décembre 9, 2024

Les Repentis – Le Grand Pardon

Titre Original : Maixabel

De : Iciar Bollain

Avec Blanca Portillo, Luis Tosar, Urko Olazabal, Maria Cerezuela

Année : 2022

Pays : Espagne

Genre : Biopic

Résumé :

L’histoire réelle de Maixabel Lasa, la veuve de Juan Maria Jauregui, un homme politique assassiné par l’organisation terroriste ETA en 2000. Onze ans plus tard, l’un des auteurs du crime qui purge sa peine en prison demande à la rencontrer, après avoir rompu ses liens avec le groupe terroriste.

Avis :

Écrivaine, actrice, productrice et réalisatrice espagnole, Icíar Bollaín est une artiste accomplie qui depuis une quarantaine d’années s’est imposée comme une figure discrète, mais importante, du cinéma espagnol. Si au début de sa carrière, elle se lance dans l’acting, enchaînant assez vite les rôles (et elle sera élue meilleure actrice de l’année en 1992), c’est au cours des années 90 qu’elle change de cap et passe à la réalisation. Ainsi, elle réalise son premier film en 1995, « Coucou, es-tu seule ?« , et depuis, elle n’a cessé d’offrir de beaux longs-métrages, avec un point d’orgue en 2019 avec « Yuli« , biopic sur le danseur Carlos Acosta. Franchement, si vous n’avez pas vu ce film, n’hésitez pas une seule seconde.

Après « Le mariage de Rosa » sorti en 2020 et expulsé par le Covid, Icíar Bollaín revient cette année dans nos salles obscures avec « Les repentis« , film au sujet important, qui a trouvé un joli succès en Espagne avec plus de cinq-cents mille entrées, et derrière ça, qui a raflé trois Goya, dont celui de la meilleure actrice pour Blanca Portillo.

Le pardon, voilà donc le sujet du nouveau film d’Icíar Bollaín. Comment pardonner et pourquoi pardonner à ceux qui vous ont tout pris ? Le film s’arrête sur le Maixabel Lasa, une femme politique basque dont le mari fut tué en 2000 par l’ETA. En 2011, le gouvernement espagnol organise des rencontres restauratives et Maixabel fut l’une des victimes qui accepta de rencontrer les assassins de son mari. Un peu longuet, notamment dans son début, le film d’Icíar Bollaín finit par trouver son rythme, et surtout, il nous tiendra jusqu’à la fin entre intérêt, tension et émotion.

29 Juillet 2000 à Tolosa au Pays Basque, Juan Maria Jauregui est assassiné d’une balle dans la tête. L’homme vient d’être exécuté par l’ETA, laissant derrière lui une femme et une fille de dix-neuf ans. Les auteurs de ce crime ont été retrouvés et jugés. Onze ans plus tard, le gouvernement espagnol met en place pour les victimes, mais aussi pour les hommes et femmes qui après avoir rompu leur lien avec le mouvement et qui désirent se repentir, des rencontres restauratives. La veuve de Jauregui, Maixabel Lasa, décide alors de rencontrer l’un d’entre eux. Que peut-il sortir de ces rencontres ? Et d’ailleurs pourquoi rencontrer ceux qui vous ont tout pris ?

« Il est très difficile de pardonner, car le pardon doit venir du cœur et non de la terre ».

André Boutin.

Voici qui pourrait être la ligne directrice du nouveau film d’Icíar Bollaín. « Les repentis« , comme son titre l’indique, est une histoire de pardon, le pardon de l’autre et peut-être bien le pardon à soi-même. Depuis la fin des années 50, l’Espagne fut parcourue régulièrement par des vagues de crime commis par Euskadi Ta Askatasuna, plus connue sous les abréviations de l’ETA. On estime que l’ETA aurait assassiné plus de huit cent personnes et fait un nombre incalculable de blessés et de mutilés.

Parmi tous les destins fauchés de cette guerre, il y a eu bien des hommes politiques et parmi eux, Icíar Bollaín s’est arrêté sur Juan Maria Jauregui, ou plus précisément sur sa veuve, Maixabel Lasa, qui en plus d’être une activiste et femme politique, est surtout connue comme évoqué plus haut, pour avoir rencontré les assassins de son mari. Le nouveau film d’Icíar Bollaín raconte donc douze ans environ de l’histoire de cette femme, mais aussi de l’un de ses assassins. Pour cela, la réalisatrice nous entraîne dans un drame à la forme très classique, avec présentation des faits, grâce à une ouverture déchirante et sous pression, puis il va y avoir le jugement, et ensuite, après avoir aéré autour de ses personnages, il va y avoir la présentation de ce projet de rencontre, et derrière ça, la question du pardon.

« Les tiraillements de ces personnages sont touchants, la honte, la culpabilité, la douleur, l’envie de comprendre, les récits de chacun…« 

Le fil rouge de ce film est quasi sans surprise, et on peut dire qu’au départ, après la forte ouverture, le ton retombe et ces « … repentis » a tendance à se faire longuet pour arriver à son véritable sujet. Cette « errance » est loin d’être dénuée d’intérêt, mais le rythme lent et la sensation de traîner pour arriver à ces rencontres ont tendance à abîmer le film, et surtout nous faire craindre d’être face à un film qui, s’il tient toute sa ligne comme cela, serait ennuyant, alors qu’il a bien des arguments pour être l’inverse.

Heureusement, la metteuse en scène finit par arriver à ces rencontres et d’un coup, elle transforme son film. Les tiraillements de ces personnages sont touchants, la honte, la culpabilité, la douleur, l’envie de comprendre, les récits de chacun… Bref, le film est tout en émotion et pudeur, et ces rencontres sont presque étouffantes, tant la réalisatrice et ses acteurs ont réussi à capturer quelque chose d’assez incroyable.

Et en parlant de ses acteurs et ses actrices, le film est tenu par de grands comédiens. Si on ne peut pas passer à côté d’Urko Olazabal qui incarne l’un des repentis de cet assassinat, et Tamara Canosa, qui est elle la fille de Maixabel, « Les repentis« , c’est avant tout et surtout deux grands acteurs qui se font face, avec d’un côté Blanca Portillo, absolument parfaite en femme aussi brisée que forte, qui cherche sans le savoir une forme de liberté. Puis en face d’elle, il y a Luis Tosar, incroyable et fort en repenti qui a eu le temps de réfléchir sur la conséquence de ses actes, et qui cherche une forme de rédemption. Les rencontres sont terribles, et ce qui en découle est fort, et nous amènera vers une conclusion superbe.

Si le nouveau film d’Icíar Bollaín a des problèmes de rythme et a du mal à se mettre en place, une fois que les pièces de son puzzle seront réunies, la réalisatrice nous tient, et surtout elle ne nous lâchera plus, face à un film qui pose de très belles questions, abordant le pardon et tout le chemin à faire pour pardonner. Beau, profond et touchant, si ce « … repentis » est moins fort que « Yuli » ou « Même la pluie« , deux des précédents films de la cinéaste, il n’en reste pas moins une belle sortie, particulièrement intéressante. Puis petit truc en plus, on profitera de ce film pour s’évader dans les sublimes paysages du Pays Basque Espagnol.

Note : 14/20

Par Cinéted

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