décembre 11, 2024

Alcest – Spiritual Instinct

Avis :

C’est une récurrente quand on aborde le métal en France, mais c’est un fait indéniable, on a des talents, de grands talents, mais pour les entendre, il faut farfouiller le net ou aller chez un disquaire qui aime ce genre de musique. On a beau être le pays des lumières et de la culture, il y a toujours ce même préavis sur la musique dite extrême, et c’est bien dommage. Alcest est un groupe fondé à la fin des années 90 et est vu comme un projet solo par Neige. Assez rapidement, d’anciens musiciens de Peste Noire viennent rejoindre le projet, mais ils s’en vont aussi vite lorsque des allégations de racisme et de nazisme pèsent sur eux et l’ancien groupe. Neige repart alors tout seul et délaisse même les éléments du Black pour partir vers une musique différente, qui mélange Shoegaze et Post-Métal.

Dès lors, Alcest va être qualifié de Blackgaze, un nouveau genre dont Neige se fait le porte-étendard. En cours de route, et après avoir marqué les magazines spécialisés, aussi bien français qu’étrangers, Winterhalter va venir taper sur les fûts, aussi bien pour les sessions studio que pour les lives. Vu comme un duo, Alcest va continuer son petit bonhomme de chemin, jusqu’à Spiritual Instinct, le sixième album du groupe. Porté aux nues par tous les fans de la première heure, mais aussi par les néophytes, on découvre alors une nouvelle facette d’Alcest qui, en seulement six pistes, va nous cueillir, nous toucher et nous donner envie de se faire mal à la nuque. On peut donc le dire, ce sixième effort est une pépite précieuse pour la musique française en général. Et on pèse nos mots, tant on a pris une belle claque.

Le premier morceau est déjà une tuerie. Les Jardins de Minuit débute de façon assez lente, avec une jolie ligne de basse, puis une mélodie envoûtante qui va venir nous cueillir. La mélopée qui s’en échappe est à la fois doucereuse, insidieuse et surtout mélancolique. La puissance d’Alcest se retrouve là, au milieu d’un shoegaze lent et sirupeux, qui va venir s’insinuer en nous en douceur. Bien évidemment, Neige n’en oublie pas ses éléments Black, avec notamment un petit blast qui va venir enclencher des riffs plus lourds. Cependant, et c’est là aussi une grande force, c’est hyper accessible et joue très peu avec les codes du Black pur jus. On est plutôt dans du Post-Métal, qui prend son temps pour afficher ses objectifs. La petite ritournelle qui viendra de façon redondante dans le titre est juste parfaite et reste un long moment en tête.

La voix du chanteur y est aussi pour quelque chose. Le chant est clair, mais il est aussi en retrait par rapport aux instruments. Cela a pour effet de rendre la chose encore plus éthérée et aérienne. Et cela malgré de gros riffs et une grosse batterie derrière ! Protection va démarrer plus rapidement que le titre précédent, mais il reste dans le même moule. Il s’en dégage une mélancolie douce, et tout cela est ponctué par quelques phases puissantes qui nous laissent abasourdi. Non pas que ce soit violent, ce n’est pas vraiment le terme, mais ça reste intelligent dans sa construction, et très addictif. Encore une fois, il y a une vraie alchimie entre tout ce qui compose le titre. Que ce soit la mélodie, le chant doux, les gros riffs ou l’orchestration en arrière-plan, tout concorde pour rendre l’ensemble beau et puissant.

Sapphire continue sur cette lancée, avec une beauté qui transcende dès les premières notes. Comme pour le premier titre, ce qui prévaut ici, c’est la mélancolie et la douceur insidieuse qui se dégage de l’ensemble. On est vraiment emporté par l’ambiance éthérée qui se dégage de ce titre, et qui fait un bien fou. L’Ile des Morts sera le titre phare de l’album, avec ses neuf minutes. Et même use des mêmes artifices que les titres précédents, il possède une aura particulière qui lui permet de sortir du lot. Outre sa violence qui est percutante, on aura tout de même une montée crescendo avant d’avoir un break calme et simple, qui permet de se reposer avant de reprendre la tempête. Une tempête nostalgique et belle, dans laquelle on se laisse volontiers emporter.

Seul Le Miroir sera un peu en deçà, restant sur une ligne constante de calme et de plénitude. Pour autant, et malgré son côté moins marquant, le titre reste une réussite technique et fait pleinement partie de l’album. C’est aussi une grande force que de placer des morceaux doux dans un album qui lorgne tout de même vers du Black. Spiritual Instinct viendra conclure ce voyage sublime en reprenant un schéma structurel complexe mais que l’on commence à maîtriser, usant d’une belle montée pour mieux nous conquérir. Bref, c’est d’une rare beauté et rarement un mélange de Black n’aura eu autant d’émotion et de sensibilité.

Au final, Spiritual Instinct, le dernier album en date de Alcest, est une sublime et pertinente réussite. Oscillant constamment entre Post-Métal, Black et Shoegaze, le duo français réinvente les codes pour mieux les détourner et nous offrir un genre inédit. C’est à la fois mélancolique, doux et parfois violent, sans jamais tomber dans l’excès et trouvant tout le temps un juste équilibre. Bref, un album immanquable et superbe.

  • Les Jardins de Minuit
  • Protection
  • Sapphire
  • L’Ile aux Morts
  • Le Miroir
  • Spiritual Instinct

Note : 19/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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