avril 29, 2024

Realive – Mourir Deux Fois

De : Mateo Gil

Avec Tom Hughes, Charlotte Le Bon, Oona Chaplin, Barry Ward

Année : 2015

Pays : Espagne, France, Belgique

Genre : Drame, Science-Fiction

Résumé :

Marc est un jeune trentenaire à qui tout réussit. Lorsqu’il apprend qu’il ne lui reste plus qu’un an à vivre, il prend une décision radicale : cryogéniser son corps dans l’espoir qu’on puisse le guérir dans le futur. A son réveil, 60 ans plus tard, sans repères et séparé de ses proches, Marc découvre un monde dans lequel il est devenu un étranger.

Avis :

Être un bon scénariste signifie-t-il que l’on puisse devenir un bon réalisateur ? Très clairement, les deux métiers sont distincts, mais le rapprochement des uns et des autres fait que, parfois, ceux qui tiennent la plume veulent aussi tenir la caméra. C’est le cas de Mateo Gil, qui a commencé sa carrière en tant que scénariste pour un certain Alejandro Amenabar. C’est d’ailleurs lui que l’on retrouve derrière l’excellent thriller Tesis, ou encore Ouvre tes Yeux, qui bénéficiera d’un remake américain. Sa carrière de réalisateur débute en 1998 avec un court-métrage, puis en 1999 avec un premier long, Jeu de Rôles, un thriller avec Eduardo Noriega. Après un détour sur la télé espagnole, il signe alors un western en coproduction avec les Etats-Unis, Blackthorn, puis il revient en Europe pour proposer Realive, un vieux sujet qu’il avait dans les tiroirs et trouve le temps de mettre en images.

Realive est un drame sur fond de science-fiction, ou plutôt d’anticipation. On va y suivre un jeune trentenaire épanoui dans sa vie qui va apprendre qu’il a un cancer de la gorge, et il ne lui reste plus qu’un an à vivre convenablement. Dès lors, il décide de se faire cryogéniser dans l’espoir de revivre quelques années plus tard, lorsque la médecine sera capable de le soigner. C’est ce qui se passe, mais il se réveille soixante plus tard, et il devient le premier homme ressuscité, découvrant alors une nouvelle société dans laquelle il devient une sorte d’attraction de foire et de cobaye pour la nouvelle médecine. Il se rend compte alors de sa bêtise, renouant avec ses souvenirs et découvrant à côté de quoi il est passé.

« Le film interroge bien évidemment sur la mort, mais aussi et surtout sur la vie. »

Le film interroge bien évidemment sur la mort, mais aussi et surtout sur la vie. La mort est-elle une fin en soi ? Vaut-il mieux vivre longtemps, quitte à être séparé de ceux qu’on aime, ou bien faut-il vivre le temps qu’il nous reste, en profitant au maximum ? Toutes ces questions sont légitimes, d’autant plus que le concept du film s’appuie sur des recherches scientifiques véridiques, où certains médecins poussent les limites de la vie, afin de sauver des vies, mais à quel prix ? Tout le sel du film se retrouve dans ces réflexions, qui ont un impact sur le personnage principal, qui recouvre la mémoire petit à petit et ose enfin avouer son amour pour cette femme qui hante ses souvenirs. Des souvenirs qui n’auront finalement plus d’emprise sur sa vie, puisque tout le monde est mort autour de lui.

Mateo Gil offre alors un bon film réflexif autour des concepts de la vie, de la mort et de ce que l’on peut perdre, soit en mourant, bien évidemment, mais aussi en poussant les limites de la vie. Très clairement, en suivant le script, et en grattant son sujet à fond, le héros meurt deux fois, lorsqu’il se suicide pour être cryogénisé, et lorsqu’il se rend compte que tous ses souvenirs sont perdus à jamais. De plus, on va aussi avoir du grain à moudre autour des progrès de la médecine, et de ses docteurs qui jouent à Frankenstein, prenant les humains comme cobayes, et devenant alors des monstres sous couvert de progrès pour le bien de l’humanité. Difficile de trouver à redire sur l’histoire, mais en même temps, c’est le premier job du réalisateur, qui a l’habitude de pondre de bonnes histoires.

« Difficile dès lors de ressentir quoi que ce soit pour qui que ce soit. »

Le problème de Realive réside principalement dans le traitement des personnages, dans le rythme du film, et dans l’empathie que l’on va ressentir. En effet, Tom Hughes joue bien, mais son personnage de golden boy sympathique peine à convaincre. Alors que tout lui réussit, il devient égoïste et égocentrique, et on aura presque du plaisir à voir tout ce qu’il a perdu. A ses côté, Charlotte Le Bon est totalement déshumanisée, à l’image de cette nouvelle société qui étouffe ses sentiments tout en étant plus libérée sexuellement parlant (bien que pour créer du désire, il faut prendre des pilules). Puis il y a Oona Chaplin qui pleure beaucoup, et pourrait presque être la fautive de l’histoire, n’assumant pas pleinement son amour au départ, et créant ainsi une histoire d’amour contrariée. Difficile dès lors de ressentir quoi que ce soit pour qui que ce soit.

Et le film rentre aussi dans une rythmique très mollassonne. On a l’impression que Mateo Gil force pour aller vers un cinéma d’auteur lancinant, plantant point par point ses réflexions autour d’atermoiements intempestifs et de grandes phrases autour de la vie, la mort, les souvenirs et la médecine. Si la réalisation est propre, elle joue trop sur les flashbacks et n’arrive pas à rendre l’ensemble fascinant à regarder. Le futur semble bien lisse, et la photographie, tout comme les décors, reprend tous les clichés du genre, avec un aspect aseptisé vu et revu. Et le film ne s’aventure jamais à l’extérieur de l’hôpital, certainement par manque de budget, mais de ce fait, on se sent comme étouffé par une mise en scène intimiste, mais pas réellement passionnante par ce qu’elle raconte.

Au final, Realive est un film qui souffle le chaud et le froid, mais on restera sur un sentiment frisquet. Mateo Gil délivre de bonnes réflexions à travers un personnages qui se rend compte de sa bêtise et de toutes les conséquences qui en découlent. Cependant, le réalisateur est incapable de transmettre de l’empathie, ou même de la pitié, et on se retrouve à suivre cette histoire de loin, complètement détaché par le sort du personnage principal, ou par ses regrets. C’est dommage, il y avait certainement matière à faire beaucoup mieux…

Note : 09/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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