mars 19, 2024

Terra

De : Michael Pitiot et Yann Arthus-Bertrand

Année : 2015

Pays : France

Genre : Documentaire

Résumé :

Epaulés par une équipe de cinéastes animaliers du monde entier, le photographe Yann Arthus-Bertrand et le réalisateur Michaël Pitiot mettent en images la formidable épopée du vivant, des premiers lichens aux gigantesques forêts, des singes de la jungle aux grands animaux mythiques de la savane.

Avis :

Pour Yann Arthus-Bertrand, l’année 2015 aura été l’une des années les plus prolifiques dans sa carrière de cinéaste. En parallèle de L’Algérie vue du ciel ou de son incroyable fresque Human, il s’est également attelé à la réalisation de Terra. On connaît l’homme pour ses prises de vue aériennes somptueuses, montrant la beauté aux multiples visages de notre planète. Cet émerveillement ne tient pas uniquement à une sensation d’évasion, propre à ce type de documentaire où le spectateur voyage par procuration. À la manière des émissions Ushuaia, le média est aussi vecteur de messages de sensibilisations sur le souci de préservation de la planète.

Pour le présent métrage, Yann Arthus-Bertrand s’écarte quelque peu de son modèle narratif habituel. On délaisse, du moins dans les premiers instants, une échelle démesurée à même d’appréhender l’impact de l’homme dans sa globalité. Ici, il est question d’entreprendre une rétrospective de l’histoire de la terre et, par extension, celle de l’humanité. On effectue ainsi un voyage dans le temps en appréciant les premiers pas de la vie, sous forme végétale, puis animale. La naissance des écosystèmes marins et terrestres. On songe notamment au biotope des océans ou encore à la variété des espèces au sein des forêts primaires.

Et pour cela, la trame ne s’attarde pas sur l’évolution de la vie, mais plutôt sur son extrême complexité et disparité à travers l’infiniment petit. Au lieu de concevoir un environnement dans sa totalité, on se penche sur une échelle d’observation plus restreinte et non moins fascinante. On note également un intermède sur des temps géologiques à la portée cataclysmique avant de se tourner vers les premiers pas de l’homme. Il n’est pas question de retracer les différentes époques de l’histoire de l’humanité, mais de dépeindre son existence avec, pour fil directeur, son rapport à la vie. Comprenez la cohabitation avec d’autres espèces et la considération qu’elle leur porte.

Sans sombrer dans l’étude ethnologique, cela donne lieu à un traitement qui tient plus de l’essai que de la synthèse. En trouvant l’angle d’approche adéquat, Terra permet ainsi à son public de constater le contraste entre les premiers peuples et civilisations (sans reconstitution aucune) et la société dite « moderne ». Une véritable scissure qui fait s’alterner les séquences contemplatives à des passages beaucoup plus difficiles. Ces derniers font office d’électrochocs pour dépeindre l’insensibilité de l’humanité. Terme pourtant admis comme le synonyme de compassion ou d’altruisme. Même les prises de vue aériennes sont détournées au dessein de présenter l’absurdité d’une croissance économique infinie sur une planète finie.

On peut évoquer l’agriculture intensive ou les parcs à bestiaux en Australie et aux États-Unis, tandis que les plans issus des mégalopoles traduisent une perpétuelle effervescence d’où découle une futilité ostentatoire. Contrairement à Vu du ciel ou Home, où les problématiques évoquées sonnaient un ton alarmiste, mais dans lequel on distinguait une lueur d’optimisme, Terra résonne davantage comme un ultime avertissement. Sans moralisation ni langue de bois, le discours avancé n’accuse pas de responsable en particulier. Il met simplement en évidence les errances et les erreurs qui résultent d’un rapport à la nature brisé, car devenu source d’exploitation et non d’épanouissement.

Soutenue par la narration tout en retenue de Vanessa Paradis, Terra se révèle l’antithèse de Human. Ce dernier se centrait sur la richesse de l’humanité à l’échelle individuelle. Ici, le constat est plus amer, car l’on porte son regard sur le comportement de masse de cette même humanité. À savoir, une exploitation outrancière et totalement inconsidérée des ressources planétaires. Malgré quelques transitions abruptes, notamment avec l’évocation de l’abattoir, le film de Yann Arthus-Bertrand et Michael Pitiot présente un point de vue lucide et sans complaisance sur le devenir de notre monde. Une issue presque désespérée qui s’accompagne des paroles de la chanson Madworld pour une dernière impression désenchantée.

Note : 16/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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