Titre Original : Bordello of Blood
De : Gilbert Adler
Avec Dennis Miller, Angie Everhart, Erika Eleniak, Chris Sarandon
Année : 1996
Pays : Etats-Unis
Genre : Horreur, Comédie
Résumé :
La vampire séductrice Lilith a été ressuscitée afin d’officier en qualité de tenancière de la maison close Bordello of Blood. Opérant avec son armée d’insatiables consœurs, elle fait vivre à d’insouciants clients une terrifiante expérience. Mais la disparition d’un client et les recherches qu’elle engendre menacent soudain leurs activités…
Avis :
Parangon des petits films à sketches mélangeant comédie et horreur, Les Contes de la Crypte fait partie de ces gros plaisirs d’amateurs d’horreur. Et on comprend aisément pourquoi. Des épisodes courts et efficaces, avec du gore artisanal et un humour graveleux qui fait mouche à chaque fois, il y a de quoi devenir culte. Ce que l’on a tendance à oublier, c’est que Les Contes de la Crypte, c’est aussi deux films. Demon Knight et Bordello of Blood (La Reine des Vampires chez nous), qui ont fait les beaux jours des vidéo-clubs et des fans. Disponible depuis quelque temps sur Netflix, l’occasion était trop belle pour ne pas succomber aux charmes fous de Lilith et de son bordel de vampires, et de se rendre compte que tout cela a beau avoir plus de vingt ans, c’est toujours aussi bien.
Du cul et du sang
Le scénario de La Reine des Vampires ne va pas chercher bien loin. L’introduction montre un nain explorateur qui va ressusciter Lilith, la reine des vampires. Après un interlude chez le gardien de la crypte, on se retrouve aux States, chez un frère et une sœur qui ne s’entendent pas. Rebelle et sans limite, le frère part boire un coup avec ses camarades et se retrouve dans un bordel où il va disparaître, puisque les prostituées sont des vampires assoiffées. De son côté, la sœur travaille pour un prêtre très connu et s’inquiétant de la disparition de son frère, elle engage un détective privé cynique et pince sans rire. Il remonte alors le filon du bordel des vampires et va avoir bien du mal à faire avaler ça à la police. Très clairement, il ne faut pas chercher bien loin avec ce script. En effet, on reste encastré entre deux décors, celui du bordel, et le plateau télé du prêtre, et on va faire des allers-retours avec différents personnages.
La vraie force de ce film, c’est d’utiliser cette simplicité pour tisser une intrigue basique mais ultra généreuse. Même si le film a été fait dans les années 90, il respire la liberté des années 80. On y trouve du sang, du sexe, des seins, des allusions graveleuses et des personnages qui jouent constamment avec cela. Si, dans le fond, le film ne dénonce rien et n’aborde pas forcément des thèmes très importants, il n’en demeure pas moins intéressant dans la façon qu’il a de jouer avec les codes du genre. Et cela est tout simplement dû à l’honnêteté du projet. Le réalisateur a conscience de ce qu’il a entre les mains. Un divertissement horrifique qui se doit d’être drôle, en mélangeant des ingrédients rétrogrades comme le cul et le sang. C’est primaire, mais ça correspond aux attentes du public des Contes de la Crypte, tout en fournissant des personnages à la fois drôles et attachants, ou alors horribles et sans honneur.
Dans les griffes de Lilith
C’est d’ailleurs avec ses personnages que le film gagne ses galons. On va rapidement ressentir de l’empathie pour ce détective à la fois cynique et drôle, qui fait son taf de manière sérieuse tout en ne prenant pas les gens au sérieux. Cette distance qu’il met lui permet alors d’avancer dans son enquête tout en faisant croire aux autres qu’il n’en a rien à faire. Dennis Miller est absolument génial dans ce rôle, où l’on sent qu’il se régale. Quant au principal antagoniste, la reine des vampires Lilith, jouée par Angie Everhart, elle est sexy en diable, tout en se montrant dangereuse et sans limite. Même si elle reste binaire dans ses intentions, elle reste dangereuse et pourtant très attirante. Pour les personnages secondaires, le film s’amuse à présenter un prêtre qui ne pense qu’à soigner son image, joué par un Chris Sarandon qui renoue avec les vampires depuis Vampire, Vous Avez dit Vampire ? et une sœur un peu prude qui va devoir se dévoiler petit à petit si elle veut sauver son frère des griffes des vampires. Tout ce petit monde sert réellement à quelque chose dans l’intrigue et les acteurs sont très impliqués.
Alors bien évidemment, il manque plusieurs choses à ce film, et notamment une thématique de fond. S’il n’est qu’un simple divertissement, il aurait gagné à traiter d’un vrai sujet. Si ici, on critique de façon gentillette les policiers qui se foutent pas mal d’affaires de disparition. Si on parle vite fait des rejetés de la société dont tout le monde se fout royalement. Et si on évoque à demi-mots une religion factice qui joue plus sur son image que sur son fond, le film reste bien trop en surface pour vraiment fonctionner dans ses rouages intelligents. Sauf que. Sauf qu’il y a certains moments qui détournent les codes vampiriques et religieux pour s’en amuser, à l’image de cette vampire qui pense voir une croix autour du cou du frère, alors qu’il s’agit d’une étoile de David. A plusieurs reprises, le film utilise certaines balises connues pour mieux les détourner et donc nous faire rire. Et cela marche étonnement bien.
La fête à la saucisse
Il est évident que si le film est un peu con sur les bords, il assume complètement ce statut et fonce tête baissée dans le graveleux et le gore généreux. On pourrait regretter la misogynie de l’ensemble, avec des vampires qui ont les seins à l’air durant tout le film afin de flatter l’égo des spectateurs masculins, mais cela fait partie du jeu. Rappelons aussi que nous sommes dans les années 90, bien loin des élans féministes justifiés. Cependant, le film est généreux dans son côté gore. Là encore, il assume pleinement son statut de film débile et généreux en offrant aux spectateurs de la bidoche à tous les étages. On a droit à de l’arrachage de cœur avec la langue, de la décapitation à mains nues ou encore à des explosions de corps en frontal. C’est gore, c’est sale, mais c’est extrêmement drôle. Ne se prenant jamais au sérieux, le passage où les vampires se font exploser à coups de pistolets à eau bénite est un régal. Une preuve que le film assume totalement son aspect comico-horrifique.
Et en plus de ça, c’est très bien fichu. Les effets spéciaux n’ont quasiment pas pris une ride. Si on peut déplorer quelques insertions numériques pour mettre en scène des vampires coupés en deux au niveau de la taille, le côté artisanal est très présent. Et ça reste, plus de vingt ans plus tard, une valeur sûre. Il y a un vrai charme qui se dégage de certaines images et scènes pourtant gores, à l’image de ce pauvre hère qui se fait décapiter par Lilith. Et si c’est outrancier, ça colle parfaitement à l’image que veut renvoyer le film. Reste alors quelques moments gênants, quelques passages hasardeux pour faire avancer le scénario, comme la lutte entre le prêtre et le nain, mais c’est vraiment peu de chose. Surtout face au plaisir ressenti devant un tel film.
Au final, La Reine des Vampires avait tous les ingrédients pour être un film bas du front, vulgaire et complètement à la masse. Pourtant, Le réalisateur utilise tous les codes connus pour mieux nous surprendre avec une histoire basique et débile, mais avec des personnages drôles et attachants et une générosité qui fait plaisir à voir. Loin de tout cynisme dans la mise en scène et le scénario, La Reine des Vampires reste un divertissement honnête et sale qui a fait et fera encore les beaux jours des amateurs de bis et d’horreur. Et voir Corey Feldman en vampire lubrique, ça n’a pas de prix.
Note : 15/20
Par AqME