avril 19, 2024

Bruno Reidal – Confession d’un Meurtrier – Film Choc

De : Vincent Le Port

Avec Dimitri Doré, Jean-Luc Vincent, Roman Villedieu, Alex Fanguin

Année : 2022

Pays : France

Genre : Drame, Historique

Résumé :

1er septembre 1905. Un séminariste de 17 ans est arrêté pour le meurtre d’un enfant de 12 ans. Pour comprendre son geste, des médecins lui demandent de relater sa vie depuis son enfance jusqu’au jour du crime. D’après l’histoire vraie de Bruno Reidal, jeune paysan du Cantal qui, toute sa vie, lutta contre ses pulsions meurtrières.

Avis :

« Bruno Reidal, confession d’un meurtrier » est le premier long-métrage de Vincent Le Port, un jeune metteur en scène de trente-cinq ans, natif de la Bretagne. Après plusieurs courts-métrages au cours des années 2000, Vincent Le Port monte sur Paris pour faire la célèbre école de la Fémis, dont il sortira diplômé en réalisation. Par la suite, en 2012, il cofonde Stank, un collectif d’auteurs-réalisateurs au sein duquel il va réaliser tous ses courts. Et des courts, ou même des moyens métrages, il va y en avoir, puisqu’entre 2012 et ce premier long, Vincent Le Port va réaliser pas moins de sept films, dont « Le gouffre« , réalisé en 2016, qui lui vaudra de recevoir le Prix Jean Vigo.

C’est en 2011 que Vincent Le Port découvre l’histoire de Bruno Reidal, un adolescent de dix-sept ans qui vécut au début du siècle dernier. Cet adolescent, pieux et bon élève, avait alors tué et décapité un enfant de douze avant de se livrer aux autorités. Après moult recherches, il aura fallu cinq ans à Vincent Le Port pour écrire le scénario de ce premier film et autant le dire d’emblée, avec « Bruno Reidal … » et ses confessions, le metteur en scène breton fait une entrée très remarquée dans le paysage du cinéma français, en nous entrainant sans détour dans la tête d’un jeune tueur. Dérangeant au possible, explicite, cru, cruel et complexe, le portrait sans détour que nous « offre-là » Vincent Le Port fascine, autant qu’il fait froid le dos. Il en résultera un film passionnant, qui n’a pas fini de s’imprégner en nous après une séance de cinéma marquante en tout point.

01 Septembre 1905, Bruno Reidal, dix-sept ans, vient se livrer de lui-même à la gendarmerie de sa petite ville. Quelques heures plutôt, le jeune homme vient de tuer un jeune garçon de douze ans. En prison, pour tenter de comprendre son geste, le professeur et docteur Alexandre Lacassagne lui demande d’écrire ses mémoires et de tout lui raconter depuis son enfance, jusqu’à cette journée du 01 Septembre, où après avoir poignardé un jeune garçon, Bruno lui a coupé la tête. Au travers de ses écrits, le professeur va découvrir un jeune homme trouble, troublé et surtout fasciné par l’idée de tuer.

Très mal distribué, le premier film de Vincent Le Port est pourtant une petite bombe qui ne laissera personne indifférent. Pour sa première œuvre, le jeune réalisateur a choisi de s’intéresser à un jeune meurtrier qui a de quoi faire couler beaucoup d’encre. Film sombre, dur, âpre, violent, et psychologiquement torturé, cette séance de cinéma ne va pas être simple, car Vincent Le Port nous entraîne dans les tréfonds de l’âme d’un jeune homme qui n’attend qu’une seule chose, tuer pour jouir. Tiré d’un fait réel, basé sur les écrits du jeune meurtrier, « Bruno Reidal, confession d’un meurtrier » est un film très dérangeant et en même temps totalement fascinant et passionnant.

Doté d’un scénario bluffant, c’est au travers des écrits montés dans des flashbacks très bien employés que Vincent Le Port va peu à peu dessiner son futur tueur. Le personnage de Bruno Reidal est captivant, car il est la somme de toutes ses contradictions, de ses frustrations et son milieu social. Très bon élève, jalousant ceux qui y arrivent mieux, ce qui le poussera à être le meilleur tout en haïssant ses camarades sans jamais leur montrer. Le jeune homme est intelligent et à force d’étude, il est très au-dessus de la moyenne des autres membres de sa famille. Une famille trop grande et trop dysfonctionnelle, où il y a peu de place à l’amour et aux sentiments. Bref, le portrait que dresse au fil des scènes Vincent Le Port est sûrement celui qui sera le plus complexe de cette année de cinéma, le plus lourd, le plus dur, le plus triste, le plus effroyable et en même temps le plus passionnant.

Le jeune homme fait aussi un blocage sur le sexe, et ses désirs, notamment solitaires, qui signifient le péché, un péché qu’il ne cesse encore et encore de reproduire, sans pouvoir s’en empêcher. Je pense même que plusieurs visionnages sont nécessaires pour être sûr d’avoir vraiment cerné ce jeune Bruno Reidal.

À cette longue introspection s’ajoute une mise en scène très crue de la part de Vincent Le Port qui pour une première œuvre, met la barre très haute. Sans fioriture, allant toujours à l’essentiel pour illustrer le récit et la vie de son personnage, le jeune metteur en scène fait sec et brutal, au point que son film se fait en permanence dérangeant et s’aventure même dans le choc, lorsqu’arrivera ce moment tant redouté où cet adolescent va basculer et se laisser aller à ses pulsions meurtrières. Âme sensible, s’abstenir… Vraiment !

Pour incarner ce jeune tueur, Vincent Le Port a fait appel à trois comédiens pour l’incarner dans différents âges, et si les deux plus petits, Alex Fanguin et Roman Villedieu, sont excellents, c’est bien Dimitri Doré, qui incarne le personnage de quinze à dix-sept ans, qui crève l’écran. C’est à lui que revient la partie psychologique la plus complexe et intense et l’acteur livre là une performance de haute volée, arrivant à faire qu’on peut s’attacher à ce personnage purement et simplement immonde.

« Bruno Reidal, confession d’un meurtrier » est donc un film poignant et percutant. Il est l’une de ces séances qui ne laisse pas indifférent et dont on ne ressort pas vraiment indemne. Dérangeant, perturbant, passionnant et immonde, j’aurais presque honte d’avoir autant apprécié ce portrait. Vincent Le Port livre là un premier film fou, qui laisse présager un auteur radical, qui a l’envie d’offrir un autre genre de cinéma et ça fait du bien, même s’il reste un film à ne pas mettre sous tous les yeux.

Note : 16,5/20

Par Cinéted

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