
Auteur : James Lovegrove
Editeur : Bragelonne
Genre : Policer, Fantastique
Résumé :
1929. Conscient de sa fin imminente, le Dr John Watson se décide enfin à écrire un nouveau récit dévoilant les événements authentiques qui se cachaient jusque-là derrière ses chroniques des exploits de Sherlock Holmes.Dans cet ouvrage, le célèbre détective et son fidèle compagnon affrontent des cadavres ranimés au cimetière de Highgate, rencontrent une Irène Adler très différente, quoique toujours aussi insaisissable, enquêtent sur des cas de démence dans les étendues glacées du grand nord, découvrent d’inquiétantes machines organiques… et bien plus encore. Car, à chaque affaire, le fameux duo se rapproche un peu plus l’effroyable vérité sur les Mi-Go, mystérieuses créatures venues d’ailleurs, et sur leurs projets pour l’avenir de la Terre…
Avis :
Féru des œuvres d’Arthur Conan Doyle et de H.P. Lovecraft, James Lovegrove s’est immiscé dans ces deux univers avec plus d’une dizaine d’ouvrages. En France, cette incursion a été inaugurée avec Les Dossiers Cthulhu, même si d’autres romans similaires le précèdent. Il en ressortait des débuts prometteurs pour aboutir à une trilogie poussive, sinon opportuniste. L’amalgame des genres fonctionnait, mais les intrigues perdaient en intérêt au fil des récits et des affaires. En dépit de sa conclusion, cette saga connaît un quatrième tome. Sherlock Holmes & les horreurs de Highgate est censé être l’ultime travail de l’auteur dans ce cadre.
D’emblée, le choix d’inscrire le présent ouvrage dans Les Dossiers Cthulhu laisse perplexe, car il n’est pas question d’évoquer ce terrible culte. À l’image de Sherlock Holmes & la bête des Stapleton et consorts, il aurait été plus judicieux de proposer un one-shot. Exception faite de brèves allusions, l’intrigue reste parfaitement intelligible et ne nécessite pas de connaissances particulières quant aux précédents évènements qui opposèrent Holmes et Watson à des forces indicibles. Cela étant dit, le roman présente une structure similaire à Sherlock Holmes & les trois terreurs de l’hiver. Il s’agit d’investigations distinctes qui s’enchaînent avant d’étayer un fil directeur à même de les rassembler sous l’égide d’une seule affaire.
La progression et le déroulement demeurent familiers. Un tiers sollicite les compétences du détective du 221B Baker Street pour s’atteler à des « problèmes » qui dépassent l’entendement. Enfin, le mystère initial stimule la curiosité de l’intéressé avant de s’orienter vers de terribles considérations. Le livre se compose de huit parties (aucun chapitre) qui représentent chacune une enquête. Dès lors, la résolution d’une d’entre elles amène à une certaine redondance dans l’exposition et l’évocation des suivantes. Certes, les circonstances divergent, mais il est aisé d’entrevoir la prévisibilité de la structure entre réflexion et travail de terrain.
Sur ce point également, on s’aventure en terrain connu où les capacités de déduction de Sherlock Holmes sont complémentaires à sa propension à se grimer. Les investigations sous couverture restent toutefois cousues de fils blancs, tant l’approche se fait sans subtilité ni suspense quant à la finalité de ses actions. De même, il paraît difficile d’apporter du crédit à des personnages caricaturés à l’extrême. Au choix, le protagoniste surestime ses compétences ou les antagonistes sont pris pour des benêts, sans doute un peu des deux. Ce constat se renforce lorsqu’on remarque les capacités extraordinaires d’Irène Adler à se métamorphoser dans l’apparence de son choix ; qu’il s’agisse d’humains ou… d’autre chose.
En ce qui concerne le caractère surnaturel des intrigues, James Lovegrove exploite correctement le panthéon des créatures lovecraftiennes. Cependant, il ne parvient guère à instiller l’effroi, à tout le moins un climat oppressant, à l’aune de ces indescriptibles évocations. Ici, on distingue surtout la dimension cosmogonique de cet univers, l’existence potentielle de civilisations antédiluviennes aux confins d’autres galaxies. À noter la progression elliptique qui sépare les enquêtes de plusieurs années ou décennies. Elle permet d’apprécier le vieillissement des personnages, rendant l’approche plus humaine dans les dernières incursions. Quant aux investigations parallèles initiées dans les précédents ouvrages, les mentions restent assez succinctes pour renforcer la cohérence de cette saga. Le constat est similaire avec le canon holmésien.
Au final, Sherlock Holmes & les horreurs de Highgate constitue une itération basique dans les œuvres de deux auteurs incontournables. James Lovegrove propose un ensemble d’enquêtes indépendantes qui souffrent d’une répétitivité évidente quand il est question d’amorcer de nouvelles intrigues. Au-delà de cette progression routinière, les enjeux manquent d’envergure et la résolution des affaires reste prévisible. Il en ressort un roman laborieux et trop long pour ce qu’il a à raconter, a fortiori lorsqu’on constate la densité du texte et le manque de fluidité dans la succession des faits. Sans pour autant être dispensable, un livre qui n’apporte rien aux Dossiers Cthulhu, aux mythes lovecraftiens ou à l’univers de Sherlock Holmes.
Note : 12/20
Par Dante