avril 16, 2024

Ulcerate – Stare Into the Death and be Still

Avis :

On connait la Nouvelle-Zélande comme la Terre du Milieu, pour ses sagas de l’Anneau, fleurons du cinéma de fantasy, mais aussi pour ses paysages, son rugby roi et sa mythique équipe des All Blacks. On connait moins le pays pour sa scène metal florissante. Avant qu’émergent les jeunes et excellents Alien Weaponry et leur thrash en anglais et maori sous influence sepulturienne, les fers de lance de la scène locale étaient des groupes de death comme 8 Foot Sativa, Dawn of Azazel mais surtout Ulcerate. Formé en 2000 sous le nom Bloodwreath avant de changer de nom en 2002, Ulcerate jouit d’une notoriété grandissante qui leur vaut de signer sur le label américain Relapse Records pour leur quatrième album Vermis, et de brûler les planches à l’Altar du Hellfest. Un palier est encore franchi avec le cinquième opus Shrines of Paralysis. En 2019, un mercato s’opère entre les USA et la France et Ulcerate signe chez Debemur Morti, label underground essentiellement dédié au black metal, réputé pour leur exigence et sur lequel on retrouve des artistes comme Blut Aus Nord, Au Champ des Morts ou encore White Ward.

Un groupe de death sur un label de black metal ? Quand on connait Ulcerate, le choix est finalement plutôt cohérent. Car les Aucklanders ne sont pas un groupe de death lambda. Depuis les débuts, ils proposent un death technique voire brutal hyper exigeant, pas des plus élitistes mais surtout distillant une atmosphère encore plus noire que le maillot de l’équipe nationale ou que les terres du Mordor, de quoi faire passer le black métal de Mayhem ou de Gorgoroth pour une ballade de santé à travers un arc-en-ciel.

Et ce n’est pas ce sixième opus intitulé Stare Into Death and Be Still qui marque un changement de cap, bien au contraire. Comme à son habitude, l’hydre tricéphale montre son goût pour les morceaux hyper longs, lancinants et suffocants. Les premières notes de The Lifeless Advance sonnent comme un piège se refermant sur l’auditeur. Les portes claquent brusquement derrière nous et on est parti pour une plongée en Enfer de près d’une heure, une heure à se prendre dans la gueule les growls torturés de Paul Kelland (ainsi que sa basse oppressante), les coups non retenus du marteleur Jamie Saint Merat et sa frappe de batterie mêlant blast beat infernal et ruptures tonales et la guitare à l’agonie perpétuelle de Michael Hoggard. A eux trois, les mecs balancent autant de parpaings à assommer des buffles que s’ils étaient neuf. Les morceaux s’enchaînent grâce à un superbe mix et s’imbriquent les uns dans les autres pour ne former qu’un bloc hyper compact, un monolithe de charbon et de souffre où les moments de respiration sont rares, à l’image de quelques solis aériens de gratte distillés çà et là. Un morceau comme Exhale the Ash (et son riffing parfois rock) reflète exactement la sensation procurée à l’écoute d’un album de Ulcerate. On étouffe, on suffoque et leur seul truc qu’on peut recracher, ce sont des cendres. Quant à There Is No Horizon, il reflète l’impression de vivre un Jugement Dernier où toute couleur a disparu de la nature. A un Inversion magiquement sinistre et insidieux répond Visceral Ends blindé de riffs et de progression épiques. Dissolved Orders et ses 8min15 concluent à merveille l’album avec un final lancinant d’où ressort le seul moment de calme, comme un boxeur qui laisserait tranquille son adversaire après l’avoir quasiment mis à mort.

Fruit de plus de 15 ans d’expérience et d’une technique bien poussée, et toujours garant d’un death metal malsain qui casse les codes du genre pour mieux le renouveler, Ulcerate livre l’album le plus abouti de leur carrière, le plus riche, le plus exigeant tout en n’étant pas inaccessible, le plus sombre et en même temps presque aérien. Stare Into Death and Be Still est très probablement l’album death metal de l’année. Plus qu’un disque, plus qu’un groupe, c’est un monstre infernal qui s’abat sur nous pour offrir ce qu’il y a de plus beau dans les ténèbres.

  • The Lifeless Advance
  • Exhale the Ash
  • Stare Into Death and Be Still
  • There Is No Horizon
  • Inversion
  • Visceral Ends
  • Drawn Into the Next Void
  • Dissolved Orders

Note : 19/20

Par Nikkö

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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