avril 25, 2024
BD

Vikings dans la Brume – Canard et Rocher

Auteurs : Wilfrid Lupano et Ohazar

Editeur : Dargaud

Genre : Comédie, Aventure

Résumé :

Nos Vikings sont confrontés à l’évolution rapide du monde chrétien, qui se structure, se répand, et complique considérablement le bon déroulement des pillages. À la tête de sa bande de redoutables guerriers, le chef Reidolf est bien obligé de constater que ce mode de vie basé sur la prédation vit ses derniers instants… Mais comment changer quand on a toujours vécu ainsi ? Comment sortir de la brume… ?

Avis :

Il n’est pas étonnant, quand lit quelques lignes sur la vie de Wilfrid Lupano, de voir qu’il est très influencé par la pratique du jeu de rôle. Ces récits sont souvent empreints d’un humour assez fin que l’on retrouve dans les dialogues et dans des situations parfois cocasses. Après avoir fait un coup de maître avec La Bibliomule de Cordoue et son savant message sur la sacralité des livres et de la passation du savoir, le scénariste revient sur le devant de la scène avec Ohazar (qui n’est autre que son frère) pour nous raconter la routine des vikings. A travers une BD qui utilise les strips pour narrer une histoire complète, on va retrouver tout ce qui fait le sel de Wilfrid Lupano, à savoir un humour à la fois intelligent et barré, mais aussi un message de fond important et bien amené.

Ici, on va suivre le chef Reidolf qui part avec son fils et ses compagnons faire quelques raids pour ramener de la richesse à son clan. Manque de bol, le drakkar va rapidement se prendre un rocher, et tout l’équipage va rester bloqué sur une île sans rien dessus. Mais lorsque la brume se dissipe, les vikings découvrent un village chrétien à piller. Ils s’acoquinent alors avec un autre groupe de vikings pour faire une razzia. Mais les choses ne vont pas se passer comme prévu.

Ainsi donc, les frères Lupano ont décidé de nous raconter quelques anecdotes autour des vikings sur une histoire simple et relativement stupide. Il faut dire que dès le début, le ton est donné, avec les femmes qui disent au revoir à leurs maris, avant de repartir dans leurs pénates, soulagées de ne plus avoir leur mari dans les pattes. Le cynisme prend alors rapidement place et on va se retrouver avec des moments assez drôles et banals, comme lorsque les femmes rangent les maisons, et cachent les collections ramenées par leur époux, comme des casques, des crânes, ou encore des vases antiques dont elles se fichent éperdument. Malgré le fait que l’on parle de raids vikings, on est tout de même assez proche de notre monde, avec les hommes qui ne comprennent pas forcément ce que veulent et inversement. C’est assez malin et c’est marrant dans cette simplicité.

Divisée en plusieurs livres qui sont autant de chapitres, la BD va ensuite s’intéresser au raid, qui va prendre du temps pour se faire. Il faut dire que les vikings sont une belle bande de bras cassés et au premier obstacle, ils vont se retrouver bloqués sur un rocher. Ici, on va découvrir le chef du clan, qui veut éduquer son fils, qui ne semble pas taillé pour la bagarre. Les choses se confirment quand ce dernier ne comprend pas vraiment toute cette violence et n’arrive pas à mettre le feu à des huttes, ou encore à tuer qui que ce soit. Un schéma père/fils se dessine, mais le duo a le talent de ne pas tout miser sur cette relation, qui a déjà été vue maintes fois. Ici, on aura droit du comique de situation, du burlesque, et même des running gags, dont un sur un canard qui est à mourir de rire.

Pour s’éloigner du simple schéma narratif père/fils en conflit, on va suivre une grande histoire qui prend place dans la succession des strips. Ici, on va voir que Reidolf n’est pas très intelligent, qu’il se fait manipuler par un autre chef de clan plus malin et plus pervers, mais que malgré la scoumoune qui semble poursuivre nos héros, il y a toujours une justice, plus ou moins divine. D’ailleurs, le choix de ne pas attaquer les églises afin de répondre à une demande explicite de la femme du chef pourrait presque se voir comme un tournant de la chance, lorsque Reidolf se retrouve finalement « victorieux ». Tout ça grâce à un pâté mal digéré. Oui, niveau humour, on brasse tous les styles, et ça va très loin dans les blagues improbables.

Pour autant, l’humour n’est pas lourd, et si ça ne marche pas tout le temps, la BD se rattrape sur des moments simples et très efficaces. Il suffit de voir ces deux pêcheurs de coquillages dire vouloir rentrer avant de chopper la mort à cause du froid, et qu’en levant la tête, ils découvrent les vikings se ruer sur eux, et l’un des deux pêcheurs de dire, avec philosophie, « trop tard ». La BD joue sur un fin équilibre et arrive à retomber sur ses pattes quasiment à chaque fois. Il faut dire aussi que le trait de Ohazar est relativement plaisant et sied à merveille au ton employé. Parfois, on n’est pas loin du dessin de presse, mais ça marche à fond les ballons et on se plait à voir les expressions parfois loufoques des personnages.

Au final, Vikings dans la Brume est une BD fort recommandable, notamment pour tous les fans de guerriers aux bras cassés et de blagues plus ou moins vaseuses. Le portrait de ces loosers magnifiques et à la fois drôle et tendre, avec une pointe d’absurde et quelques éléments historiques bien vus. Sans être un monument comme peut l’être (à mon sens) La Bibliomule de Cordoue, Vikings dans la Brume peut se percevoir comme un bonbon acidulé avec lequel on prend un sacré plaisir de lecture.

Note : 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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