avril 23, 2024

Billy Summers – Stephen King

Auteur : Stephen King

Editeur : Albin Michel

Genre : Policier

Résumé :

Billy Summers est un tueur à gages, le meilleur de sa profession, mais il n’accepte de liquider que les salauds. Aujourd’hui, Billy veut décrocher. Avant cela, seul dans sa chambre, il se prépare pour sa dernière mission…

Avis :

Essentiellement constellée de romans d’horreur et fantastique, la bibliographie de Stephen King ne se cantonne pourtant pas à ces deux genres. Qu’elles soient intégrées dans un cycle ou indépendantes, ces incursions au registre beaucoup plus pragmatique ont donné lieu à certains de ses ouvrages les plus remarquables. On songe à Misery dans le domaine du thriller ou encore à Dolorès Claiborne en matière de drame familial (et existentiel). Au milieu des années 2010, Mr. Mercedes s’est même révélé un essai convaincant dans le polar. Avec Billy Summers, l’écrivain se plie à un exercice littéraire sensiblement différent : le roman noir.

L’intrigue part d’un postulat classique où l’on suit la fin de parcours d’un tueur en gages. Le fameux « dernier contrat » avant de ranger son arme et de se mettre au vert ne floue personne quant au prétexte avancé. De la voix même de son personnage principal, on l’évoque avec tous les poncifs auxquels on s’attend en pareilles circonstances. De son point de vue, le genre d’erreur dont on est parfaitement conscient, mais que l’on ne peut s’empêcher de commettre. En cela, il est vrai que la trame suit un chemin balisé, pour ne pas dire simpliste. L’action se divise en trois actes : la préparation du contrat, la cavale et le règlement de compte.

Bien entendu, ces éléments se développent par l’entremise d’évènements secondaires. Comme à l’accoutumée, Stephen King déploie une maîtrise narrative stupéfiante pour emporter son lectorat dans des instants anecdotiques ou des séquences somme toute banales. La progression s’avère à la fois patiente et méticuleuse. La caractérisation se montre exhaustive, quitte parfois à fouiller dans les moindres détails le passé ou les traumas récents des différents intervenants. Petit à petit, l’histoire s’efface pour dépeindre des portraits disparates, plus ou moins malmenés par la vie et l’inconséquence de leurs actes. Encore une fois, l’auteur esquisse des personnalités prégnantes, réalistes et sensibles.

« Le fait de s’insinuer dans un roman noir contemporain permet d’étayer un contexte réaliste qui fait écho à l’actualité »

De sensibilité, il y est également question à travers cette dimension émotionnelle qui égrène le parcours de Billy Summers. On ne sombre pas dans le pathos ou l’atermoiement mielleux de ses regrets, ses remords. Le procédé tient surtout à nuancer ses crimes à travers des valeurs, sinon une certaine « éthique professionnelle ». De prime abord, cela peut paraître facile pour se donner bonne conscience ou justifier les assassinats dont il est responsable. Il n’en demeure pas moins une conviction vivace et constante pour rendre le personnage intrigant et complexe, sinon attachant. De fait, on se retrouve bien éloigné d’une approche manichéenne, et ce, même si ses motivations ne sont pas désintéressées de visées pécuniaires.

Le fait de s’insinuer dans un roman noir contemporain permet d’étayer un contexte réaliste qui fait écho à l’actualité. En l’occurrence, on peut évoquer la période qui précède le confinement, la critique affichée de la politique de l’administration Trump ou encore l’ingérence américaine au Moyen-Orient. Certes, cela reste en filigrane de l’intrigue, il n’en demeure pas moins que cela apporte un véritable fond pour crédibiliser le récit et le parcours des protagonistes. Cela vaut aussi pour les quelques clins d’œil et références à d’autres livres de l’auteur. On songe surtout au roman-fleuve 22/11/1963, ainsi qu’à Shining avec des allusions à l’hôtel Overlook et la ville de Boulder.

Au final, Billy Summers s’avance comme un roman noir qui détonne dans l’œuvre de Stephen King. Si l’on y retrouve une progression et un traitement familiers de précédents ouvrages, le genre et le rythme s’écartent sensiblement de ce qu’il a pu écrire auparavant, tout comme pour Histoire de Lisey ou Duma Key. Ici, on ne joue pas sur la complexité de l’histoire ou la densité de l’ambiance. Billy Summers se focalise sur ses personnages et leurs réactions pour appréhender les épreuves de la vie ; que ces dernières possèdent un impact positif ou malheureux par la suite. En somme, le parcours du tueur à gages se veut beaucoup plus humain qu’escompté. Une belle manière de se renouveler, même après presque 50 ans de carrière et autant de livres…

Note : 15/20

Par Dante

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