Titre Original : Monty Python and the Holy Grail
De: Terry Jones et Terry Gilliam
Avec Graham Chapman, John Cleese, Eric Idle, Michael Palin
Année: 1975
Pays: Angleterre
Genre: Comédie
Résumé:
Le roi Arthur et les Chevaliers de la Table Ronde se lancent à la conquête du Graal, chevauchant de fantômatiques montures dans un bruitage de noix de coco cognées. La petite troupe va devoir passer mille épreuves, dont un chevalier à trois têtes, des jouvencelles en chaleur, voire même un terrible lapin tueur.
Avis :
L’humour anglais est très particulier et se démarque facilement des autres styles de comédies. Beaucoup plus absurde et potache, cet humour a la particularité d’avoir conquis un large public dans le monde, révélant ainsi des poids lourds de la comédie, mais aussi et surtout d’être très intelligent et très fin. En fait, il règne une vraie dichotomie dans cet humour à la fois totalement barré mais finement intelligent avec des textes et des situations ubuesques au service de critiques souvent acerbes d’une société souvent à la dérive. Et fleuron des fleurons dans l’humour british, les Monty Python se sont imposés comme la Rolls Royce du rire anglais. A tel point qu’ils ont inspiré une pléiade d’humoristes dans le monde entier, se servant de cette absurdité pour faire rire et dénoncer. Mais les Monty Python, ce n’est pas seulement du spectacle, c’est aussi du cinéma et à l’occasion des quarante ans du film, voici que sort une version anniversaire de Sacré Graal dans une édition de toute beauté.
Reprendre le mythe de la Table Ronde avec la quête du Graal et le roi Arthur pour en garder l’essentiel et tourner le tout en dérision était un pari risqué de la part de la bande des Monty Python. Non pas que ce mythe soit intouchable, mais encore faut-il avoir de bonnes idées et garder en tête les enjeux premiers, à savoir un voyage initiatique et la recherche d’un objet. Et Sacré Graal demeure l’une des plus grandes références dans le domaine du pastiche et la moquerie avec un vrai fond. Parce que ce n’est pas parce c’est absurde que le film ne doit pas critiquer les non-sens de la société. Et utiliser le non-sens pour dénoncer le non-sens réel, voilà une idée de génie. Ainsi, la religion, et notamment le christianisme en prend un coup dans l’aile, avec des textes stupides, des rituels absurdes, à l’image de ces moines qui se cognent la tête contre une planche en bois, ou encore une démystification de Dieu, le rendant agréable et plus humain que les culs bénis. Et si la religion en prend pour son grade, on pourra aussi compter sur la justice et les différents mythes chevaleresques. Dès le départ, le film se moque ouvertement de la chevalerie, dans une introduction qui deviendra culte.
Complètement loufoque, le film déstructure totalement les notions de courage et de peur si chères aux chevaliers. On aura droit à des chevaliers couards, bêtes, et toute la mythologie arthurienne va en prendre pour son grade, mais toujours de manière intelligente. Entre le lapin de Troie, les paysans syndicalistes, les français orduriers, le chevalier ayant juré abstinence et qui se retrouve dans un château peuplé de nymphomane, autant de moments hilarants au service d’une écriture incroyable. Parce que la plus grande force du film, outre de prendre en dérision les mythes et les légendes, c’est la richesse des textes qui sont à tomber par terre. C’est très intelligent, jouant sur les mots, sur les situations et on retiendra notamment la performance lorsque le roi demande à deux gardes d’empêcher son fils de sortir de la pièce. Un moment hilarant et à l’image de tout le film, qui arrive à rester sur une narration complexe mais riche.
Et là aussi, Sacré Graal met tout le monde d’accord. Nanti d’un budget famélique, le film arrive à faire un n’importe quoi qui se tient du début à la fin. Mélangeant les époques, faisant des mises en abîme, des quiproquos, des uchronies, le film arrive à tenir le tout dans une cohérence qui frôle l’impertinence. Et là où l’on voit cette intelligence dans la narration, c’est lorsque le chevalier évoque, de manière incongrue, un détail qui fait écho au tout du début du film. Surprenant, inattendu, le film utilise de tous les subterfuges du cinéma et du théâtre pour surprendre et faire rire, en atteste tous les moments en dessin animé ou encore les moments où les acteurs parlent au staff technique pour arrêter une musique, par exemple.
Alors bien évidemment, le film n’est pas parfait, et on regrettera peut-être le fait que les acteurs jouent plusieurs rôles, donnant ainsi quelques incohérences, comme l’absence de Lancelot lors que l’attaque du lapin blanc, puisqu’il joue le sorcier montrant la grotte, ou encore les moments de gore qui sont assez grossiers, mais c’est cette authenticité qui donne autant de cachet et de drôlerie au film.
Au final, Sacré Graal reste une référence de la comédie anglaise. Intelligente, hilarante, loufoque, absurde, le film continue aujourd’hui à fonctionner grâce à une qualité d’écriture impertinente et un certain sens du subversif, laissant entrevoir des critiques lourdes de sens de notre société actuelle. Et que dire du bluray qui fête les quarante ans du film, bourré à ras la gueule de bonus, dont des entretiens avec Terry Gilliam et John Cleese de cette année et des scènes coupées, et avec une image et un son totalement remasterisés. Un indispensable de cette fin d’année !
Note : 20/20
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Le Bluray :
Bonus :
Une galette très riche en bonus, allant du karaoké au mini film Lego, en passant par des entretiens exclusifs de plus d’une demi-heure et un documentaire sur comment faire le galop du cheval avec une noix de coco. Un disque ultra généreux et un rapport qualité/prix qui frise l’indécence.
Image :
La remasterisation du film est indéniable et la qualité est vraiment très belle. Néanmoins, le film garde un grain qui est appréciable et on notera un passage, vers la fin, dont la qualité baisse durant quelques secondes. Rien de bien méchant et cette seconde jeunesse est de qualité.
Son :
Excellent du début à la fin sans aucune scorie.
Interactivité :
Là aussi, le travail est exemplaire, avec un menu facile d’accès, extrêmement lisible et d’une ergonomie logique et innée.
Par AqME