De : Leos Carax
Avec Adam Sandler, Marion Cotillard, Simon Helberg, Devyn McDowell
Année : 2021
Pays : France, Etats-Unis, Mexique, Suisse, Belgique, Allemagne, Japon
Genre : Comédie Musicale, Romance, Drame
Résumé :
Los Angeles, de nos jours. Henry est un comédien de stand-up à l’humour féroce. Ann, une cantatrice de renommée internationale. Ensemble, sous le feu des projecteurs, ils forment un couple épanoui et glamour. La naissance de leur premier enfant, Annette, une fillette mystérieuse au destin exceptionnel, va bouleverser leur vie.
Avis :
Dans le paysage du cinéma français, Leos Carax est un ovni depuis une quarantaine d’années. Cinéaste aussi remarquable qu’il est rare, sa filmographie se compose aujourd’hui de six films seulement. Il débute dans les années 80, il explose au début des années 90, avec notamment « Les amants du pont-neuf« , qui fut à l’époque le film le plus cher de l’histoire du cinéma. Puis, il va faire une pause d’un peu plus d’une dizaine d’années, avant de revenir en 2012 avec « Holy Motors« , film terriblement étrange et fascinant en même temps, qui a redoutablement bousculé son année de cinéma.
On n’avait plus vraiment de nouvelles de Leos Carax depuis neuf ans, même si l’on savait qu’il était reparti en tournage ces dernières années. Puis, il y a deux mois de cela, Leos Carax dévoile une bande-annonce absolument divine. Démesurée, magnifique, intense, « Annette » est un film aussi beau qu’il laisse dubitatif, tant ce nouveau Carax oscille entre le génial, le moins beau, le fascinant et l’ennuyant. Très belle proposition de cinéma, « Annette » en laissera cependant plusieurs sur le bas-côté et moi-même, deux jours après mon visionnage, je reste partagé face à un film qui nous sort radicalement de notre zone de confort.
Los Angeles, Henry est un comédien qui fait un stand-up. Henry est en couple avec Ann, une cantatrice dont il est fou amoureux. Le couple a ses hauts et ses bas, et de leur amour va naître Annette, une petite fille fascinante. L’arrivée de cet enfant au sein de leur couple va alors tout bouleverser.
Chaque film de Leos Carax est une expérience de cinéma et « Annette » n’échappera pas à cette règle. On peut même dire que dans son idée et son envie, « Annette » est sûrement l’une des expériences les plus radicales de son réalisateur.
Pour son sixième film, Leos Carax se lance dans une comédie musicale. Le musical avait déjà jalonné la carrière du metteur en scène français et il est presque logique qu’il finisse par y venir. Et rien que l’idée de voir une comédie musicale par Leos Carax, surtout une idée et une BO des Sparks, franchement, on en salivait d’avance.
Comme je le disais, « Annette » est un film duquel on ressort assez partagé. « Annette« , c’est un film où il y a de l’extraordinaire, mais aussi du « casse pied ». « Annette« , c’est un film démesuré, qui captive, qui happe, voire même qui nous submerge, face à tant d’éléments et d’idées de mise en scène qui démontrent bien que Leos Carax est un immense réalisateur. Mais face à cela, « Annette » est aussi film qui est si radical et tellement centré dans son « ambiance », pour ne pas dire vulgairement son délire, qu’il se pose aussi comme un film loin d’être facile et surtout un film devant lequel on peut vite s’ennuyer, voire plus.
Ainsi, du côté des merveilles que peut offrir le film de Leos Carax, il y a son intrigue, qui derrière tout le surplus musical et l’ambiance, tient une très belle histoire. L’histoire d’un amour qui va se faire grignoter par la jalousie et les ambitions. Sur ses grandes lignes, « Annette » est un film assez simple et touchant. C’est un film qui nous entraînera aussi vers un final d’une grande tristesse, qui encore une fois démontrera l’immense talent d’Adam Driver.
Toujours du côté de ses merveilles, visuellement parlant, le film est incroyable. « Annette » déborde d’idées à tous les instants et plus d’une séquence nous laisse K.O. C’est bien simple, « Annette » est parcouru de grandes scènes de cinéma. La direction artistique est affolante, la photographie est à tomber par terre, le côté kitsch est parfaitement assumé, et puis il y a cette BO, superbe de bout en bout (et là, je ne parle que du côté musical qui accompagne le film). Une BO assurée par les Sparks, et c’est tout bonnement enivrant.
Enfin, dernière merveille, ses comédiens qui sont très bons dans les rôles et dans ce que Leos Carax leur demeure de faire. « Annette« , c’est donc un immense Adam Driver, et une Marion Cotillard étonnante. Le couple de cinéma est beau et glamour. On notera aussi un excellent Simon Helberg en compositeur (d’ailleurs, l’une des scènes où il compose justement est incroyable).
Mais voilà, si « Annette » est bourré d’idées folles, de trouvailles et de merveilles, c’est aussi un film qui laissera dubitatif sur beaucoup de ses points. Le premier, celui qui va directement venir en tête, malgré des comédiens excellents et une très belle BO, ce qui abîme la fête, si l’on peut dire, c’est son côté comédie musicale qui est souvent trop lourd. Clairement, ça chante de trop, et même si visuellement ça en envoie et que techniquement, c’est incroyable, puisque Leos Carax a demandé à ses acteurs de tout faire en live, on doit bien dire qu’il y a trop de chansons, et qu’à force, ça finit par être épuisant. Le film fait quand même deux heures vingt et clairement, on les sent passer.
Derrière ça, « Annette » est aussi un film qui a du mal à se lancer, et même si son intrigue, dans ses grandes lignes, demeure assez simple, le film en lui-même n’est pas toujours clair. On a du mal à voir où Leos Carax veut en venir et d’ailleurs, on quitte « Annette » avec une déception, car on n’est pas sûr d’avoir compris ce dont Leos Carax voulait nous parler. Certes, l’histoire d’amour est tragique, mais au-delà de ça, il y a quoi ? Pourquoi cet opéra de deux heures vingt, qui se complique tant l’intrigue, pour finalement être très simple dans son histoire ? D’ailleurs, nous vient une deuxième interrogation, pourquoi ce visuel pour la petite Annette ? S’il y a un côté conte de fée qui se dégage de l’ensemble, il y a aussi quelque chose de très dérangeant qui s’échappe de l’ensemble et l’on a bien du mal à comprendre les choix du réalisateur. D’ailleurs, ces choix bien souvent nous sortent plus de son film qu’ils ne nous emportent.
« Annette » est donc une proposition de cinéma osée. Une proposition folle, démesurée, et qui est parcouru d’envolées. Aussi génial qu’ennuyant, aussi déroutant que bluffant, ce nouveau film de Leos Carax conjugue parfaitement beaucoup de sentiments contraires et si le choc est là, si visuellement parlant on en prend plein les yeux et les oreilles, il demeure que « Annette« , à plus d’une reprise, nous a laissé sur le bas-côté. Il y a toujours quelque chose pour nous récupérer, mais sur l’ensemble, on reste partagé. Peut-être qu’un second visionnage permettrait de savourer bien plus l’œuvre, car l’ensemble est si riche qu’il nous demande beaucoup la première fois, mais encore faut-il avoir envie de s’y arrêter de nouveau, et là, comme ça, si l’envie est bien là, on se dit aussi que ce n’est pas pour tout de suite.
Note : 11/20
Par Cinéted