De : Paul Feig
Avec Emilia Clarke, Henry Golding, Emma Thompson, Michelle Yeoh
Année : 2019
Pays : Angleterre, Etats-Unis
Genre : Comédie, Romance
Résumé :
Kate traîne derrière elle une série de mauvaises décisions et erre dans Londres au son des grelots accrochés à ses bottes de lutin, seul emploi qu’elle ait réussi à décrocher dans une boutique de Noël. C’est pourquoi elle n’en croit pas ses yeux quand elle rencontre Tom qui semble voir en elle bien plus que ce qu’elle laisse paraître. Alors que la ville se pare de ses plus beaux atours pour les fêtes de fin d’année, rien ne semblait les prédisposer à nouer une relation. Mais parfois, il suffit de laisser opérer la magie de Noël, d’ouvrir son cœur et d’y croire…
Avis :
Certains projets semblent maudits tant il faut du temps pour qu’ils puissent voir le jour. C’est un peu le cas de Last Christmas. En 2009, David Livingstone a l’idée de mettre en scène la chanson de George Michael « Last Christmas ». Il en parle alors au chanteur qui accepte le challenge, à condition que ce soit Emma Thompson qui en écrive le scénario. Et elle s’y attèle avec son mari, Greg Wise. Malheureusement, pour on ne sait quelles raisons, le projet n’aboutit pas. Quelques années plus tard, le scénario est relancé, mais Emma Thompson n’est pas disponible et l’histoire aboutit dans les mains du scénariste Bryony Kimmings qui va en faire un premier jet. Mais en 2016, George Michael décède, ce qui retarde davantage le film. Cependant, le mari d’Emma Thompson va tomber sur l’ancien manager du chanteur, et le projet va alors enfin voir le jour.
Derrière cette histoire rocambolesque, on retrouve donc Emma Thompson à l’écriture, mais aussi Paul Feig derrière la caméra, lui qui s’était promis de ne plus faire de film de Noël depuis Enfants Non Accompagnés en 2006. Ce dernier accepta le projet, car c’est la scénariste/actrice/productrice qui lui a elle-même envoyé le script. Bref, Last Christmas peut alors débouler dans les salles, avec deux points forts pour attirer le public, Emilia Clarke qui a toujours le vent en poupe depuis Game of Thrones, et la pancarte d’une comédie romantique de Noël (Coucou Love Actually et consorts). Et globalement, on peut dire que le film est une petite surprise tant il se fait surprenant, agréable, et ne joue pas forcément sur les codes de la romcom. Sobre, gentiment drôle sans être hilarant, mignon dans sa mise en scène, Paul Feig délivre un joli conte qui surprend avec son twist.
« Le cœur même du film réside vraiment dans les actes de charité qui permettent de se sentir vivant. »
On va donc suivre Kate (ou Katarina), immigrée yougoslave qui travaille dans un magasin de décorations de Noël et qui rêve de devenir chanteuse. Miss catastrophe en puissance, elle n’a nulle part où dormir et se refuse à rentrer chez ses parents, où les relations sont compliquées. De plus, elle foire toutes ses auditions à cause de son côté volubile et de ses retards. Jusqu’au jour où elle rencontre Tom, un homme étrange, qui lui fait découvrir Londres de façon différente, et qui bénévole pour aider les sans-abris de la ville. Des émotions commencent alors à apparaître, mais Tom n’a pas de téléphone portable, et il apparait au gré de ses envies, laissant souvent Kate dans une situation agaçante. Mais cela permet aussi à la jeune femme de découvrir qu’aider les autres va lui faire un bien fou, s’engageant même dans le bénévolat dans l’espoir de revoir Tom.
Comme on peut s’y attendre, Last Christmas est une romance. Une histoire d’amour simple et jolie entre une fille un peu névrosée qui recherche la reconnaissance, et un homme bizarre, qui essaye de profiter de ce que lui offre la vie, loin des écrans. Emma Thompson tisse une relation saine où deux personnes vont s’apprivoiser petit à petit, au gré des balades, des découvertes et de l’entraide. Le cœur même du film réside vraiment dans les actes de charité qui permettent de se sentir vivant, de se rendre compte qu’aider l’autre est un besoin vital et nous raccroche à l’essentiel. Plus finalement que l’amour entre deux êtres, c’est cette sensation galvanisante de servir à quelque chose qui fait du bien et délivre l’héroïne d’une dépression qui ne fait qu’empirer en début de film. Une autodestruction qui provient d’un mal être personnel et familial.
« Paul Feig va proposer une mise en scène tout aussi sobre. »
Last Christmas est peut-être simple, mais il fonctionne avec des thèmes importants et beaux. Outre le fait de remettre l’empathie et l’altruisme au centre même de son humanisme, le scénario propose une jolie vision sur la famille. Complètement névrosée, la famille de Kate est fragmentée entre une sœur jalouse qui n’avoue pas son homosexualité à ses parents, et des parents qui ne se parlent plus, entre une mère inquiète du Brexit et du racisme, et un père qui n’a plus d’avenir, passant d’avocat à conducteur de taxi. Le film propose même une légère vision sociétale autour des immigrés, du racisme et de la libération de ce dernier à cause du Brexit. Finalement, même si on fait face à une comédie romantique presque basique, il y a du fond et un vrai travail sur les personnages. Personnages qui cachent tous des secrets plus ou moins lourds.
Et puis il y a ce twist sur la fin. Si l’on peut voir le film comme une comédie romantique lambda, la fin redistribue les cartes et va venir nous toucher en plein cœur. Loin d’être mièvre, loin d’un final classique de ce genre de film, Emma Thompson a l’intelligence de fournir autre chose et d’apporter une superbe réflexion sur un autre sujet sensible et important (pas de spoil). Afin de rendre tout cela encore plus beau, Paul Feig va proposer une mise en scène tout aussi sobre, qui rend justice à Londres, avec des décorations de Noël qui sont sublimes. Le film est beau à voir dans des décors naturels, n’accentuant pas non plus à l’extrême le côté fête de Noël. Encore une fois, comme pour son histoire, cela reste sobre, et finalement assez juste. Et ça fait un bien fou de ne pas plonger dans le mélo larmoyant.
Au final, Last Christmas est une vraie bonne surprise. Si le film ne réinvente pas la sauce en matière de comédie romantique dans son déroulé, il réserve un beau twist final qui nous touchera. Sobre, lumineux, n’oubliant pas ses personnages secondaires et un contexte social fort, on peut dire que le film de Paul Feig remplit bien ses missions. Et puis les amoureux de George Michael seront aux anges, puisque toute la bande originale est composée des titres du chanteur et de Wham !. Bref, comme quoi, on peut encore être agréablement surpris par une comédie romantique de Noël.
Note : 15/20
Par AqME