avril 25, 2024

Ailleurs si j’y Suis

De : François Pirot

Avec Jérémie Renier, Suzanne Clément, Jean-Luc Bideau, Jackie Berroyer

Année : 2023

Pays : Belgique, Luxembourg, Suisse, France

Genre : Comédie

Résumé :

Alors que sa famille et son métier le mettent sous pression, Mathieu, sur un coup de tête, s’enfonce dans la forêt devant chez lui. Et y reste. Face à cette démonstration de liberté, ses proches s’interrogent… Sur lui, sur eux-mêmes, sur le sens de leur vie… Et s’il avait raison ?

Avis :

Réalisateur belge pas vraiment connu, François Pirot a réalisé un premier long-métrage il y a une dizaine d’années de cela. Ce premier long-métrage, ce fut « Mobile Home« , une petite comédie emmenée par Arthur Dupont et Guillaume Gouix, qui incarnaient deux potes qui plaquaient tout, achetaient un camping-car et partaient sur les routes. Depuis ce film, on n’avait plus vraiment de nouvelles du cinéaste, hormis un documentaire passé totalement inaperçu. Pour trouver le nom de François Pirot, il fallait alors chercher du côté de l’écriture, car l’homme est aussi scénariste, et il a continué sa collaboration avec Joachim Lafosse en co-écrivant « Les Intranquilles« .

« Mobile Home » était une gentille comédie qui parlait d’une échappée, d’une envie d’évasion, de quitter sa vie, et avec ce deuxième film, échapper à sa vie a tout l’air d’être une des obsessions de son réalisateur, puisque « Ailleurs, si j’y suis » est un film qui va aborder ce sujet à travers le « craquage » d’un homme et l’effet que cette situation peut avoir sur ceux qui l’entourent.

«  »Ailleurs si j’y suis » demeure toutefois un film inégal devant lequel se conjuguent très facilement amusement et ennui. »

Partant d’une bonne idée, « Ailleurs si j’y suis » demeure toutefois un film inégal devant lequel se conjuguent très facilement amusement et ennui, cela dépendra des moments, des personnages et des petits rebondissements qui parsèment cette histoire, dont parfois, on a bien du mal à comprendre où est-ce qu’elle veut aller.

Mathieu, la quarantaine bien tassée, s’est construit une belle vie. Il est bien établi aussi bien dans sa vie privée que sa vie professionnelle, et pourtant, quelque chose ne va pas. En fait, sa vie n’est que pression, et un jour, alors que toutes les pressions sont en train de se réunir, Mathieu craque. Attiré par la forêt derrière chez lui, Mathieu y entre, et là, auprès d’un étang qu’il découvre, il décide de ne plus en ressortir et de vivre ici. Pour combien de temps, il ne le sait pas, il veut juste être là, car il est bien ici… Et ce choix va alors affecter beaucoup de ses proches.

En voilà un film bien singulier. Pour son deuxième film, François Pirot a eu l’envie d’un film choral, qui se poserait comme un effet papillon, avec un personnage qui prend une décision et cette dernière provoque dans son entourage énormément de remises en question. Que faire quand la vie moderne oppresse ? Et jusqu’où cette impression peut aller ? Chez nous, on appellerait ça un burn-out, et ce burn-out, devant la caméra de François Pirot, prend des allures de retour à la nature.

« Le film explore la peur d’une paternité, la peur d’une retraite, la peur d’un après la maladie… »

Partant d’une excellente idée et d’un scénario qui aborde des thèmes qui sont intéressants, comme la pression de la société, le fait de ne pas être satisfait de sa vie, ou encore le fait de ne pas faire ce que l’on attend de nous, « Ailleurs si j’y suis« , sur le papier, se pose comme un bon film. Un film qui questionne l’existentiel et pousse à la réflexion, tout en injectant de manière subtile une parenthèse de fantastique, avec cette forêt qui apaise le stress. Une forêt qui, à l’image, apparaît comme un petit coin de paradis.

Toujours dans son écriture, François Pirot suit tout un tas de personnages qui sont impactés par cette décision et les thèmes que l’intrigue explore sur son personnage, se projetant aussi sur les autres. Ainsi, femme, ami, patron ou encore famille, ont tous le droit à leur remise en question et de petits rebondissements qui sont là encore intéressants. Le film explore la peur d’une paternité, la peur d’une retraite, la peur d’un après la maladie, la peur d’un changement de vie, ou encore le fait de vivre avec un fantasme de vie qu’on sait inatteignable. D’ailleurs, beaucoup de ces personnages se mentent à eux-mêmes, se voilant la face. Bref, sur le papier, « Ailleurs, si j’y suis » a de très solides arguments.

« François Pirot explore bien certains personnages, mais l’ensemble n’avance pas vraiment. »

Mais une fois qu’on passe à l’image, le film de François Pirot se fait plus compliqué. Film d’auteur dans la plus pure tradition du genre, même si le film arrive à nous amuser avec un humour décalé et des dialogues burlesques, « Ailleurs si j’y suis » demeure néanmoins un film devant lequel on a du mal à pleinement entrer, car il est parsemé de longueurs, et derrière ça, de moments et autres rebondissements qui ne sont pas franchement intéressants. Alors que le film avait très bien commencé, en présentant parfaitement ses personnages et la pression qui est exercé sur le personnage de Mathieu, parfaitement tenu par un Jérémie Renier solaire, très vite, une fois tout mis en place, le film de François Pirot a une tendance à retomber, et même si parfois, le tout arrive à nous rattraper, il y a un ventre mou où ça tourne en rond.

François Pirot explore bien certains personnages, mais l’ensemble n’avance pas vraiment et comme je le disais, on a du mal à saisir où le film veut en venir finalement. Ce sentiment va aussi être accentué avec son final, qui nous laissera alors sur notre faim. Certes, il sera logique, mais il est abrupt et l’on finit par se dire le traditionnel : tout ça… pour ça…

« Tous ces personnages ont quelque chose d’attachant. »

Heureusement pour nous, et pour le film, « Ailleurs, si j’y suis » arrive à nous amuser et à nous tenir (face à l’ennui) grâce à des personnages qui sont pathétiquement amusants. Il faut dire que ces personnages arrivent à être hauts en couleurs, tout en étant tout à fait normaux, voire banals. Bon, il faut dire qu’ils sont tous très bien tenus par un casting réjouissant. Un casting où l’on croise une Suzanne Clément en pleine crise existentielle, un Jean-Luc Bideau en patron dépassé, un Samir Guesmi en plein regret « d’adulescent », et un Jackie Berroyer en père qui se voit sans avenir…

Tous ces personnages ont quelque chose d’attachant, et c’est grâce à eux que le film ne nous fait pas sombrer dans l’ennui total, car malgré ce dernier, il y a quelque chose qui fait qu’on a envie de les suivre et de savoir où est-ce que cette intrigue, et ces remises en question, vont les amener.

Ainsi donc, on ressort de ce deuxième film de François Pirot très partagé. Ennui et amusement se conjuguent parfaitement, au sein d’une intrigue intéressante, qui aborde tout un tas de thèmes qui ont leur importance. Ofni total, ce deuxième film pour François Pirot, même s’il m’a un peu largué, laisse transparaître un cinéaste singulier, qui a un univers, et ça, c’est déjà intéressant. À voir, ou pas, c’est comme vous en avez envie, car c’est vraiment particulier, et à la fin de cette chronique, je ne suis pas sûr de m’être totalement fait un avis, tant cette intrigue et ces personnages se bousculent lorsque j’y repense…

Note : 09/20

Par Cinéted

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