octobre 31, 2025

Les Derniers Parisiens – Plongée dans Pigalle

De : Hamé Bourokba et Ekoué Labitey

Avec Reda Kateb, Slimane Dazi, Mélanie Laurent, Yassine Azzouz

Année : 2017

Pays : France

Genre : Drame

Résumé :

Tout juste sorti de prison, Nas revient dans son quartier, Pigalle, où il retrouve ses amis et son grand frère Arezki, patron du bar Le Prestige. Nas est décidé à se refaire un nom et Le Prestige pourrait bien lui servir de tremplin…

Avis :

Le cinéma et la musique entretiennent une relation très étroite. Outre le fait que la musique habille les images d’un film, on retrouve aussi des artistes qui vadrouillent d’un art à l’autre, soit des acteurs qui deviennent chanteur, soit des musiciens qui partent faire du cinéma, soit en tant que comédien, soit en tant que réalisateur. On a déjà vu Nekfeu, récemment Orelsan ou encore Joey Starr dans des longs-métrages, et il n’est point étonnant de voir des acteurs pousser la chansonnette, parfois guitare à la main. La musique urbaine est très sensible à l’image, et cela se ressent dans les clips de rap, qui mettent souvent en images la banlieue. Forcément, l’attrait pour le cinéma se fait palpable, et certains rappeurs ont passé le cap de la réalisation, ce qui est le cas du duo Hamé Bourokba et Ekoué Labitey du groupe La Rumeur.

Amoureux de Pigalle et des quartiers du 18ème arrondissement de Paris, après un court-métrage remarqué, ils décident de faire un long qui parlerait de ce quartier à travers un personnage sulfureux. Ici, on va donc suivre Nas, un jeune homme qui vient de sortir de prison, et qui doit montrer patte blanche pour ne pas retourner en taule. Il se fait embaucher par son frère qui tient un bar dans Pigalle. Mais rapidement, Nas voit plus grand et rêve d’organiser dans soirées VIP dans ce bar. Mais entre des relations tendues avec son frère, un passif de mafieux difficile à effacer aux yeux des gens et un tempérament fougueux, les choses ne sont pas si aisées. Le film nous plonge de suite au plus près de ce personnage, au sein du bar, alors qu’ils regardent un match de foot avec ses amis, et que les choses dérapent.

« La réalisation vive et presque spontanée, portée par des acteurs non professionnels, ajoute un charme certain au long-métrage »

Rapidement, on voit où veulent en venir les deux réalisateurs. Le but ici n’est pas forcément de raconter une histoire propre à Nas, même s’il est au cœur du problème, le but est de raconter le quartier, les gens qui y vivent, comment ils s’en sortent, et toute la faune que l’on peut retrouver le soir. En un sens, ce sentiment de quartier animé et vivant est très bien retranscrit. Il y a constamment de la vie, du bruit, de l’agitation. Pour autant, malgré des faits divers avec un camé qui vole un vélo, des gens qui traficotent pour gagner quatre sous, on ne se sent jamais vraiment en danger. Le quartier n’est pas forcément dépeint comme une carte postale, mais il montre un visage qui n’est pas si désagréable. La réalisation vive et presque spontanée, portée par des acteurs non professionnels, ajoute un charme certain au long-métrage.

Cependant, on va se rendre compte aussi que l’histoire manque de profondeur, et délaisse même parfois quelques axes. Par exemple, au début, Nas souhaite retrouver une ex, mais celle-ci est partie, et le scénario ne prévoit pas de suite. Il en va de même avec un mafieux italien qui l’on voit quelques instants dans une voiture, et il ne sert qu’à un axe secondaire, alors qu’il est filmé comme s’il avait de l’importance. De plus, si l’on suit Nas dans sa vie décousue, on reste de marbre sur son parcours et sur ses ambitions. Il est constamment dans l’affrontement, les discussions qu’il entreprend finissent toujours par ressembler à des menaces, et globalement, on ne lui souhaite qu’une chose, qu’il se plante. Là aussi, le film prévoit une petite morale sur le fait de rebondir après un échec, mais cela reste tellement téléphoné que ça ne marche pas vraiment.

« Reda Kateb est parfait dans ce rôle de loser magnifique »

De plus, les relations entretenues dans le film sont assez pénibles à suivre. On évolue dans un monde de « racailles » qui semble édulcoré. C’est-à-dire que même s’il y a des tensions et des menaces, il ne se passe au final jamais rien. Et on rentre dans tous les clichés du genre, avec celui qui bosse illégalement et qui cherche à avoir des papiers, les amis qui sont un peu des gros bras impolis, ou encore le grand frère qui aimerait que son petit frère rentre dans un cadre afin de sortir d’un cercle vicieux où se mêle constamment des fréquentations douteuses. Alors oui, le duo de cinéaste veut nous plonger dans un monde à la fois sombre et porté par une certaine générosité, mais tout cela tient sur un fil. Puis il apparait quelques invraisemblances, à l’image de cette assistante sociale charmante qui se tape le barman.

Heureusement, en ce qui concerne les acteurs professionnels, on sent qu’ils sont investis dans leurs rôles et qu’ils veulent vraiment bien faire. Reda Kateb est parfait dans ce rôle de loser magnifique qui se voit plus grand que ce qu’il est réellement. Il est suffisamment touchant et agaçant pour jouer sur un double tableau intéressant. Ce ne sera pas le cas de son frère, joué par Slimane Dazi, qui tire constamment la gueule et s’avère tout le temps dans la confrontation. Néanmoins, il semble habité par son rôle et joue plutôt bien. Quant à Mélanie Laurent, elle détient un rôle mineur. Pour les autres participants au film, qui sont souvent des non-professionnels, on souffle le chaud et le froid, même si on reste sur quelque chose de relativement plaisant à suivre.

Au final, Les Derniers Parisiens est un film qui laisse un petit peu de marbre. Ce n’est pas mauvais, mais globalement, on attend que le film parte vers des fins tragiques, et cela ne vient jamais. Les deux réalisateurs proposent une vision particulière du quartier de Pigalle, loin des clichés que l’on peut avoir de Paris, mais ils oublient de faire une histoire qui touche et qui a du mordant. En l’état, on suit les pérégrinations d’un type qui veut s’en sortir, mais qui tombe toujours dans les mauvaises magouilles, et c’est tout, ce qui fait trop peu pour pleinement nous convaincre.

Note : 11/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.