De : Christian Bisceglia et Ascanio Malgarini
Avec Henry Douthwaite, Katia Greco, Rosie Fellner, Zoe Nochi
Année : 2019
Pays : Italie
Genre : Horreur
Résumé :
Peter était un enfant cruel, aimant torturer humains et animaux. Cent plus tard, son esprit malveillant semble toujours présent…
Avis :
Il fut un temps où l’Italie était une terre sainte pour les films d’horreur. Durant les années 70, Mario Bava régnait en maître, et il avait derrière lui toute une flopée de cinéastes prometteurs, dont Dario Argento. Malheureusement, cet âge d’or est révolu depuis bien longtemps, et l’Italie fait plutôt grise mine en ce qui concerne l’horreur. Pour preuve, certains films n’arrivent même pas jusqu’à chez nous, comme ce Cruel Peter, réalisé par deux inconnus, et qui tente de tisser des ponts entre l’Angleterre et le pays latin. Plongeant à corps perdu dans le film de fantôme trouvant des résurgences dans le passé, Cruel Peter s’enfonce inexorablement vers le tout-venant d’épouvante, n’arrivant jamais à donner corps à une intrigue cousue de fils blancs et à des effets horrifiques éculés. Ce n’est clairement pas avec ce film que l’on va avoir droit à un revival de l’horreur à l’italienne.
Sale gosse
Le film débute en 1908 dans une riche demeure italienne. On nous présente alors un jeune garçon, Peter, qui se fait un régale de martyriser tout le monde. Il défigure une cuisinière avec un couteau, il harcèle les enfants des employés de maison, et il s’amuse même à enterrer vivant des animaux. Bref, une ordure qui est surprotégé par sa mère, une marâtre qui garde constamment le visage voilé. Un beau jour, les enfants se vengent et enterrent vivant Peter qui finira sa vie dans un cercueil suite à un tremblement de terre. Cent ans plus tard, un archéologue britannique est envoyé sur les lieux car on a retrouvé le cercueil de l’enfant, relançant des recherches historiques. Il se déplace alors avec sa fille muette, qui tente de discuter avec sa défunte mère en utilisant toutes les méthodes ésotériques possibles. On se doute bien de ce qui va arriver.
On aurait pu croire qu’avec un petit peu d’histoire, Cruel Peter allait sortir des carcans du genre, mais non, il restera un film oubliable et tout à fait banal. Au niveau du scénario, on reste dans quelque chose de simple, où la jeune fille muette va rentrer en contact avec le fantôme du garçon, et elle va commencer à se faire harceler par des esprits maléfiques. Les tensions vont alors naître avec son père qui ne se sent pas à l’aise sur ces recherches. Cette tension ne sert pas à grand-chose, si ce n’est à rendre les personnages encore plus pénibles qu’ils ne le sont. Mais ce sera un peu tout ce qu’il aura à se mettre sous la dent. Le film est très pauvre dans ce qu’il raconte et dans ce qu’il décrit. Le deuil est à peine effleuré et les quelques twists ne tiendront pas vraiment la route.
C’est beau mais c’est lent
Dans ce film, on sent toute la bonne volonté des deux réalisateurs qui veulent soigner leur image. En ce sens, Cruel Peter est très joli à regarder. La photographie est très chouette, et les cadres utilisent parfaitement les décors de la Sicile, et notamment cette vieille demeure qui ne fait pas très accueillante. On regrettera cependant des éléments qui font presque amateur, comme cette satanée nuit américaine pour faire croire qu’il fait nuit. Mais hormis cela, il y a quelques bonnes idées visuelles dans cet ensemble. Le coup de la boule lumineuse que l’on doit tourner pour communiquer avec les esprits est très sympa et rajoute même une touche un peu inquiétante, permettant de jouer avec les lumières. Et certains effets sont bien fichus, comme cette femme au cou tranché, par exemple. D’un point de vue visuel, technique, c’est plutôt pas mal.
Mais cela n’est qu’un détail dans la foultitude de défauts que possède le film. Si le scénario est bancal, c’est que les personnages ne font pas le poids. Le coup du père qui a du mal à faire le deuil est à peine esquissé, et le type est assez lisse. Sa fille, qui a un handicap des suites d’un accident, est, elle aussi, pénible. Elle est très égocentrique et ne semble pas vouloir faire d’effort pour accepter la disparition de sa mère. La relation qu’elle entretient avec son père est lourde et pèse sur l’ambiance du film. On serait presque content qu’elle se fasse posséder une bonne fois pour toute. Au rayon des personnages secondaires, on ne trouvera pas grand-monde, si ce n’est une archéologue italienne dont la mère verse dans l’ésotérisme et voit que quelque chose cloche. Bref, tout cela reste très maigre.
Rajoutons des sorcières
Le film aurait pu jouer sur un autre atout que son visuel, celui des sorcières et des légendes siciliennes. L’apparition de la marâtre dès le départ était assez intéressante, créant un flou entre Peter et sa mère. Les deux personnages sont antipathiques, et on ne sait pas vraiment qui est à l’origine de ce qui s’est passé. Le film installe quelques éléments qui vont dans ce sens avec une grand-mère qui fait des incantations protectrices, mais encore une fois, on ne reste qu’en surface, et ça ne dure que l’instant d’une scène. La sorcière maléfique est aussi un fait étrange, avec des éléments difficilement compréhensibles, ce qui tend à rendre l’histoire pénible et finalement sans intérêt. Rajoutons à cela un rythme lénifiant et la boucle est bouclée.
Au final, Cruel Peter est un énième film d’épouvante sur une possession qui tourne mal, avec comme point d’appui, la Sicile des années 1900. Manque de bol, si visuellement le film est propre, ce sera une autre paire de manches pour son scénario et ses effets de peur. Bardé de jumpscare téléphonés et d’apparitions neurasthéniques, le film ne tient pas la route une seconde avec son histoire nébuleuse et sa sorcière qui se réincarne (ou pas). C’est dommage, car les deux réalisateurs ont trouvé un cadre idéal pour susciter de la peur, mais ce sera seulement l’ennui qui prévaudra.
Note : 06/20
Par AqME