mars 29, 2024

Contes d’Ecryme – Mathieu Gaborit

Auteur : Mathieu Gaborit

Editeur : Mnémos

Genre : Steampunk

Résumé :

Entourant Mathieu Gaborit, l’un des écrivains les plus importants de l’imaginaire francophone, la fine fleur des littératures de genre et de jeunes auteurs talentueux ont exploré l’extraordinaire monde de Bohème afin de nous régaler, nous effrayer et nous faire rêver avec ces douze contes et légendes de l’écryme.

Avis :

Bien plus qu’un genre, le steampunk est un courant culturel qui permet de s’immerger dans des univers baroques, voire incongrus, eu égard à une tonalité humoristique plus ou moins appuyée. Alors que la littérature anglo-saxonne dépeint ses premiers atours avec les œuvres de Tim Powers, James Blaylock ou K.W. Jeter, il faut attendre la décennie suivante pour que le steampunk suscite l’intérêt dans l’hexagone. On songe à des écrivains tels que Johan Heliot, Fabrice Colin, Serge Brussolo ou, en l’occurrence, Mathieu Gaborit. Entre deux histoires de fantasy, l’artiste s’est distingué par son jeu de rôle Ecryme qui, lui-même, a donné lieu au diptyque Bohème.

À l’occasion de la réédition du jeu de rôle, Mnemos a réuni une douzaine d’auteurs pour rendre hommage aux empires et nations de la Toile. Ce n’est pas tant les velléités nostalgiques que la volonté d’explorer plus en avant un univers particulièrement riche et foisonnant de surprises. Sur ce seul constat, cet ouvrage retranscrit parfaitement cette profondeur sous-jacente, cette complexité qui donne corps à ce royaume imaginaire qui tient autant de l’uchronie que de la fantasy. Mais n’est-ce pas l’une des formidables possibilités qu’offre le steampunk ? Amalgamer diverses influences, des plus saugrenues aux plus réalistes, en vue de dépeindre une atmosphère si particulière.

Au sortir du plaisir non dissimulé à retrouver le monde de Bohème pour le lecteur des Rives d’Antipolie et Revolutsyia se pose la question si le présent recueil s’adresse aussi aux personnes qui ne connaissent pas ces deux romans. Dans les intentions, pourquoi pas. La préface et le glossaire permettent d’acquérir rapidement les bases, même si cela ne remplace pas une découverte en bonne et due forme des précédents ouvrages. En dépit de certains termes, de tensions géopolitiques et de castes sociales, il est donc tout à fait possible d’appréhender Contes d’Ecryme en tant que nouveau venu. Cependant, il faut considérer d’autres obstacles et maladresses avant de s’y atteler.

D’à peine 250 pages, Contes d’Ecryme réunit douze écrivains pour 19 nouvelles. Autrement dit, chaque histoire excède rarement la dizaine de pages. On a même droit à des incursions de deux à trois pages. Dans ces conditions, il incombe à l’auteur d’entrer dans le vif du sujet sans préambule. Ce qui n’est pas forcément systématique. Ce n’est pas tant le style qui s’avère inégal au gré des récits, mais plutôt l’intérêt que l’on porte aux intrigues respectives. Si celles-ci ont pour objectif de dépeindre une facette évoquée ou approfondie dans Bohème, les spécificités prises dans leur individualité n’ont pas le même impact.

Hormis la géographie des lieux, les créatures et l’ordre établi dans la société, on ne distingue aucun fil rouge entre les nouvelles. En d’autres circonstances, cela ne prêterait pas à conséquence, mais pour des incursions dans un univers commun, on pourrait s’attendre à un rapprochement pour gagner en cohérence. Ici, on a surtout l’impression de se confronter à des tranches de vie et des témoignages qui rendent compte d’un évènement particulier, comme un crime. Pour rappel, tout cela s’enchaîne sur une moyenne de dix pages par histoire. Autrement dit, il s’agit surtout de « séquences » qui occultent tout sentiment d’immersion.

Au final, Contes d’Ecryme est un recueil de nouvelles dispensable. Les amateurs de Bohème risquent d’être frustrés face à de simples évocations pour un univers d’une grande richesse, tandis que les lecteurs non familiers de Mathieu Gaborit ne peuvent en saisir toute la teneur avec un simple aperçu. En cause, des histoires beaucoup trop courtes qui s’enchaînent sans marquer les esprits. À peine l’action fût-elle posée ou décrite que le dénouement survient de manière abrupte. Ce qui rend la découverte de l’ouvrage laborieuse, tant le rythme se veut saccadé alors qu’il demeure primordial dans l’exercice de la nouvelle. Si le travail d’écriture reste honnête, voire talentueux dans le style de certains auteurs, le fonds de ces dernières est trop conventionnel pour rendre honneur à la singularité du steampunk.

Note : 09/20

Par Dante

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