septembre 26, 2025

Les Ailes du Désir – Un Film Difficile d’Accès

Titre Original : Der Himmel Über Berlin

De : Wim Wenders

Avec Bruno Ganz, Solveig Dommartin, Otto Sander, Curt Bois

Année : 1987

Pays : Allemagne, France

Genre : Drame, Fantastique

Résumé :

Des anges s’intéressent au monde des mortels, ils entendent tout et voient tout, même les secrets les plus intimes. Chose inouïe, l’un d’entre eux tombe amoureux. Aussitôt, il devient mortel. Un film sur le désir et sur Berlin, « lieu historique de vérité ».

Avis :

Il est impossible d’évoquer la carrière de Wim Wenders tant l’homme a fait énormément pour le cinéma, marquant de son empreinte son amour pour le septième art, et n’hésitant jamais à citer ses comparses qui l’ont inspiré. Cependant, entrer dans le cinéma de Wim Wenders n’est pas forcément donné à tout le monde, car ses films sont exigeants, et certains demandent même un temps d’acclimatation pour rentrer dedans. Débutant sa carrière dans les années 70, jouant avec les road trip, sa consécration se fera en 1982 où il recevra le lion d’or à Venise pour L’Etat des Choses, puis en 1984 avec Paris, Texas qui recevra la Palme d’or à Cannes. Dès lors, le réalisateur devient un metteur en scène à suivre de très près, et même un réalisateur a festivals. Pour preuve, en 1987, il propose Les Ailes du Désir, qui sera aussi un film en compétition à Cannes.

Point de palme pour ce film, sinon une jolie récompense, celui du prix de la meilleure mise en scène, ce qui n’est pas rien. Et pourtant, Les Ailes du Désir n’est pas un film facile d’accès. Il demande même un certain temps pour rentrer dedans, et bien comprendre ce que veut nous raconter le réalisateur allemand. Le film débute en noir et blanc, et nous propose de suivre un homme, puis un deuxième, qui semble entendre toutes les pensées des gens qu’ils croisent. Il ne faudra pas sortir de St-Cyr pour comprendre que ces deux hommes sont des anges, et qu’ils sont là pour aider les humains à se sentir mieux. Sauf que Damiel souhaite devenir humain pour pouvoir réellement sentir les choses, connaître le goût des aliments et tomber enfin amoureux. De ce fait, Les Ailes du Désir se veut un film humaniste et très poétique.

« Les Ailes du Désir se veut un film humaniste et très poétique »

D’ailleurs, pour écrire ce film, Wim Wenders s’est grandement inspiré des poèmes de Rainer Maria Rilke, et c’est pour cela que par moments, le film part dans des divagations plus ou moins lyriques et oniriques. Bref, beaucoup de choses sont réunis pour faire de ce film un véritable chef-d’œuvre, à commencer par son écriture et son côté humaniste, essayant de démontrer que les plaisirs les plus simples sont aussi les plus savoureux, comme se frotter les mains lorsque l’on a froid, et le léger sentiment de bien-être que cela procure. Un plaisir anodin impossible pour les anges, qui ne ressentent rien. De plus, on peut aussi y voir un message un peu désespéré lorsque les anges estiment qu’ils ne sont pas assez nombreux pour nous venir en aide, alors qu’ils aimeraient bien être plus omnipotent. Il y a vraiment un joli message en filigrane.

De plus, la récompense de la meilleure mise en scène n’est pas usurpée. Wim Wenders joue avec tous les codes du cinéma. Le noir et blanc est là pour appuyer la vision des anges, alors que la couleur fait son apparition lorsque l’on bascule du côté humain. En jouant avec la colorimétrie, le réalisateur ne nous perd pas, et donne presque un ton mélancolique à la vie des anges, où ils sont presque des martyrs, consacrant leur vie à aider une poignée d’humains. De plus, certains plans sont tout simplement fabuleux, de ce cirque un peu miteux, à la dernière scène avec l’ombre portée sur le mur, on a vraiment une mise en scène en adéquation avec l’écriture du scénario, montrant que rien n’est laissé au hasard, et que tout concorde pour rendre l’ensemble à la fois poétique et mélancolique, avec une belle touche d’amour.

« Les Ailes du Désir n’est pas un film facile d’accès »

En plaçant aussi une partie de son scénario sur un plateau de cinéma, on peut y voir une belle mise en abîme, et un fabuleux message d’amour au septième art. Seulement, comme dit précédemment, Les Ailes du Désir n’est pas un film facile d’accès, et il peut laisser sur le carreau. A force de multiplier les points de vue dans son introduction, et de même faire quelques petits passages auprès de personnages secondaires pas si importants (même si cela évoque la Shoah), il est difficile de se sentir proche de ces deux anges qui ne font que s’apitoyer sur leur sort. Même si la démarche permet de travailler profondément la psychologie de Damiel, on reste sur un discours lourdingue, et qui mettra un temps fou à se décanter. Alors oui, la rencontre amoureuse avec la trapéziste est blindée de poésie, mais là aussi, les apitoiements de cette dernière sont pénibles.

Outre ces excès de dépression qui peuvent donner lieu à de belles réconciliations, le film se perd vraiment dans sa narration, notamment lorsqu’il faut évoquer le personnage joué par Peter Falk, et toutes les références faites à Columbo. L’acteur est très bon, ce n’est pas le problème, mais c’est juste son rôle qui est totalement flou. Il peut ressentir les anges sans les voir, il parle comme un bouquin, et peut même sembler un tantinet pénible lorsqu’il faut choisir un chapeau pour son rôle. Le film fait sans cesse des allers-retours entre lui et la trapéziste, coupant alors les messages et les sentiments que l’on peut éprouver. C’est dommage car on sent l’envie du réalisateur de partager des valeurs humanistes fortes, au sein d’une poésie enivrante, mais l’ensemble manque finalement de liant et de fluidité. Un sentiment personnel, bien entendu.

Au final, Les Ailes du Désir est un film qui n’a pas volé son statut de film culte, ni même sa récompense au quarantième festival de Cannes en 1987. C’est beau, c’est poétique, c’est joué avec délicatesse et Wim Wenders délivre un sublime message d’amour. Cependant, c’est un film qui est difficile d’accès, et pour lequel il faut être dans de bonnes dispositions pour rentrer dedans. Car si on ne peut nier le talent du réalisateur, il n’en demeure pas moins que les messages sont parfois diffus, lourdauds, et que les atermoiements de certains personnages s’avèrent bien pénibles à la longue. Bref, un film qui peut laisser sur le carreau (et ce fut amplement mon cas…).

Note : 12/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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