mai 18, 2024

The Craft – Les Nouvelles Sorcières – Quand on Prend son Public pour un Imbécile

Titre Original : The Craft : Legacy

De : Zoe Lister-Jones

Avec Cailee Spaeny, Gideon Adlon, Lovie Simone, Zoey Luna

Année : 2020

Pays : Etats-Unis

Genre : Horreur

Résumé :

Hannah doit déménager dans la maison du nouveau compagnon de sa mère. La transition n’est pas facile. Elle ne s’entend pas avec les enfants de son nouveau beau-père et ne parvient pas à s’intégrer dans son nouveau lycée. Seules trois camarades semblent s’intéresser à elle. Pour une bonne raison : initiées à la sorcellerie, elles ont décidé de faire d’Hannah l’une des leurs. Peu à peu, Hannah se retrouve dotée de pouvoirs magiques très dangereux, qu’elle compte bien utiliser pour se venger de tous ceux qui lui ont fait du mal. Mais contrôle-t-elle vraiment ses pouvoirs, ou ses pouvoirs la contrôlent-ils ?

Avis :

Si le cinéma d’horreur est le plus produit et est celui qui possède le plus de nouveautés, c’est aussi un genre qui cède souvent à la facilité. Il faut entendre par là que c’est un genre qui se repose beaucoup sur ses grands classiques, et qui n’a pas peur de faire des remakes, ou des suites, ou des spin-offs pour mieux coller à la nouvelle génération. Et ce n’est parfois pas une mauvaise idée, puisque ça permet de mettre en avant des films de qualité qui peuvent être oubliés, et actualiser des thèmes qui ont besoin d’un petit coup de dépoussiérage. Seulement, à force de tirer sur la corde du remake à tout va, on finit par faire n’importe quoi et plonger dans une sorte de relation platonique avec le septième art. Les films d’horreur deviennent alors plus lisses, avec des réalisations transparentes afin de plaire au plus grand nombre.

Il n’est donc pas étonnant que de nombreux remakes soient boudés, voire conspués, la faute à des producteurs frileux sur les interdictions dans les salles, et qui ne veulent plus choquer le spectateur, mais le caresser dans le sens du poil. L’un des derniers méfaits en date est cette suite, The Craft – Les Nouvelles Sorcières. Prenant appui sur le film original de 1996 d’Andrew Fleming (Dangereuse Alliance en version française), cette suite se veut dans l’air du temps, dénonçant la toxicité masculine et le patriarcat. Et c’est un sujet important, qui a toute sa place dans le cinéma, et notamment dans le cinéma d’horreur. Mais voilà, avec cette suite, qui pourrait presque se voir comme un remake, on tombe dans tout ce qu’il ne faut pas faire lorsque l’on veut pointer du doigt un problème de société.

« Le film s’atermoie alors sur des romances pénibles. »

Ce qui va choquer en premier lieu, c’est la mise en scène. Ici, c’est Zoe Lister-Jones qui est derrière la caméra, et la jeune cinéaste cède constamment à la facilité, et tente de faire un film d’horreur pour adolescentes. C’est-à-dire que le type rompu au genre n’aura rien à se mettre sous la dent, notamment d’un point de vue graphique, le film étant très timide. On a l’impression de faire face à une série télé tant il n’y a ni ambiance, ni moments de peur, ni petite tension. On assiste, plan par plan, à la création d’une petite sororité de sorcières, puis à l’utilisation de leurs pouvoirs, avant de tomber sur un grand méchant sorcier pas beau qui veut que les hommes redeviennent des hommes en mettant les femmes à la cuisine ou au ménage. Aucun effets gores n’est à noter, prouvant cette envie de viser un public jeune.

Comme on peut le constater, le deuxième problème provient du scénario. L’histoire s’axe principalement sur une jeune fille qui part habiter chez le nouvel petit ami de sa mère, un écrivain dont les principaux bouquins sont sur le retour de la masculinité dans la société. Elle se fait harceler par un sale type en classe, mais va se découvrir trois copines qui pratiquent la sorcellerie, et elle va se rendre compte qu’elle est la quatrième sorcière, ayant alors des pouvoirs. Les quatre filles vont utiliser cela pour faire le bien dans leur lycée, transformant le bully en gentil garçon, et bousculant un peu les garces qui jugent tout le monde par leur physique. Bref, des enjeux typiquement lycéens, qui ne visent jamais plus haut ou plus loin. Le film s’atermoie alors sur des romances pénibles et des moments où les filles usent de leur pouvoir pour faire de la merde.

« Le foutage de gueule est monumental. »

Apparition de maquillage, lévitation dans les bois, arrêt du temps à la cantine pour faire les débiles autour des autres, rien ne nous sera épargné. Le film sombre dans une culture du vide, comme si les ados d’aujourd’hui étaient incapables de faire autre chose que des blagues inoffensives, des vidéos Tiktok ou encore du maquillage so girly. Vraisemblablement, le scénariste était au courant de cette vacuité, et a cru bon d’y intégrer un gros message sur le machisme, voire la toxicité masculine. Le thème est important, et dépasse largement les micro problèmes adolescents. Mais le film surexplique tout. Il n’y a aucune finesse dans le déploiement final, où le grand méchant (pauvre David Duchovny) dévoile ses cartes et son désespoir de voir les hommes se rabaisser devant les femmes. Un gros ouin-ouin qui ne sert à rien et montre toutes les limites de cette histoire rocambolesque.

Mais ce n’est pas tout. Outre le scénario qui est à la ramasse, il est aussi insultant envers son public. C’est-à-dire qu’à force d’expliquer, et réexpliquer, et encore expliquer son message, cela sous-entend que son public est incapable de comprendre l’implicite, et qu’il faut tout lui balancer dans la tronche. Et au cas où l’on n’aurait pas tout compris, le méchant balance ses actes passés, avec un bon gros côté homophobe par-dessus la jambe. Bref, c’est d’une débilité sans nom, et le film doit en avoir conscience, pour ensuite pousser tous les potards dans le rouge en matière de ringardise, notamment lorsque les quatre sorcières invoquent leur force en ayant une aura de couleur différente, comme des super-saiyen. Le foutage de gueule est monumental.

Au final, The Craft – Les Nouvelles Sorcières est une calamité du début à la fin. Il s’agit d’une suite totalement ratée, qui ne fait ni honneur au cinéma de genre, ni au premier long-métrage qui a un statut de film culte pour de nombreux cinéphiles. Zoe Lister-Jones présente un film lisse, sans âme, dont l’histoire est d’une platitude affligeante, et où le seul message intéressant est tellement rabâché qu’il en perd de sa puissance et en devient ridicule. Bref, une suite dont on se serait bien passée, mais qui est peut-être symptomatique des remakes d’aujourd’hui, se voulant trop tendre pour plaire au plus grand nombre, et finissent par devenir translucide.

Note : 02/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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