mai 2, 2024

The Nice House on the Lake

Auteurs : James Tynion IV et Alvaro Martinez Bueno

Editeur : Urban Comics

Genre : Horreur, Science-Fiction

Résumé :

Tous les conviés connaissent Walter – enfin, ils le connaissent un peu, en tout cas. Certains l’ont rencontré dans leur enfance, d’autres l’ont rencontré quelques mois auparavant. Et Walter a toujours été un peu… absent. Mais après une année difficile, personne n’allait refuser l’invitation de ce dernier dans une maison de campagne située à l’orée d’un bois et avec vue sur lac. C’est beau, c’est opulent, c’est privé – de quoi supporter les petites combines et les surnoms bizarres donnés par Walter. Mais ces vacances de luxe revêtent très vite des airs de prison dorée.

Avis :

James Tynion IV est un peu la nouvelle coqueluche de DC comics. S’il commence à poser des bases de l’univers Batman Metal, c’est aussi à lui que l’on doit des titres comme Justice League Dark ou encore Batman Eternal et Batman – Joker War. De gros runs qui démontrent tout le talent du scénariste, qui arrive à donner une patte personnelle à tout ces titres. Mais surtout, on sent que le bonhomme s’éclate dans un univers sombre, qui lorgne souvent vers l’horreur et le fantastique. Car si The Department of Truth étudiait avec malice les légendes urbaines, c’est avec Something is Killing the Children que James Tynion IV va s’imposer et imposer un univers sombre et horrifique. Cela se confirme alors avec son diptyque The Nice House on the Lake qui va remporter un prix, le Eisner de la meilleure nouvelle série 2022.

Dès le début, on nous place dans une maison luxueuse aux côtés de plusieurs personnages qui se connaissent plus ou moins. Ils ont tous été invité par Walter, un ami commun, qui a fait du forcing pour les réunir le temps d’un weekend. Seulement, les choses vont rapidement déraper lorsque les protagonistes découvrent que le monde est à feu et à sang et qu’ils vivent dans une bulle où ils sont en sécurité. Walter leur annonce alors qu’ils sont les seuls survivants et qu’il les a sauvés car ils les aiment. De colère, une amie tente de le frapper à la tête avec un tison, mais Walter devient alors une sorte d’homoncule intangible et explose le bras de l’agresseuse avec la pensée. La panique s’empare alors du groupe, qui va devoir s’organiser pour comprendre ce qui lui arrive. Voilà le point de départ de cette histoire.

Ce qui frappe en premier lieu va provenir de la narration, qui est répétitive, mais qui arrive à se renouveler à chaque fois. Ainsi, l’un des personnages raconte son passif avec le fameux Walter (et potentiellement d’autres personnages de la maison), on a droit à quelques échanges de mails, de discussions ou d’écrans de téléphone, puis on revient vers le présent et la vie dans la maison. Cette façon de faire permet de distiller avec parcimonie des éléments de réponse, mais surtout de donner du corps à des personnages nombreux. Chacun est désigné par un symbole et une fonction, et chacun va avoir un rôle à jouer dans cette histoire. C’est là l’une des grandes forces de ce récit, de donner de l’épaisseur à tout le monde, mais aussi au groupe en lui-même, qui va aller de découverte en découverte.  

Des découvertes qui sont souvent faites seules ou en duo, et qui vont cristalliser des tensions lorsque tout un chacun se rend compte que personne ne dit vraiment la vérité. Paranoïaque à souhait, The Nice House on the Lake entretient des tensions afin de rendre compte de comportements plus ou moins bizarres. En même temps, que ferions-nous dans une telle situation, en étant les derniers survivants de l’espèce et vivant dans une prison dorée où l’on peut commander ce que l’on veut. James Tynion IV, à travers cette histoire, interroge sur notre propre nature et sur notre humanisme. La séquence de la tentative de suicide en est un exemple parmi tant d’autres, mais on retiendra surtout les déviances du « comique » qui trouve des armes à feu et souhaite savoir ce que fait la sensation de prendre une balle, puisque personne ne peut mourir en ce lieu.

Mais au-delà de tout ça, ce qui est savamment bien mis en scène, ce sont les interrogations des personnages, ainsi que les apparitions furtives de Walter. En effet, le bougre apparait tout le temps avec son visage difforme et éclaté, dans des moments incongrus, où il va manipuler son petit monde. Il ne révèle jamais sa vraie nature, mais pousse les protagonistes à jouer à un jeu dangereux, les voyant certainement comme des rats de laboratoire. Ce personnage pèse sur toutes les planches, et notamment dans les flashbacks, où il est omniprésent, chacun revenant sur son aventure avec lui. Cela entraine alors des réactions en chaine dans la baraque, avec des mystères qui s’épaississent de jour en jour, et des découvertes étonnantes, comme cette deuxième maison de l’autre côté du lac. Bref, narrativement, c’est bien amené et on se plait dans cette énigme à résoudre.

Si l’horreur arrive assez vite, elle va surtout être sur toutes les pages, et dans une histoire tortueuse qui ne dévoile jamais toutes ses cartes. Outre l’introduction percutante avec la révélation de la nature de Walter, le scénariste arrivera toujours à rappeler que les protagonistes sont piégés et que l’extérieur n’existe plus. On fait face à un huis-clos étouffant, angoissant, tant on cherche les réponses avec les personnages, qui vont alors tenter des choses, jusqu’à risquer leur vie. Cela est bien mis en images par Alvaro Martinez Bueno, qui utilise un trait vif et des couleurs sombres pour mieux nous plonger dans une ambiance anxiogène. D’ailleurs, les teintes iront d’un bleu froid à un orange chaud pour l’extérieur, symbolisant la planète en feu. Cela ajoute une sensation d’horreur à l’ensemble. Une horreur mature et qui monte crescendo, et qui nous tient au corps et au cœur.

Au final, ce premier tome de The Nice House on the Lake est très prometteur et devient même un incontournable de ce début d’année. L’histoire en elle-même est très intelligente, mais elle est sublimée par une narration inventive, fraîche et qui s’amuse en ajoutant des écrans d’ordinateur ou de téléphone pour montrer les discussions entre les personnages, avant que ceux-ci ne soient dans la maison. James Tynion IV manie extrêmement bien sa barque, distillant aussi des indices avec parcimonie, permettant une tension permanente et une plongée progressive vers une horreur insidieuse et maline. Bref, un gros coup de cœur dont il serait dommage de passer à côté.

Note : 18/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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