent, issu d’une de ses nouvelles, Animal Rescue. Originellement réalisé par Neil Jordan, c’est finalement le belge Michaël R. Roskam qui va être derrière la caméra, ce dernier s’étant fait remarquer avec Bullhead, son précédent film.

Quand Vient la Nuit est donc un polar qui se déroule dans les bars de Brooklyn, et qui présente ces lieux comme des plaques tournantes de l’argent sale New-yorkais. On va y croiser Bob, un barman mutique mais avec le cœur sur la main, associé avec Marv, le patron du bar. Un soir, ils se font braquer et perdent près de 5000 dollars. On va alors apprendre que les vrais patrons du bar sont des tchétchènes qui écoulent de l’argent à travers plusieurs bars dans la ville et ils veulent que les deux hommes retrouvent cet argent. Dans le même temps, Bob trouve un bébé pitbull dans la poubelle d’une jeune femme, avec qui il va nouer des liens amicaux. Sauf que l’ex de cette dernière est un camé violent dont la rumeur veut qu’il ait tué un pauvre gamin. C’est dans ce contexte que l’histoire prend place.

« Tout ce petit monde compose une ambiance très sombre. »

Au niveau du scénario, le film joue surtout sur ses personnages, et sur l’ambiguïté que chacun peut avoir. L’intelligence du récit présente un barman sympathique bien que mutique, qui fait ce qu’on lui demande de faire sans trop poser de questions. Il essaye de mener sa vie sans tumulte, et semble se laisser faire, même lorsque la situation demande un peu de violence. On se doute bien que le personnage cache un lourd passé, mais son flegme le rend très empathique. Contrairement à son cousin, Marv, qui semble fatigué par cette situation, et qui, lui aussi, possède un background assez complexe. Le film explore alors la difficulté de l’euthanasie, ou encore cette sensation d’avoir raté sa vie lorsqu’on se retrouve à voyager avec sa sœur, et pas son âme sœur. Il se dégage de ces deux personnages une mélancolie communicatrice, conférant au film une ambiance particulière.

Mais ce ne sont pas les seuls protagonistes qui dégagent une telle tristesse dans leur vie. Nadia, la jeune femme que croise Bob, possède une histoire sombre qui fait écho aux violences conjugales. Son ex petit-ami la menace, la frappe et la persécute, et il va voir en Bob une menace dont il faut se débarrasser en lui faisant peur. Ce personnage ignoble est joué par un Matthias Schoenaerts habité, auquel on a vraiment envie qu’il arrive des bricoles. Avec ce personnage, le film joue sur les rumeurs, sur les on-dit, et sur l’incapacité de la police à mener une enquête de façon efficace dans un quartier mal famé. Tout ce petit monde compose une ambiance très sombre, dans laquelle végètent Bob et Nadia, dont la relation va évoluer dans le bon sens, créant alors une petite lueur d’espoir.

« Les comédiens sont vraiment bons dans ce film. »

Si l’ambiance est vraiment intéressante et permet de maintenir une certaine tension, il faut aussi reconnaître que le film manque parfois de rythme. La réalisation de Michaël R. Roskam est propre, mais elle manque de plans iconiques, ou de passages qui frappent un peu plus fort. S’il s’agit d’un film de personnages, il y a certains moments qui trainent en longueur, ou qui rentrent dans des clichés un peu faciles. Le coup des tchétchènes ultra violents qui menacent de façon indirecte rentre dans les stéréotypes du genre et c’est dommage. De même, au bout d’un moment, on se doute que tous les personnages cachent un lourd passé, et de ce fait, on attend que le côté sombre ressurgisse. Et si parfois ça fonctionne (comme avec le personnage de Tom Hardy), d’autre fois, c’est moins pertinent, à l’image du camé campé par Matthias Schoenaerts.

Heureusement, les comédiens sont vraiment bons dans ce film. A commencer par Tom Hardy, qui fait du Tom Hardy. C’est-à-dire qu’il est mutique, assez mystérieux, et dégage une sorte de force tranquille. A ses côtés, James Gandolfini, dont c’est le dernier rôle avant d’être emporté par une crise cardiaque, est assez touchant dans son rôle, celui d’un homme fatigué par les magouilles, et qui veut faire un dernier coup pour quitter le pays. Noomi Rapace est aussi impressionnante dans ce rôle de femme battue, qui demande de l’aide sans le dire, et qui trouve en Bob un espoir de revivre de façon presque joyeuse. Enfin, Matthias Schoenaerts est très bon dans ce rôle de méchant de l’histoire, de type paumé qui veut mener la terreur, mais qui n’a que de la bouche. Ce quatuor tient le film sur ses épaules.

Au final, Quand Vient la Nuit est un film qui est très intéressant dans son ambiance et ses personnages. Sans être complexe, le récit se suit sans déplaisir, et les acteurs sont réellement investis dans leur rôle respectif. Il est juste dommage que la réalisation soit si « simple » (en même temps, cela donne plus de réalisme) et qu’il n’y ait pas plus de scènes percutantes, comme celle dans le dernier acte, avec une révélation attendue. Bref, il s’agit d’un bon thriller, d’un polar bien noir, plaisant, mais auquel il manque un petit truc en plus pour vraiment marquer.

Note : 14/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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