avril 20, 2024

Kendrick Lamar – DAMN.

Avis :

Très souvent, quand on évoque le rap US, on a toujours tendance à relancer le débat entre les deux côtes et la rivalité entre Tupac et Biggy. Et si ce n’est pas le cas, alors on se berce dans une certaine nostalgie en revenant sur Eminem, Dr. Dre ou encore Snoop Dogg. Pourtant, chaque année, il y a de nouveaux talents qui émergent, et qui raflent même une pléthore de récompenses, à l’image de Kendrick Lamar. Le rappeur de trente-cinq ans émerge réellement dans les années 2010, et c’est surtout grâce à son troisième album, DAMN. qu’il va devenir une sortie de « légende » vivante. Album culte et voué à durer dans le temps, il était plus que temps de jeter une oreille dessus, même si on n’est pas forcément amateur de rap. Et est-ce que, pour nous, cet effort a tous les atours d’un disque de légende ?

Il est toujours délicat de traiter de rap américain, car les paroles ne sont pas toujours évidentes à appréhender. Cependant, en faisant quelques petites recherches sur le web, il est facile de comprendre les tenants et les aboutissants des chansons. Ainsi donc, on commence avec BLOOD., une introduction assez classique, dans laquelle le rappeur se fait tirer dessus par une femme aveugle. On y trouve alors une allégorie à la justice américaine qui n’est pas forcément impartiale quand il faut juger des personnes de couleur noire. On reste dans quelque chose de facile, mais qui a le soutien d’un chœur masculin, ce qui change clairement des femmes faire-valoir dans le rap. Mais c’est surtout avec DNA. que l’on va entendre toutes les capacités de l’artiste. Le morceau est rapide, le flow est dingue et le beat permet de lancer un rythme très effréné.

De plus, les paroles sont intéressantes, explorant alors les racines du peuple noir, le rappeur s’interrogeant sur ses origines. Et ici, dna n’est pas la version anglaise de adn mais de Dead Niggers Association, ce qui donne une autre dimension au morceau. Bref, jusque-là, tout va bien et on peut comprendre pourquoi l’album revêt autant d’importance pour la communauté afro-américaine. YAH. viendra un peu troubler cela. Le titre est plus lent et plus pénible à écouter. Si les paroles tournent autour de la couleur de peau du rappeur et de ses opinions religieuses (il est chrétien pratiquant et le revendique), on reste sur un morceau qui manque de colère. Puis ELEMENT. va venir noircir un peu le tableau. Si le titre n’est pas désagréable, il est un gros egotrip qui manque de finesse et s’appuie sur une instru minimaliste mais qui rentre dans tous les carcans du rap contemporain.

FEEL. sera un titre assez transparent, dans lequel le rappeur met, pêle-mêle, tous ses sentiments sur une multitude de sujets. La ligne de basse est cool, et on sent qu’on s’éloigne d’une simple boîte à rythme dans l’instru, mais on reste dans un truc calibré dont on a l’impression d’avoir déjà entendu une bonne centaine de fois. Puis débarque LOYALTY. avec Rihanna. Et là, on tombe dans un truc à limite de l’imbuvable, avec une instru purement électro et des paroles lénifiantes autour d’une romance platonique. Ce n’est guère intéressant et le morceau souffre d’un rythme mou. PRIDE. explore, encore et toujours, des thèmes religieux dont on se passerait bien, le tout baignant dans un faux rythme qui devient pénible. Tout cela manque cruellement d’énergie, ou même d’émotion. Puis HUMBLE. viendra mettre un peu de pagaille dans tout ça, avec une instru plus pêchu.

Il n’est pas étonnant d’ailleurs que ce moreau soit celui qui ait eu le plus de succès, même si on reste dans un truc vaguement subversif. LUST., toujours en lien avec la religion, retombera dans des travers ennuyeux, alors que LOVE., en duo avec Zacari, donne la sensation d’avoir des années de retard. On est dans un truc sirupeux au possible, qui peine à nous convaincre, malgré quelques instrus qui tapent bien dans les breaks. Puis survient la surprise étonnante avec XXX., en duo avec U2. Ici, le texte est plus cynique et frappe fort sur la société américaine, montrant, enfin, que le rappeur peut écrire des textes intéressants et virulents. Bon, clairement, les rockeurs irlandais ne servent à rien, mais l’intention est louable. Quant à FEAR., le morceau va vite mettre tout le monde d’accord. C’est ici un petit chef-d’œuvre de près de sept minutes.

Pour terminer cet album, Kendrick Lamar propose alors GOD., qui reste un titre intéressant, mais le côté religieux est trop présent et bouffe trop les thèmes véritablement importants. Et puis, bon reste dans un rap qui ne sort jamais de sa zone de confort, et qui aurait pu être en feat avec n’importe quelle chanteuse à la mode dans ce style. Mais comme il avait déjà pris Rihanna pour un titre précédent, il n’allait pas abuser de sa notoriété. Enfin, DUCKWORTH. signe le final de cet album, et c’est un bon titre, qui rentre pile poil dans un rap typé années 90, un peu old school mais qui assume pleinement ce statut et permet de passer un excellent moment.

Au final, DAMN., le troisième album de Kendrick Lamar, est un bon album, on ne peut renier cela. De là à dire que c’est un effort culte et qui va rester longtemps dans les annales du rap américain, pas si sûr. Car si des morceaux sont bons et méritent clairement le détour, d’autres sont clairement en-dessous, que ce soit sur les paroles, ou sur une instru simpliste et qui manque de mordant. Bref, il s’agit-là d’un album sympathique, mais loin de la claque survendue depuis de trop nombreuses années…

  • BLOOD.
  • DNA.
  • YAH.
  • ELEMENT.
  • FEEL.
  • LOYALTY. feat Rihanna
  • PRIDE.
  • HUMBLE.
  • LUST.
  • LOVE. Feat Zacari
  • XXX. Feat U2
  • FEAR.
  • GOD.
  • DUCKWORTH.

Note : 14/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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