décembre 11, 2024

Rammstein – Zeit – Deutsch Qualität

Avis :

Y-a-t-il quelque chose de plus immuable que Rammstein ? Depuis plus de trente ans maintenant, les piliers du métal industriel allemand nous abreuvent d’un son bien lourd, avec quelques phases aériennes complètement dingues. Avec un line-up qui n’a pas bougé d’un iota (ce qui est rare), mais souvent en proie à la discorde, les teutons ont parfois du mal à accoucher d’un album, et cela prend souvent. Si l’on excepte l’année qui sépare Reise, Reise et Rosenrot, il faut parfois patienter une dizaine d’années avant de voir venir un nouvel opus du groupe. Et quelle surprise que de voir ce Zeit débouler seulement trois ans après Rammstein. Alors que la pandémie a empêché le groupe de faire sa tournée, en piochant dans ses carnets de poésie, Till Lindemann a trouvé de quoi alimenter un nouvel album. Zeit, huitième effort du groupe, souffre-t-il de la précipitation ?

Il faut dire que les inquiétudes peuvent être fondées, car Rosenrot, qui est l’album le moins bon du groupe, est arrivé un an après Reise, Reise, sorte de jumeau maudit qui n’avait pas grand-chose à raconter. Pour autant, dès le morceau d’ouverture, on sent que l’on flirte avec un Rammstein qui est à la fois touchant et bien énervé. Armee der Tristen débute avec un clavier reconnaissable entre tous, et la mélodie va s’avérer à la fois lourde et pourtant très mélancolique. Il réside dans le morceau une atmosphère particulière qui évoque les plus belles années du groupe, à savoir Mutter. Cela se confirmera avec Zeit, le morceau phare de l’album. Débutant avec du chant lyrique et un piano qui touche au plus profond, il est difficile de se remettre d’un tel titre, car tout, absolument tout, y est. C’est beau, c’est fort et ça remue tout un tas d’émotions.

Schwarz continuera dans ce mélange osmotique entre douceur et colère. Le démarrage se fait aussi au clavier, avant de faire parler la voix gutturale de Till Lindemann, et de laisser plus de place aux grattes lors du refrain. Certes, c’est peut-être le titre le moins percutant de l’album, mais il reste d’une grâce qui peut surprendre de la part du groupe. Ce qui ne sera pas le cas de Giftig, qui sera là pour remettre les pendules à l’heure. Renouant avec un Rammstein des débuts, on sent que les teutons veulent faire parler la poudre et pour cela, les guitaristes lâchent la bride et tapent fort. Tout comme ils le font avec Zick Zack, satire de la liposuccion et de la chirurgie esthétique. Dans ce titre, les riffs ont toute la place, et ne laisse place qu’à quelques apparitions furtives du clavier lors du refrain.

En abordant OK, on va aussi voir les évolutions possibles vers lesquelles le groupe peut aller (si suite il y a). Prenant un orchestre lyrique pour débuter la session, le groupe balance ses riffs acérés pour ensuite laisser plus de place à un rythme ultra rapides avec un clavier omniprésent. Le refrain sera un peu en deçà du reste, mais tout cela reste du bel ouvrage. Meine Tränen va revenir à une peu de douceur (ça fait toujours bizarre de dire cela avec la langue allemande), comme avec Zeit, offrant quelque chose de très aérien, de très calme et surtout de très doux. Si le morceau est moins marquant que le reste de l’album, il n’en demeure pas moins puissant et très intéressant dans sa construction et dans les émotions qu’il véhicule. Rammstein aura rarement été aussi mélancolique.

Une mélancolie qui disparait bien vite pour laisser la place à Angst. Et là, on plonge dans du grand art, avec des riffs qui envoient sévère et surtout, un texte engagé sur notre société qui se méfie de tout un chacun. Si le clip tient du génie, il faut aussi dire que le morceau est une tuerie de tous les instants et qu’il allie parfaitement la colère à son propos (la peur) pour offrir un moment percutant et réjouissant. Cela se couplera avec Dicke Titten, le gros délire du groupe. Le morceau débute avec une musique de fête foraine, avant de lâcher les gros fûts et les gros riffs bien sales. On aura une reprise de cette introduction dans le deuxième break, pour un mélange à la fois inattendu et bien gras. C’est peut-être le morceau le plus drôle de l’album, mais il est fait avec sérieux.

Lügen renouera alors avec la douceur de Zeit et de Meine Tränen, avec du presque word spoken. Till Lindemann susurrera son texte, ce qui donnera une douceur infinie à l’ensemble, porté par le clavier superbe de Flake Lorenz. Tout cela avant d’entamer la conclusion avec Adieu, qui va venir nous prendre aux tripes. Osmose synthétique de tout ce qui fait Rammstein, on obtient un titre à la fois lourd et poétique, dans laquelle on se demande si ce n’est pas le chant du cygne du groupe, nous répétant alors adieu en français, en anglais et en allemand. Bien évidemment, on espère que cela n’est qu’un au revoir, tant la qualité globale de l’album est de très bonne facture.

Au final, Zeit, le dernier album en date de Rammstein, est une réussite sur presque tous les fronts. Si une paire de morceaux sont un peu en deçà du reste, on est tout de même sur un album inspiré, qui arrive à parfaitement mélanger les deux éléments qui font le groupe allemand, à savoir la mélancolie et l’énergie. Ne sombrant jamais dans la redite, trouvant toujours des explorations intéressantes et intelligentes, le groupe allemand confirme alors son statut de formation culte et sa bonne santé. On espère juste ne pas assister à la fin de l’un des plus grands groupes de tous les temps. Rien de moins, rien de plus.

  • Armee der Tristen
  • Zeit
  • Schwarz
  • Giftig
  • Zick Zack
  • Ok
  • Meine Tränen
  • Angst
  • Dicke Titten
  • Lügen
  • Adieu

Note : 17/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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