Auteur : Jeff VanderMeer
Editeur : Au Diable Vauvert
Genre : Science-Fiction
Résumé :
Tandis que la Zone X s’étend, l’agence chargée de l’enquête et de sa surveillance, le Rempart Sud, s’effondre. Une dernière équipe tente le tout pour le tout et traverse la frontière, déterminée à atteindre une île reculée qui pourrait apporter des réponses. Un échec mettrait le monde en péril.Acceptation creuse les circonstances entourant la création de la Zone X. Qui se trouve à l’origine de ce bouleversement ? Quelqu’un a-t-il déjà approché la vérité sur la Zone ? Ou été corrompu par elle ?
Avis :
Lorsqu’un auteur décide d’étendre une histoire sur plusieurs tomes, ce choix laisse à penser que son récit s’avère dense, à tout le moins que le sujet mérite une approche progressive. Cela donne l’occasion de développer un univers, d’étayer différents axes narratifs. À l’image de certaines séries télévisées qui multiplient les saisons sans grand intérêt, il arrive aussi que des sagas littéraires se prolongent sans véritable enjeu. Ce traitement dilue l’idée initiale pour fournir un effort poussif et vain. Avec la trilogie du Rempart Sud, on se situe dans une telle situation. D’un premier opus exceptionnel, on a eu droit à un second tome laborieux qui relève d’un rapport froid et didactique, non d’un roman à part entière.
Au vu du dénouement de son prédécesseur et de l’amorce d’Acceptation, on aurait pu considérer Autorité comme le ventre mou du projet. Une sorte de faux pas que l’on rectifie au terme du voyage. Pour ce faire, le présent ouvrage s’immisce à nouveau dans la Zone X et laisse augurer des révélations quant à son origine, voire des explications sur son écosystème. Du moins est-ce là les promesses avancées par le pitch initial et l’enrobage éditorial. Du point de vue du lecteur, il paraît donc légitime de s’attendre à ce que Jeff VanderMeer renoue avec l’atmosphère singulière d’Annihilation, son sens de l’exploration aussi envoûtant qu’inquiétant.
Pour autant, cela n’est clairement pas l’angle d’approche qu’il emprunte. Très vite, l’intrigue se complaît dans des séquences qui ne présentent guère d’intérêt. Certes, il est toujours essentiel de développer les personnages, de leur offrir un background pour les rendre attachants. Cependant, le travail de caractérisation n’est pas à confondre avec un traitement perclus de longueurs, de situations creuses et inintéressantes. En lieu et place de veiller à la bonne progression de son récit, l’écrivain multiplie les errances et les états d’âme qui n’apportent rien. De même, l’alternance des points de vue n’aide guère à dynamiser l’ensemble.
Ici, il ne s’agit pas d’appréhender une intrigue contemplative, mais un roman qui n’a rien à raconter. Il faut donc se contenter d’une vision nombriliste où l’auteur se lance dans des formulations hasardeuses et alambiquées. Loin de fournir des métaphores inventives et intelligentes, il s’affuble d’un style lourd, perclus de tournures absconses. À titre d’exemple, il traduit l’haleine par une épaisseur de molécules. Après avoir assimilé une frontière à une membrane (pourquoi pas), il convient de la déposer ! Mention spéciale à la Zone X confinée dans… un chiffre. En plus de nous infliger des séquences pénibles, il les auréole d’une écriture hermétique et prétentieuse.
Preuve en est avec le choix de la seconde personne du singulier pour exposer le point de vue de la directrice. Au lieu d’instaurer un sentiment de proximité avec les protagonistes, voire de l’empathie, il se crée une distanciation tant l’exercice se veut maladroit et guère maîtrisé. Ces passages sont les plus difficiles à appréhender, sans compter une fois de plus sur leur contenu. Quant aux révélations tant attendues, il s’agit davantage d’une escroquerie que d’une déception. Les explications sont bâclées et vite expédiées. À charge au lectorat d’en tirer les conclusions qu’il souhaite, car les éléments avancés sont incohérents et guère crédibles avec ce qui a été évoqué jusqu’alors.
Au final, Acceptation marque un terme pathétique à une trilogie qui démarrait pourtant sous les meilleurs auspices. Il aurait été préférable de rester sur l’excellent apriori d’Annihilation, tant la suite et ce troisième volet s’avèrent pompeux et inutiles. La lourdeur stylistique de Jeff VanderMeer va de pair avec une histoire qui ne décolle jamais, n’a pas grand-chose à raconter. Cela sans compter un panel de personnages inconsistants. L’auteur n’est même pas en mesure de travailler l’atmosphère de la Zone X ou de varier à minima les séquences d’exploration, recyclant ce qui a été vécu dans le premier opus. Au vu du résultat, il en ressort un triptyque qui n’avait pas lieu d’être. Frustrant, trompeur et affligeant.
Note : 07/20
Par Dante