
De : Stuart Gordon
Avec Chris McKenna, Kari Wuhrer, Daniel Baldwin, George Wendt
Année : 2003
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller, Horreur
Résumé :
Engagé par un entrepreneur pour faire son sale boulot, Sean Crawley est ensuite trahi par son employeur, qui le passe à tabac tous les jours pour mettre la main sur les preuves de ses méfaits…
Avis :
S’il y a une chose dont on est sûr, c’est que chaque film estampillé The Asylum est un navet en puissance, qui reprend des blockbusters pour en faire de pâles copies sans le sou. Mais on oublie que dans les années 2000, certains réalisateurs connus ont eu recours à eux pour produire leur long-métrage, et c’est le cas de Stuart Gordon. Artisan réputé de films d’horreur à qui l’on doit quelques chefs-d’œuvre comme Re-Animator ou From Beyond, au début des années 2000, Stuart Gordon est dans le creux de la vague, et il se décide d’adapter la nouvelle de Charlie Higson, King of the Ants. Il fait donc appel à Asylum pour avoir quelques fonds, et la magie va opérer, offrant un film imparfait, très cheap, mais qui possède un fond très intéressant, oscillant constamment entre thriller âpre et horreur psychologique.

Le début du film nous présente deux personnages qui retapent une maison. Sean est un jeune qui n’a pas de but dans la vie, et qui vivote de petits boulots. Duke est un homme de main à la solde d’un riche homme d’affaires, et il propose alors à Sean un travail qui semble facile, celui de suivre à la trace un type qui semble fouiner dans les affaires de son boss. Le boulot est facile, et l’argent arrive assez rapidement. Le problème va survenir quand le patron va demander à Sean d’éliminer ce type pour environ dix mille dollars. Sean accepte, mais le paiement n’arrivera pas. Il se décide alors à faire chanter son boss avec des dossiers compromettants. Mais il va se faire séquestrer et tabasser afin de dévoiler la cachette des dossiers. Commence alors un véritable cauchemar pour Sean.
« Le constat est amer, le portrait est acide »
La chronologie du film est très simple. On suit la descente aux enfers d’un type un peu marginal qui ne fait que des mauvais choix. Le début fait plus drame qu’autre chose, et si le film tarde à démarrer, c’est pour mieux nous présenter Sean, un jeune homme sans avenir, qui va se faire avoir en beauté pour une poignée de dollars. Stuart Gordon prend vraiment le temps de faire évoluer son personnage, notamment dans sa maladresse. Son premier meurtre est raté, il ne va faire que des mauvais choix, en plus de tomber amoureux de la femme de sa victime. Le constat est amer, le portrait est acide et le réalisateur nous plonge dans une Amérique plus ou moins profonde, où les pourris sont riches et emploient de petites mains pour faire le sale boulot. Un cliché pas si éloigné de la réalité.
Par la suite, le film se transforme en véritable horreur psychologique. Sean est pourchassé, menacé, puis séquestré dans une petite cahute. Là, tous les jours, il va subir des tourments de plus en plus abjects, avec notamment des coups de club de golf dans la tête, dans l’espoir de le rendre amnésique. Défiguré, pour s’échapper de sa condition de martyr, il va alors faire des cauchemars où il est question de certains de ses fantasmes, avec notamment la femme de son premier meurtre. La vraie force de ce segment, c’est que la réalisation cheap nous plonge au plus près des tourments de cet homme et l’ensemble est crédible. Malgré une défiguration où le maquillage laisse à désirer, on croit aux blessures de ce pauvre hère qui continue à faire des choix douteux. Jusqu’à ce qu’il devienne une bête et s’apprête à perdre toute humanité pour se venger.
« un dernier acte sans concession. »
Avant un dernier acte violent et gore, Stuart Gordon va encore une fois enfoncer son personnage dans une situation glauque au possible. En effet, en s’échappant, l’homme n’a d’autre choix que de fuir dans une mission pour sans-abri, où travaille la femme de sa victime. Il est alors soigné, et ladite femme va l’héberger chez elle, jusqu’à ce qu’elle tombe amoureuse de lui. On pourrait croire en une fin idyllique, où la bête est domptée, avec une histoire sordide derrière lui, mais non, les choses empirent lorsque la femme découvre le pot aux roses. Malgré les tentatives d’explications de Sean, la jeune femme est folle de rage, et lors d’une bagarre, Sean fait une énorme bêtise, le plongeant alors dans une spirale infernale. Rien ne lui sera épargné, et le film tombe dans un pathos graveleux qui amène à un dernier acte sans concession.
Et c’est là que l’on aura l’horreur la plus graphique. Sean, dans un excès de colère, décide de retourner dans le ranch où il a été torturé afin de tuer ses trois tortionnaires. Stuart Gordon va se faire plaisir via des maquillages dégueulasses, avec des passages bien sales qui renouent avec son cinéma d’antan (oui, on aura bien un monstre dans les cauchemars de Sean, mais ça reste anecdotique), et il présente une vengeance sordide dont personne ne sortira indemne. Ce dernier tiers sera les conséquences de tout ce qu’a subi Sean, exultant alors en mode Rambo, détruisant tout sur son passage, et ne laissant aucune chance à ses opposants. Ils ont créé un monstre et ils vont en payer le prix fort. King of the Ants ne sera alors que le résultat de mauvais choix et d’une vie détruite par appât du gain facile.

Au final, King of the Ants est un film surprenant, qui ment un peu sur sa marchandise. Avec sa jaquette monstrueuse, on pourra croire à un film avec une créature dégueulasse, mais il n’en sera rien. Stuart Gordon délivre un film simple, sans concession, qui oscille entre thriller hard boiled et horreur psychologique, créant un monstre bien humain, qui sera bien plus effrayant qu’un monstre en latex. Bref, malgré des défauts évidents, comme un budget qui ne permet pas de faire une grande mise en scène, et des acteurs qui en font parfois trop, on reste sur un film réussi, et parfois bien cradingue.
Note : 14/20
Par AqME