septembre 28, 2025

Igorrr – Amen

Avis :

Il y a des groupes de musique qui offrent des musiques inclassables, et par la même, ils arrivent à se démarquer de la masse. Igorrr fait partie de cette caste. Pensé comme un One Man Band de la part de Gauthier Serre, déçu par la musique qu’il entendait à la radio, il se décide à mélanger toutes ses influences par arriver à un métal baroque, teinté d’électro et de parties complètement folles. Après deux démos (Poisson Soluble et Moisissure), il sort son premier album en 2010, Nostril, puis il commence à monter un vrai groupe pour pouvoir l’accompagner sur scène. Devenu un incontournable de la scène musicale extrême, chaque nouvel album du groupe est attendu avec fébrilité, partagé entre expérience radicale et génie musical. Amen est le cinquième effort de la formation française, et il montre un retour relativement sombre, mais aussi très réussi.

Le premier morceau, Daemoni, donne clairement le ton. Le disque sera noir, avec toujours des éléments propres au groupe, mais dans une ambiance délétère. On retrouve de gros riffs puissants, un chant growlé qui l’est tout autant, mais aussi des éléments lyriques et un breakcore qui épaissit un peu plus cette ambiance poisseuse et lourde. Bref, comme entrée en matière, on a connu plus léger, mais cela permet de savoir où l’on pose ses oreilles. C’est alors que se lance Headbutt, et tout en gardant en ligne de mire cette noirceur, le groupe fournit un morceau étrange et envoûtant, dans lequel se mêle piano, énorme batterie (quel batteur derrière les fûts ! Impressionnant), chœur baroque, chant lyrique, et hurlements primaires. Un titre complet, dense, et qui se termine de façon incongrue, avec une dernière note au piano jouée par… une grue de chantier.

Après ce gros délire, Igorrr propose alors Limbo, et ce sera un long morceau de plus de quatre minutes, mais étrangement, ce sera l’un des plus faibles de l’album. Le titre est très bon, mais il lui manque une identité propre. En gardant ce mélange de lyrisme, de violence et de piano omniprésent, le groupe oublie un petit peu la folie qui le caractérise, et propose quelque chose d’un peu trop linéaire. Le moment passé est plutôt bon, mais il lui manque un petit truc en plus. Heureusement Blastbeat Falafel va venir nous ravir les tympans. En jouant avec des airs orientaux qui se fondent à une violence propre au Death métal, on obtient un morceau original, puissant, et qui est cohérent du début à la fin. On peut se dire que tout cela part d’un délire entre potes, mais en fait, tout est pensé et calculé.

Comme rien n’est conventionnel chez Igorrr, le groupe va encore nous surprendre ADHD, qui tisse des liens avec des morceaux des albums précédents, comme Very Noise paru sur Spirituality and Distortion. Ici, on est plus sur du Breakcore à tendance lyrique, où l’électro côtoie étroitement les chœurs baroques et un clavecin redondant qui viendra nous rentrer dans la tête pour ne plus jamais nous lâcher. Et que dire du dernier tiers qui joue avec un sens épique époustouflant. Il nous faudra bien l’interlude 2020 pour nous en remettre, qui consiste à un simple hurlement de quelques secondes, jouant le rôle d’un exutoire presque nécessaire pour nous remettre de nos émotions. Et c’est alors que débarque Mustard Mucous avec la présence de Scott Ian, le guitariste d’Anthrax, excusez du peu. Un morceau délirant, violent, percutant, et qui joue les trouble-fête avec une flûte à bec en son sein.

Après tous ces moments à la fois techniques et bercés d’une douce folie, le groupe propose Infestis, et c’est un titre important dans l’album. Le morceau est très sombre, construit avec finesse, et les riffs sont lourds, avec une rythmique plus lente que sur les autres pistes. Ancient Sun prendra alors des allures de pause. Gardant toujours une atmosphère poisseuse, le morceau revient à des mélodies orientales pour mieux nous plonger dans un univers à la fois glauque et addictif. Puis Pure Disproportionate Black and White Nihilism renouera avec la violence du début d’album, nous assénant des coups de matraque surpuissants. Pour clôturer son album, Igorrr épure alors ses structures. Etude n°120 n’est que guitare sèche hispanique et chant lyrique. Puis Silence débute comme un piano voix baroque, avant de lâcher quelques samples électro discordants qui donnent une autre dimension à ce titre si poétique.

Au final, Amen, le dernier album de Igorrr, est une pure réussite, sur quasiment tous les plans. Si on note un morceau un peu en deçà par son manque d’originalité (et encore), tout le reste est maîtrisé à la perfection et démontre à quel point Gauthier Serre est un génie créatif. Cassant tous les codes du genre, n’hésitant jamais à prendre des risques pour faire bouger les limites, le français et toute son équipe offrent un effort complet, curieux, sombre, et très addictif. Bref, un album vraiment très intéressant, voire grandiloquent.

  • Daemoni
  • Headbutt
  • Limbo
  • Blasbeat Falafel
  • ADHD
  • 2020
  • Mustard Mucous
  • Infestis
  • Ancient Sun
  • Pure Disproportionate Black and White Nihilism
  • Etude n°120
  • Silence

Note : 16/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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