avril 26, 2024

La Ruse – Ou Comment Tromper Hitler

Titre Original : Operation Mincemeat

De : John Madden

Avec Colin Firth, Matthew Macfadyen, Kelly Macdonald, Penelope Wilton

Année : 2022

Pays : Angleterre

Genre : Guerre, Drame

Résumé :

1943. Les Alliés sont résolus à briser la mainmise d’Hitler sur l’Europe occupée et envisagent un débarquement en Sicile. Mais ils se retrouvent face à un défi inextricable car il s’agit de protéger les troupes contre un massacre quasi assuré. Deux brillants officiers du renseignement britannique, Ewen Montagu et Charles Cholmondeley, sont chargés de mettre au point la plus improbable – et ingénieuse – propagande de guerre… qui s’appuie sur l’existence du cadavre d’un agent secret !

Avis :

Réalisateur britannique, John Madden est un cinéaste qui s’aventure dans bien des genres. Homme de théâtre, il fait ses débuts en tant que réalisateur au cours des années 80, notamment pour la télévision anglaise. Son premier long-métrage date de 1993, mais c’est surtout en 1999 avec « Shakespeare in Love » que le metteur décolle. Depuis, John Madden nous a réalisé « L’Affaire Rachel Singer« , « Killshot« , la « saga » des « Indian Palace« , ou encore « Miss Sloane« , qui était son dernier film en date.

Le dernier film en date de John Madden parlait de ruse dans les coulisses de la politique de Washington, et après cinq ans d’absence, le cinéaste revient avec un nouveau film dont la ruse et la manipulation est encore une fois le sujet principal. Adaptant à l’écran l’une des missions les plus impressionnantes de la Seconde Guerre mondiale, « La ruse » se pose comme une petite bombe qui démontre encore une fois le très joli talent de metteur en scène de John Madden. Tendu, alors même qu’on en connaît le dénouement, passionnant dans sa plongée et son immersion au beau milieu du monde de l’espionnage en pleine guerre mondiale, « La ruse » montre les coulisses d’une stratégie osée, qui consiste à berner l’ennemi dans l’espoir que celui-ci ne le berne pas à son tour. Bref, manipulation, construction d’histoire, espionnage, et contre-espionnage, infiltration, espoir, et attente vont être au cœur du nouveau Madden et c’est tout simplement très bon !

Mars 1943, l’Europe est à feu et à sang et les alliés doivent débarquer. Dans la défense d’Hitler, la Sicile a tout l’air d’être son maillon faible, et les alliés y voient une possibilité de débarquer sur les plages afin de commencer la libération. Hitler imagine bien un débarquement sur l’île, et même si cette dernière peut être un maillon faible, il pose des troupes pour la défendre. À Londres, on commence à imaginer un plan qui induirait alors le Führer en erreur. Ce plan ? Lui faire croire que le débarquement des Anglais se fera en Grèce, pour qu’il envoie ses troupes sur place et laisse la Sicile libre d’accès. Un plan complexe qui sollicite une mise en œuvre où le moindre détail compte…

La Seconde Guerre mondiale fut le témoin de tout un tas d’opérations et elle se trouve alors être une source inépuisable pour le cinéma. Cette ruse très connue et les événements qui en ont découlé a déjà été porté à l’écran en 1956 par Ronald Neame avec son « … homme qui n’a jamais existé« . Soixante-cinq ans plus tard, c’est donc le britannique John Madden qui se lance à son tour dans la mise en scène de ce plan assez fou qui visait à berner Hitler.

Passionnant à plus d’un titre, « La ruse » est un film qui est en plus d’être un très beau devoir de mémoire, nous entraîne avec intrigue dans un plan assez dingue, et comme je le disais, même si l’on en connaît la finalité, John Madden, à force d’intrigue et de détail, arrivera à nous accrocher et à nous entraîner totalement dans cette ruse. La principale qualité de ce film, c’est son écriture et la richesse de celle-ci qui nous transporte au plus près de l’élaboration de ce plan. « La ruse« , c’est aussi bien une plongée dans le milieu de l’espionnage en pleine Seconde Guerre mondiale, qu’un film qui construit une histoire au sein même de son propre film. L’idée de cette ruse, c’est envoyer un faux cadavre bardé de fausses informations pour que les Allemands croient tenir des informations confidentielles qui pourraient les faire gagner des batailles.

Or, balancer un faux cadavre, même en temps de guerre, n’est pas la plus simple des choses, et c’est là que le film de John Madden se fait passionnant. Et oui, pour que cette ruse soit crédible, il faut tout inventer et créer le maximum de détails. Ainsi, ces espions britanniques se transforment en quelque sorte en scénaristes, qui vont devoir imaginer le moindre élément qui pourrait être crédible et surtout vérifiable par l’ennemi. Puis derrière ce très riche sujet, John Madden livre un film d’espionnage prenant, car dans une plus ou moins grande mesure, tous les personnages doutent et tous finissent par se surveiller, s’espionnant les uns les autres, ce qui renforce la tension du film.

Puis derrière ça encore, le film ruse aussi dans le camp ennemi, avec ce sentiment, voire cette paranoïa légitime, à savoir toute information qui vient de l’Allemagne était-elle vraie ? Où était-ce une ruse pour berner les alliés ? John Madden tient donc son intrigue d’une main de maître et nous immerge dans chaque étape de ce plan, de la recherche du cadavre qui servira à berner tout le monde, à la simple écriture d’une lettre d’amour où chaque mot compte, ou encore l’envoi de ce cadavre vers sa dernière destination.

Bref, c’est excellent et passionnant tout le temps. Et ces bons points ne s’arrêtent pas là, puisque Madden livre un film soigné où sa mise en scène fonctionne parfaitement. Sombre et teinté de petites touches d’humour ou de tendresse, le réalisateur, comme je le disais, tient parfaitement sa tension et une fois lancé, son film résonne comme une machine de guerre qui ne s’arrête pas. On ajoutera à cela que Thomas Newman a encore une fois fait un très beau travail dans la composition des notes qui accompagnent cette histoire et Sebastian Blenkov (qui avait déjà éclairé « Miss Sloane« ) livre une photo sublime, notamment dans toutes les virées nocturnes que le film nous réserve.

Pour ce film, John Madden est de retour en Angleterre et le metteur en scène s’est parfaitement entouré avec un cast so British absolument fabuleux. Tenu par un duo génial, Colin Firth et Matthew MacFadyen, on trouvera aussi les impeccables Kelly Macdonald et Penelope Wilton (à travers elle, le film aborde la place des femmes dans l’espionnage à cette période-là, d’ailleurs derrière elle aussi, le film parle de la place des femmes dans le MI5). On trouvera aussi un Jason Isaacs terrible en chef des renseignements glaçant comme la mort. Ce film nous apprendra aussi la place d’un certain Ian Fleming (papa de « James Bond ») dans cette histoire. Un Ian Fleming incarné par le trop méconnu Johnny Flynn.

Ce retour de John Madden en Angleterre et dans nos salles de cinéma est donc une belle réussite. Historiquement passionnant de bout en bout, tenu, tendu, sombre, romancé sans trop l’être non plus, « La ruse » est une très belle plongée dans le monde l’espionnage, et il se fait encore plus prenant de par l’époque dans laquelle il se déroule, ainsi que de par son plan gigantesque, très osé, pour ne pas dire complètement fou. Très belle surprise, doublée d’un sacré coup de cœur, j’ai même envie de dire que cette « … ruse » trouve sa place parmi les meilleurs films de son réalisateur !

Note : 17/20

Par Cinéted

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