De : Bob Balaban
Avec Randy Quaid, Mary Beth Hurt, Sandy Dennis, Kathryn Grody
Année : 1989
Pays : Etats-Unis
Genre : Horreur, Comédie
Résumé :
Dans les années 50, la famille Lamele s’installe dans leur nouveau foyer, une maisonnette parfaite, tout comme les autres maisons du quartier, plus colorées et vivantes les unes que les autres. Nick et Lily, les parents, s’entendent gracieusement et nulle dispute ne vient troubler leur vie conjugale. Le problème subsiste en la personne de Michael, leur petit garçon, dérangé et silencieux et de plus en plus soupçonneux vis-à-vis de ses parents. Et il compte bien découvrir pourquoi les repas sont sans cesse composés à base d’une viande bien rouge, bien tendre, et surtout en quantité abondante.
Avis :
Acteur aujourd’hui reconnu, Bob Balaban a pourtant eu du mal à se faire un nom en tant que comédien. Pour autant, il navigue dans le cinéma depuis sont plus jeune âge, puisque son grand-père a été président de la MGM et son oncle fut un temps président de Paramount Pictures. En début de carrière, il va surtout être un second couteau et apparaître notamment dans les films de Spielberg, et plus précisément dans Rencontres du Troisième Type. Attiré par les planches, mais aussi la réalisation, il va se retrouver derrière l’objectif pour la première fois en 1989 pour fournir Parents, une comédie horrifique relativement bizarre. Avec son affiche étrange et son pitch un peu zinzin, aujourd’hui encore, Parents demeure trop méconnu et sous-estimé, alors qu’il a tous les atours pour devenir un film bizarre culte, qui ne fait aucune concession, et va jusqu’au bout de son concept.
Michael est un jeune garçon, fils unique d’un couple qui semble s’aimer à la folie. Sauf que Michael a des doutes sur le bonheur apparent de ses parents, et il s’étonne de voir qu’à chaque repas, il y a de la viande à manger. D’ailleurs, ses parents ont un appétit assez goulu quant à la viande rouge. Bref, Michael ne se sent pas bien, et petit à petit, il émet des doutes sur la santé mentale de ses parents. En partant de ce pitch tout simple, que l’on peut retrouver dans quelques autres films plus récents (Goodnight Mommy par exemple), Bob Balaban va tisser une sorte d’enquête en nous plaçant du point de vue de ce petit garçon naïf, qui voit ses parents d’un drôle d’œil. Un œil méfiant, interrogateur, qui va petit à petit nous mettre le doute à nous aussi.
« L’une des grandes forces de ce film est de nous mettre dans la peau de cet enfant. »
Et l’une des grandes forces de ce film est de nous mettre dans la peau de cet enfant en souffrance, qui cherche des réponses à des questions essentielles, mais où il ne trouve aucun répondant. On va découvrir un père lugubre, qui ne jure que par son métier de scientifique et qui a peu d’atomes crochus avec son fils. La maman est très protectrice, mais elle a un côté malsain, presque adultère avec son enfant. Même l’assistante sociale de l’école est un peu en dehors des clous, avec son attitude baba cool qui lui retire tout sérieux. Bref, Michael se sent mal dans sa peau, et son seul salut est une camarade de classe, qui est elle aussi dérangée, racontant qu’elle vient de la lune. D’ailleurs, les jeux de cette gamine sont assez étranges, avec toujours une connotation malsaine.
Et forcément, cela se répercute sur le spectateur qui va ressentir de l’empathie pour ce pauvre gamin. Le point de vue qu’adopte le réalisateur est malin, car il va permettre de nous faire ressentir des émotions assez fortes, allant du dégoût à une forme de révolte, face à ces parents complètement lunaires. Cela est encore plus fort via la prestation du jeune comédien qui est absolument parfait. A travers ce film, on va aussi y voir une critique acerbe de la société du paraître. Car ces parents portent des masques pour bien se faire voir en société. Lors d’une scène autour d’un repas avec le patron du père, on va vite voir les jeux de tromperie qui se mettent en place, avec notamment un surjeu pour exacerber la joie de ce diner. Bob Balaban est vraiment très inspiré dans ce qu’il raconte, et surtout comment il le raconte.
« On va ressentir du dégoût à la moindre vision de barbaque. »
Car en dehors de cette histoire un peu folle qui ne va jamais lésiner sur son aspect nihiliste, le réalisateur va user de stratagèmes intéressants pour créer le malaise. D’ailleurs, l’une des premières scènes présente le père comme un type inquiétant et un peu fêlé. Par la suite, lorsque l’enfant va se coucher, on aura droit à un ralenti où le lit se transforme alors en marre de sang. Tous ces petits effets, en dehors d’un cinéma conventionnel, vont rendre le long-métrage d’autant plus intéressant. Surtout qu’ils se placent toujours du point de vue de l’enfant, montrant les cauchemars de ce jeune gamin qui va vraiment avoir peur de ses parents. Et cela se traduit par des découvertes glauques, et une vision omniprésente de la viande rouge. A un tel point que nous, spectateurs, on va ressentir du dégoût à la moindre vision de barbaque.
Cela est renforcé alors par des acteurs qui sont vraiment investis dans leurs rôles. Si on parlait auparavant de Bryan Madorsky qui joue un petit garçon timide et impressionnable, Randy Quaid et Mary Beth Hurt ne sont pas en reste. Lui est vraiment effrayant dans ce rôle de père étrange, qui ne sait pas vraiment dialoguer avec son fils et qui lui fait peur avec juste quelques mots mal placés. Quant à elle, elle est parfaite dans ce rôle d’épouse modèle qui ne veut pas décevoir son mari, mais qui ressent tout de même l’affliction de son enfant. Il est juste dommage que les personnages secondaires ne soient pas plus travaillés, à l’image de cette assistante sociale un peu trop cool, ou encore du supérieur du père, qui ne jure que par son travail. Là encore, si les acteurs sont bons, les rôles ne sont pas assez forts.
Au final, Parents est un film qui est très intéressant dans ce qu’il raconte, dans ce qu’il dénonce et dans le point de vue qu’il adopte. Alors que Bob Balaban provient d’un cinéma plutôt conventionnel, il opte pour une première réalisation un peu expérimentale et prend le point de vue d’un enfant qui se doute que ses parents ne sont pas comme les autres. Un premier jet couillu, qui va être payant sur la qualité, tant le film est assez fascinant à regarder. Certes, il n’est pas exempt de défauts, mais il reste à ce jour un film trop méconnu, et pourtant très réussi.
Note : 15/20
Par AqME