De : Woody Allen
Avec Wallace Shawn, Elena Anaya, Gina Gershon, Louis Garrel
Année : 2022
Pays : Etats-Unis, Espagne, Italie
Genre : Comédie, Romance
Résumé :
Un couple d’Américains se rend au Festival du Film de Saint-Sébastien et tombe sous le charme de l’événement, de l’Espagne et de la magie qui émane des films. L’épouse a une liaison avec un brillant réalisateur français tandis que son mari tombe amoureux d’une belle Espagnole.
Avis :
Depuis plus de cinquante ans maintenant, un peu comme un rendez-vous pris, tous les ans, on a le droit à notre petite aventure Allenesque. Woody Allen est de ceux qui sont infatigables et qui ne cessent de tourner encore et encore. Pourtant, voilà qu’il y a eu quelque chose d’inédit dans sa carrière, un trou… Un trou de près de trois ans. Alors bien sûr, il y a le covid qui a repoussé la date de sortie, mais âgé de quatre-vingt-quatre, ou cinq, ans, le cinéaste a l’air de mettre un peu plus de temps à écrire et réaliser ses films. Après, il reste infatigable quand même, car le réalisateur new-yorkais vient de se lancer dans la production d’un cinquante-troisième film, qui sera un thriller tourné en français avec un casting entièrement français et à Paris, une première !
Quoi qu’il en soit, revenons au film qui nous intéresse aujourd’hui, « Rifkin’s Festival« , que Woody Allen a tourné en Espagne dans la ville de Saint-Sébastien. Loin d’être un grand Woody Allen, ce petit cru 2022 pour le réalisateur a toutefois son charme qui nous fait passés au-dessus de la déception qu’avait été « Un jour de pluie à New York« . Sorte de psychanalyse, « Rifkin’s Festival » est un savoureux mélange entre nostalgie, déclaration d’amour et comédie avec cette écriture dont Woody Allen a le secret. Ainsi, même si on n’est pas dans la tranche d’un « Wonder Wheel » ou « L’homme irrationnel » (pour citer ses derniers excellents films), ce petit « Rifkin’s Festival » amuse, envoûte, et au bout du compte, il est plaisant à la découverte, d’autant plus que Wallace Shawn en ersatz de Woody Allen y est plus que parfait.
Mort Rifkin se rend au Festival de Saint-Sebastien pour y suivre sa femme, qui est l’attachée de presse d’un cinéaste français qui commence à sacrément percer. Mort se fiche un peu du festival, ce qui l’intéresse, c’est l’Espagne. Vieillissant, Mort sent une petite douleur dans sa poitrine, et c’est ainsi qu’il va faire la connaissance du Docteur Jo Rojas, une jeune femme qui va charmer ce vieux Mort, et avec laquelle il va prendre plaisir à découvrir la ville, et à même se fantasmer dans quelques séquences très cinématographiques…
Le cinéma de Woody Allen, c’est comme des montagnes russes, avec ses sommets d’un côté et ses plus bas que de terre de l’autre (oui, avec plus de cinquante ans de carrière et tout autant de films, le réalisateur ne peut pas toujours être au top) et aujourd’hui, on s’arrête sur ce nouveau cru qui comme je le disais, est somme toute plutôt sympathique.
À la croisée de la comédie et du drame psychanalytique, Woody Allen nous plonge dans le quotidien vacancier de Mort, un personnage qui pourrait très bien être Woody Allen lui-même tant ce personnage haut en couleurs, qui parle beaucoup et se pose trop de questions, ressemble à Woody Allen. Bref.
Pour cette nouvelle échappée en Europe, Woody Allen reprend une grande partie des éléments qui font vivre son cinéma depuis toujours. Ainsi, au sein de ce scénario, on trouvera des relations de couples, des personnages qui ne cessent de se croiser, des personnages de tout horizon. C’est vrai que ces thèmes-là ont tellement été explorés par le cinéaste que ça peut sentir le réchauffé dans un sens, mais en même temps, c’est tellement ancré dans le cinéma de Woody Allen, que c’est évident, on ne s’attend pas à autre chose. Puis derrière ces relations, ces coucheries à droite et à gauche, « Rifkin’s Festival » est un film qui parle de cinéma, autre sujet important de la filmo d’Allen et dans ce film, il y en a même un peu plus que d’habitude, puisque le réalisateur fait une très belle déclaration d’amour à tout un cinéma qui l’a fait vibrer.
« Rifkin’s Festival » citera alors François Truffaut, Ingmar Bergman, Federico Fellini, Claude Lelouch, Orson Welles, dans des séquences fantasmées en noir et blanc qui sont de toute beauté. D’ailleurs, plus que les petites psychanalyses amoureuses qu’on trouve dans ce film, ce sont ces scènes-là qui ont le plus d’intérêt. Ces séquences entrent parfaitement dans ce film, et lui donnent un très joli charme, en plus d’être très plaisantes à suivre, car Woody Allen a réécrit les scènes pour les adapter à son intrigue, ce qui donne des moments plutôt savoureux. Puis on sent que c’est sincère et amoureux de la part du réalisateur qui s’amuse avec ces hommages, dans lesquels Wallace Shawn est vraiment parfait.
Pour le reste, « Rifkin’s Festival » est une machine parfaitement huilée, avec comme toujours ce rythme Allenien qui fait que tout s’enchaîne bien. Évidemment, la BO jazzy entraînante qu’on trouve dans tous les films de Woody Allen est bien là. Le réalisateur parsème son film de répliques bien vues qui accentuent son côté comédie, ce qui nous fait sourire et passer un petit moment sympa. Puis enfin, comme toujours, le réalisateur a réuni un casting assez incroyable, au sein duquel on trouve une Elena Anaya pleine de charme, un Louis Garrel terrible d’égocentrisme en réalisateur français qui veut ni plus ni moins que résoudre le conflit israélo-palestinien en un film. On trouvera aussi avec plaisir la trop rare Gena Gershon, ou encore Sergi López pris sur le fait, et enfin Christoph Waltz qui incarnera la mort de Bergman revue par Woody Allen. Mais bien sûr, comme je l’ai déjà évoqué, au-dessus de ce très bon casting, il y a Wallace Shawn qui excelle dans la peau de ce personnage Allenien par excellence.
Ce Woody Allen, qui a tout l’air de se poser comme son avant-dernier film, est donc un petit cru tout ce qu’il peut y avoir de sympathique. S’il sent quelque peu le déjà vu chez le réalisateur avec ces idées de couples sur la fin, il arrive aussi à se faire original lorsqu’il parle de cinéma et qu’il s’amuse joyeusement à se lancer dans des reconstitutions hommages qu’on n’avait pas vu venir. Bien mieux que « Un jour de pluie à New York« , sans pour autant s’imposer comme un essentiel de Woody Allen, ce « Rifkin’s Festival » sait se faire plaisant, donc si jamais l’occasion se présente, pourquoi pas se laisser tenter…
Note : 12/20
Par Cinéted