
Avis :
Certains sous-genres du Métal sont tellement de niche, qu’il est parfois très difficile de sortir de son carcan et de son cercle d’initiés. Par exemple, le Death Métal Progressif à tendance Technical est un sous-genre qui a ses adeptes, mais qui s’exporte très mal à d’autres personnes. Pourquoi ? Car on a souvent des morceaux à rallonge qui jouent sur les textures, sur les ambiances, avec du chant crié, du chant clair, des riffs sauvages qui peuvent s’accoupler avec des nappes incongrues, comme du saxophone ou n’importe quel autre instrument plus classique. Dans ce genre, Rivers of Nihil s’est rapidement imposé comme un mètre étalon du genre. Fondé en 2009, le groupe américain va charmer par ses prises de risque, mais aussi par son talent technique qui ne peut que forcer le respect. Seulement, la vie d’un tel groupe n’est pas une rivière tranquille.
Depuis sa formation, le line-up a pas mal changé. On notera un turnover de batteurs, avec pas moins de quatre changements, mais aussi trois guitaristes rythmiques qui vont se passer le relai. Quant au chanteur, il se fait la malle en 2022, remplacé au pied lever par Adam Biggs, le fondateur du groupe, qui est aussi bassiste, et qui, au départ, ne faisait que les back-ups. Néanmoins, cela n’a pas empêché le groupe d’être assez prolifique durant sa carrière, puisque cet album éponyme est le cinquième effort studio des américains, et il arrive quatre ans après The Work, qui était déjà une belle claque dans la tronche. Qu’en est-il de ce disque ? Est-il aussi bien, meilleur ou moins bon ? Autant donner la réponse de suite, il est du même acabit, avec des compositions qui sont tout simplement folles et une cohérence du début à la fin.
Tout commence avec The Sub-Orbital Blues qui est une immense réussite, malgré un côté presque classique. Le début joue sur une mélodie entêtante, avec un joli refrain en chant clair, qui va déboucher sur un chant crié puissant. Par la suite, le groupe joue sur des riffs lourds et imposants, pour jouer sur une ambiance pesante. Les variations de ton apportent une touche presque Jazz sombre, et l’ensemble donne une furieuse envie de se plonger plus en avant dans le skeud. Dustman sera un titre un peu plus simpliste dans sa démarche. Si le début, avec sa batterie nerveuse, se veut timide, on va avoir droit à du blast dans tous les sens, un growl omniprésent, et une violence accrue qui donne une furieuse envie de se déboîter la nuque. Un titre taillé pour la scène et créer quelques circle pit et autres joyeusetés.

Criminals sera aussi un titre qui peut paraître simple de prime abord, mais qui possède plein de nuances en son sein, tout en réussissant l’exploit d’être assez virulent et percutant. Mais le réel chef-d’œuvre du groupe se trouvera dans Despair Church, un morceau à la fois puissant dans son début, mais qui trouvera des plages calmes et éthérées avec un ajout parfait de saxophone. Ce titre est l’exemple parfait de ce que fait Rivers of Nihil depuis des années, jouant avec les limites de son genre pour mieux nous surprendre. Et Water & Time va faire pareil, nous étonnant avec un démarrage presque Synthwave sombre. Le morceau est impressionnant de maîtrise, et il faudra bien plusieurs écoutes pour en déguster toutes les nuances. Et le chant clair est envoûtant et colle parfaitement à l’ambiance recherchée par le groupe. Et House of Light va suivre ce chemin.
Cependant, le titre va jouer à fond l’ajout de saxophone pour donner un aspect très Jazz sombre à l’ensemble. Forcément, derrière, le chant crié et les riffs lourds ont plus de poids, et s’accordent parfaitement avec les éléments plus aériens. Et le refrain est tout simplement une dinguerie. Par la suite, le groupe joue sur deux gros morceaux qui frappent fort. Evidence est là pour faire mal, alors que American Death est un titre plus cynique qui s’amuse avec quelques ajouts malsains qui montrent le côté le plus noir du groupe. The Logical End va réunir un peu tous les éléments de l’album pour jouer sur une note plus mélancolique, tout en faisant de petites incursions dans un Death plus angoissant. C’est une parfaite synthèse de tout l’album. Enfin, le skeud se termine avec Rivers of Nihil, une outro de plus trois minutes, parfaitement orchestrée.
Au final, Rivers of Nihil, le dernier album du groupe au même nom, est une réussite sur tous les plans, et suit à merveille les précédents efforts. Restant sur un Death Métal Progressif avec de gros éléments techniques et des ajouts de nappes jazzy, les américains continuent avec brio leur petit bonhomme de chemin et ne cèdent jamais aux sirènes du tout-venant, ce qui en fait une formation rare et indispensable sur une scène qui se démocratise de plus en plus, se restreignant finalement à des happenings vidéos ou à des compositions bien trop simplistes.
- The Sub-Orbital Blues
- Dustman
- Criminals
- Despair Church
- Water & Time
- House of Light
- Evidence
- American Death
- The Logical End
- Rivers of Nihil
Note : 17/20
Par AqME