De : Fabrice Du Welz
Avec Chadwick Boseman, Luke Evans, Alfred Molina, Tom Felton, Teresa Palmer, Natalie Martinez
Année: 2017
Pays: Etats-Unis, Angleterre, Belgique, France
Genre: Thriller
Résumé :
En provenance de Cape Town, Jacob King débarque à Los Angeles à la recherche de sa sœur disparue. Avec un billet retour pour l’Afrique du Sud sept jours plus tard, et 600 dollars en poche. Au bout de 24 heures, il découvre que sa sœur est morte dans des circonstances étranges…
Avis :
En 1997, Fabrice Du Welz n’était encore qu’un illustre inconnu. Ou au moins un illustre belge, ce qui est déjà pas mal.
De son tout premier film, cette année-là, le court-métrage d’animation Folles aventures de Thierry Van Hoost, on ne sait quasiment rien, et s’il se fait remarquer avec Quand on est amoureux c’est merveilleux deux ans plus tard, c’est bien Calvaire en 2004 qui assiéra dès le premier coup d’essai le statut et l’aura du réalisateur.
Coup d’essai et coup de maître, Calvaire confirmait la bonne santé du cinéma belge, et surtout de son cinéma de genre, à une époque où la France végétait dans ses nanars, Brocéliande, Bloody Mallory ou Un Jeu d’enfants en tête (et malgré quelques pépites comme Maléfique et Haute Tension).
Et plus encore, bien entendu, le film a mis en lumière un réalisateur talentueux, qui avait su trouver sa propre patte, n’hésitait pas à plonger dans la noirceur la plus totale, et surtout s’appliquait à la tâche, une qualité qui manquait (manque toujours ?) aux réalisateurs de l’Hexagone.
Si Vinyan, sorti quatre ans plus tard, avait partagé les spectateurs, il avait au moins pu confirmer les ambitions et les envies originales du bonhomme, même si le choc avait été bien moindre que celui provoqué par Calvaire.
Et puis il avait fallu attendre 6 ans avant de voir à nouveau du Du Welz sur les écrans, deux films pour être précis, ce qui prouvait à la fois son envie de s’attacher à des films difficiles, et donc difficiles à produire, comme Alléluia, et le statut de film maudit de Colt 45, plongé dans l’enfer du développement, massacré par la production, sacrifié à la distribution.
Aussi, on se faisait une joie de voir le belge revenir aux affaires, cette fois-ci en terre américaine, avec Chadwick « Black Panther » Boseman au casting, pour ce qui s’annonçait comme un polar hardboiled.
Bien.
Un chose est sûr avec ce film, on peut enfin décrire avec précision les clauses des contrats hollywoodiens quand un européen décide de traverser l’Atlantique.
« Il sera demandé au réalisateur sous contrat de s’enthousiasmer pour le scénario le plus inepte possible, au mieux digne d’un Hollywood Night des années 90, et celui-ci devra impérativement oublier toute notion de cinématographie au profit d’une shakycam dégueulasse pour toute scène d’action, tout en rappelant son propre style au détour d’une scène, si possible artificielle et sans intérêt. »
Très heureux à l’idée de faire découvrir son bébé, Du Welz l’a décrit comme un vigilante « forcément politique à cause de la couleur de peau du protagoniste » qui allait chercher du côté du Hardcore de Paul Schrader.
Un peu dommage donc, qu’il soit impossible d’y déceler une seule once de vigilante ou de velléités politiques. Ou même d’un quelconque intérêt dans le parcours de Jacob King, venu tout droit de Cap Town pour L.A dans le but de retrouver et/ou venger sa sœur.
Pourtant le premier quart d’heure fait illusion, grâce à une paire de scènes tout en tension retenue et la présence plutôt charismatique de Chadwick Bosman. Et puis vient la première scène d’action illisible et brouillonne, et l’on comprend très vite que le film ne décollera jamais.
Et effectivement, plutôt qu’un vigilante hardcore ou au moins une histoire qui prend aux tripes, Fabrice du Welz semble préférer filmer son héros faire tout le contraire que taper les méchants. Jacob prend son petit dej, Jacob se lave les mains, Jacob va chez le dentiste, Jacob discute avec une prostituée (personnage le plus fade et inutile du film et certainement de la carrière de la pauvre Teresa Palmer). Vivement Jacob à la plage et Jacob passe son bac.
De scènes d’action il n’y aura guère, si ce n’est un premier échauffement bordélique mais qui laissait espérer une suite plus couillue, et un climax encore plus confus qui sonne comme un pétard mouillé. Jusqu’à un petit coup de théâtre final qui, malgré la relative noirceur de l’épilogue, n’apporte strictement rien au film.
En définitive, avec ses histoires de disparition, d’enquête, et de richards libidineux sur fond d’industrie hollywoodienne véreuse, Message from the King a des allures de Kiss Kiss Bang Bang sous Lexomil, sans saveur, sans humour (mais ça on s’en doutait et on en salivait même, connaissant Du Welz), sans fraicheur, sans même la brutalité sèche qu’on était en droit d’attendre.
Vraiment dommage de voir Du Welz tomber dans les écarts d’un frenchie lambda à Hollywood, d’autant qu’il avait su s’entourer d’une galerie de trognes assez phénoménales, dont Dale Dickey de Comancheria et Blood Father (un film un peu similaire au final bien plus réussi que Message from the King, et ça fait mal de l’avouer), Wade Williams le maton de Prison Break, mais aussi Luke Evans, Alfred Molina, et même une apparition de Tom Felton qu’on voit rarement sur les écrans depuis la fin d’Harry Potter.
Bref une sacrée occasion manquée qui chagrine et énerve, tant le film aura disparu des mémoires certainement aussi facilement que son Colt 45. Sauf que cette fois-ci, Fabrice avait les coudées franche, et personne d’autre n’est responsable de la débâcle de son nouvel essai.
Note : 05/20
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Par Corvis