avril 26, 2024

Skald – Vikings Memories

D’origine française, Skáld est un groupe de néofolk qui puise son inspiration dans la culture et la mythologie scandinave. Paru en 2019, Le Chant des Vikings s’avérait un album rempli de bonnes intentions, mais perfectible dans sa réalisation. En dépit de ses qualités artistiques et musicales, il en ressortait un effort orienté vers le grand public avec des reprises douteuses et des pistes suffisamment calibrées pour une prise de risques minimale. On pouvait néanmoins ressentir un potentiel évident qui ne demandait qu’à s’affranchir des carcans de la production. À peine une année écoulée, le groupe revient avec un nouveau disque et un membre en moins, Mattjö Haussy.

L’ouverture avec Fimbulvetr tend à amorcer une évolution dans l’approche musicale de base. Sans pour autant parler de davantage de maturité, la connotation plus mesurée du morceau démontre une volonté de fournir un travail qui n’est pas seulement axé sur le côté épique et grandiloquent de leur concept. Certes, il y a bien des titres plus expansifs, comme Jörmungrund ou Grótti, mais l’on distingue une variation bienvenue qui vient contraster et diversifier la découverte des différentes pistes. Là où leur précédent effort péchait par un manque de cohérence, Vikings Memories présente une évolution travaillée pour tisser un lien entre chaque chanson.

En ce sens, on apprécie aussi l’effort consenti pour s’éloigner des mythes scandinaves les plus connus et se focaliser sur d’autres légendes. Il est vrai que les récits explorés font la part belle au domaine maritime, ainsi qu’à l’inéluctabilité d’une fin du monde en devenir. Pour autant, les textes s’appréhendent comme des sagas à part entière qui, tout enrobage instrumental écarté, aurait pu être conté par un scalde. Si certaines paroles sont volontairement redondantes pour illustrer une situation ou développer une rythmique précise, il y a une réelle qualité narrative au fil des titres. Qu’il soit féminin ou masculin, le chant use d’un parler similaire à celui d’un conteur lorsque les circonstances s’y prêtent.

Au gré de l’album, les harmonies sont efficaces, les refrains entêtants et la variation musicale au rendez-vous. On alterne alors entre des compositions qui privilégient une tonalité festive avec d’autres jouant sur une contemplation toute sentencieuse. Preuve en est en confrontant Þistill Mistill Kistill et Sólarljóð. De même, le trio devenu duo négocie la transition de fort belle manière. Justine Galmiche continue de développer son répertoire et exprime pleinement son talent tant dans les morceaux « doux » que pour les occurrences plus dynamiques. À cela s’ajoutent cris gutturaux, chants incantatoires et chœurs masculins qui contribuent à la richesse de l’album.

Cette dernière s’affirme autant dans la production des pistes que dans l’orchestration musicale. On apprécie cette connivence sous-jacente entre une approche somme toute contemporaine et l’usage d’une instrumentation traditionnelle. Il s’en dégage une véritable ambiance qui réalise un parallèle entre les époques dépeintes et un contexte actuel qui ne se retrouve plus dans les valeurs d’autrefois. Sans sombrer dans une nostalgie de façade ou des considérations surannées, le propos présente une résonnance particulière avec les textes précédemment évoqués ; qu’il s’agisse de la dureté de l’existence, de son impermanence ou, de manière plus prosaïque, de survie.

Au final, Vikings Memories gomme la majeure partie des errances de son prédécesseur pour fournir un effort davantage représentatif de l’identité du groupe et, par extension, de leur courant musical. En seulement un an, Skáld a réellement entrepris un travail de fond pour proposer une œuvre plus aboutie, peut-être plus intimiste, mais certainement plus marquante en matière de créations artistiques. L’alternance des styles joue également un rôle essentiel dans le bon a priori qui se dégage de ce second album. Désormais, les morceaux épiques côtoient des titres plus posés. L’approche se veut moins précipitée dans sa manière d’enchaîner les chansons, de varier les ambiances entre explorations aventureuses, confrontations guerrières et pistes contemplatives. Une évolution artistique de très bon aloi.

  1. Fimbulvetr
  2. Jörmungrund
  3. Grotti
  4. Nororljos
  5. Saekonungar
  6. Þistill Mistill Kistill
  7. Sólarljóð
  8. Vioforla
  9. Hafgeroingar
  10. I Dansinum
  11. Nyr

Note : 15/20

Par Dante

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