Auteurs : Antoine Tracqui et Paolo Antiga
Editeur : Oxymore Editions
Genre : Thriller
Résumé :
Göteborg, peu avant Noël. Jennie Lund, une jeune médecin légiste sans expérience, se retrouve malgré elle au cœur d’une enquête glaçante sur une série de crimes atroces. A mesure que les meurtres se succèdent, le mystère s’épaissit : l’assassin frappe-t-il au hasard, ou existe-t-il un lien insoupçonné entre les victimes ? Pourquoi son mode opératoire reproduit-il le cérémonial du blót, le sacrifice de sang en vigueur avant l’arrivée du christianisme ? Et pourquoi l’oncle de Jennie, ce policier d’élite censé mener l’enquête, s’acharne-t-il à brouiller les cartes ? Une plongée dans les ténèbres sur fond de rites néo-païens et de non-dits familiaux, dans la plus pure tradition des polars scandinaves.
Avis :
Les éditions Oxymore, fondé en 2023 par Mourad Boudjellal, l’ancien patron des éditions Soleil, ont de la suite dans les idées pour faire raquer plus rapidement le lecteur avide de bandes-dessinées. En effet, auparavant, il fallait une grosse année pour avoir un nouveau tome d’une série, notamment parce qu’un dessinateur ne peut pas aller plus vite que la lumière, et pour pallier à ce manque à gagner, l’éditeur a décidé de faire plein de séries où chaque tome est dessiné par un artiste différent. C’est le cas avec West Fantasy, Empires ou encore Titans, et aujourd’hui, on s’attarde sur le cas Autopsie. Ici, point de Fantasy, mais un bon gros thriller bien glauque où chaque tome est scénarisé par un médecin légiste différent, et un dessinateur différent. L’idée peut sembler bonne sur le papier, et sur ce premier tome est assez prometteur.
Alors oui, comme chaque tome sera une histoire différente, difficile de juger sur l’ensemble de la série, mais Le Sacrificateur démarre bien, sans jamais nous sortir d’une certaine zone de confort. Ici, on va suivre une jeune médecin légiste qui souffre de dépression, et qui va être nommée sur un meurtre atroce, qui a tous les atours d’un rituel païen. En menant l’enquête, elle va découvrir que ces meurtres ne sont pas nouveaux, et que son oncle, gradé dans l’armée, semble mêlé à cette sombre histoire. On retrouve alors tous les atours d’une enquête classique, avec la copine flic qui va lui faire passer des documents, l’historien qui va y voir un lien très étroit avec la mythologie viking, et bien évidemment, tout ce petit monde va se mettre en danger, face à un type violent et dangereux. Clairement, on ne sort pas des carcans du polar scandinave.
Ce premier tome évoque aussi bien les écrits de Stieg Larsson que ceux de Jo Nesbo, et rien ne viendra vraiment nous perturber. On rentre en plein dans les clichés du genre pour donner de l’épaisseur au personnage principal. Ici, la médecin légiste mal dans sa peau, qui a perdu ses parents à l’âge de trois mois, qui a tout de même eu une enfance plus ou moins heureuse, mais qui a une blessure plus profonde. Ses rapports avec son oncle sont houleux, et on se doute bien que ce dernier ne peut être le meurtrier, et qu’il fait cela pour une autre raison. Notre jugement ne s’ébranlera jamais, et le scénario est la principale faiblesse de ce premier tome, qui enfile cliché sur cliché sans jamais apporter quelque chose de nouveau. Alors oui, ça se lit très vite, c’est fluide, mais il manque tout de même de la profondeur.
Une profondeur que l’on aurait pu retrouver dans les motivations du tueur, trouvant alors des accointances entre néo-nazi et fantasme d’une mythologie viking très viril, mais cela apparait bien trop tard dans l’histoire, qui préfère s’attarder sur des éléments de l’enquête, une romance émergente, ou encore le passif d’une médecin légiste qui n’est pas si intéressante que ça. Et ce défaut va se faire sentir car en plus de ne pas entrer clairement dans des thèmes malins et d’actualité (la résurgence d’un mouvement néo-nazi qui fait froid dans le dos), le tueur n’a finalement pas d’identité propre. Ce n’est pas quelqu’un que l’on a déjà vu dans l’histoire, ce n’est pas un personnage connu et seule son apparence peut prêter à marquer, revêtant alors une tenue de guerrier viking pour faire ses sacrifices. Tout ça manque cruellement d’originalité.
Heureusement, les dessins de Paolo Antiga sont très réussis et permettent de plonger à corps perdu dans cette histoire. Le trait est réaliste, assez marquant lorsqu’il s’agit d’aller dans le gore, et d’une manière globale, on en prend plein les yeux. D’ailleurs, il y a un vrai travail de fait autour de l’ambiance, de l’atmosphère, qui est assez glaciale et rend honneur aux paysages de la Scandinavie. On ressent le froid et la nuit, ce qui confère à la BD un cachet qui n’est pas négligeable et qui colle parfaitement à ce que le scénario veut, notamment dans la psychologie du personnage principal. Enfin, le découpage est plutôt intéressant, car malgré l’aspect statique de l’enquête, on ne s’ennuie jamais, avec une certaine vivacité dans la mise en page.
Au final, ce premier tome d’Autopsie fait le job. Si du côté du scénario, on ne sera guère surpris et on reste dans ce que le polar scandinave nous a déjà servi à maintes reprises, le dessin sauve les meubles et le découpage, ultra dynamique, permet de rentrer dans cette enquête morbide, et dans le délire d’un serial killer qui souhaite voir revenir les vikings sur de le devant de la scène. Bref, ce premier tome entame plutôt bien la mise en route de cette nouvelle série, même si elle n’est pas exempte de défauts.
Note : 14/20
Par AqME