mars 29, 2024

Aristocrats

Titre Original : Anoko Wa Kizoku

De : Yukiko Sode

Avec Mugi Kadowaki, Kiko Mizuhara, Kengo Kora, Kei Ishibashi

Année : 2022

Pays : Japon

Genre : Drame

Résumé :

A presque 30 ans, Hanako est toujours célibataire, ce qui déplait à sa famille, riche et traditionnelle. Quand elle croit avoir enfin trouvé l’homme de sa vie, elle réalise qu’il entretient déjà une relation ambiguë avec Miki, une hôtesse récemment installée à Tokyo pour ses études. Malgré le monde qui les sépare, les deux femmes vont devoir faire connaissance.

Avis :

Dans le cinéma japonais, les réalisatrices se font assez rares. La première qui vient en tête, c’est Naomie Kawase qui s’est très joliment imposée et implantée depuis une vingtaine d’année, mais à part elle ? Et bien l’on trouve, plus éloigné de nous, Kinuyo Tanaka, immense actrice qui est passée à la réalisation dans les années 50. Il y a aussi le nom de Yukiko Mishima qui nous vient en tête, notamment parce qu’elle vient de sortir un nouveau film, « The Housewife » (que je n’ai toujours pas eu le temps d’aller voir). Mais voilà, sans que ce soit tout, peu de cinéastes japonaises arrivent en tête. Yukiko Sode a débuté sa carrière vers la fin des années 2000 avec « Mime-mime« , et depuis, la réalisatrice, qui est aussi scénariste, sort de temps à autre un film. « Aristocrats » est son troisième long-métrage.

Sorti en toute discrétion, « Aristocrats » est un film qui me donnait très envie de m’y arrêter, grâce à sa sublime affiche et derrière elle, surtout pour le sujet que la cinéaste aborde, la société japonaise, le patriarcat, les différentes classes sociales et en quelque sorte les traditions et je dois dire que j’en ressors un peu partagé. Partagé entre un film ultra intéressant dans ce qu’il raconte, mais assez ennuyant à la longue dans sa forme qui étire en permanence son récit, et donne la sensation d’être bien plus long que les deux heures et cinq minutes qu’il dure en réalité.

Hanako a presque trente ans et elle est toujours célibataire. Venant d’une famille très aisée, la condition de cette dernière déplaît grandement à ses parents, qui ont décidé de la marier. Hanako, poussée par les siens, fait la rencontre de Koichiro Aoki, un beau jeune homme avec qui le courant passe bien. Très vite, Hanako pense que c’est le bon, et quand Koichiro Aoki lui fait sa demande, elle accepte. Or, la jeune femme ne va pas tarder à découvrir qu’il entretient une relation ambiguë depuis des années avec Miki, une provinciale, qui pour payer ses études, est hôtesse de charme.

Je suis très embêté à la sortie de cet « Aristocrats« , tant le film me divise entre l’intérêt porté par la richesse de son sujet et la forme ce métrage qui malgré de très beaux arguments a tendance à traîner en longueur.

Sur le papier, et même à l’image, le film de Yukiko Sode est vraiment beau et intéressant. La réalisatrice pose un regard assez dur sur la société japonaise et ses codes. Dans un Tokyo en perpétuelle évolution (elle filme beaucoup les travaux et les constructions de la ville), Yukiko Sode sonde les microcosmes des différents quartiers de la ville, à travers deux femmes qui n’ont strictement rien en commun et que le destin va évidemment se charger de réunir. Divisé en sept parties, une ouverture, cinq chapitres et une conclusion, « Aristocrats » analyse bien ses personnages et leur milieu. Yukiko Sode évoque alors les traditions qui ont la dent dure, notamment chez les bourgeois où le mariage arrangé demeure encore et toujours d’actualité.

La réalisatrice évoque cette femme qui croit faire un bon choix, et qui finalement va faire bouger les choses et évoluer pour bousculer les codes de son milieu. La réalisatrice parle aussi du regard des bourgeois, ou plutôt des aristos, sur les différentes tranches de population de la ville. Des populations qui ont leur code et qui peuvent avoir du mal à se comprendre. Pour donner un autre regard, la réalisatrice a l’idée très intéressante de raconter l’histoire d’une jeune provinciale, qui arrive dans la capitale japonaise pour y faire ses études, et qui va se débrouiller comme elle peut pour vivre normalement.

À travers ce film, la réalisatrice évoque aussi la place de la femme dans la société japonaise, et ça, à plusieurs strates de cette dernière. Une place qui apparaît souvent comme défavorable, et chacune de ses héroïnes va s’affranchir du chemin qui lui a l’air tout tracé. D’ailleurs, derrière les femmes, la réalisatrice aborde aussi les hommes avec ce personnage ambigu, qui de par sa classe sociale, et ses privilèges de naissance, a bien l’air de s’empêcher de vivre comme il le voudrait et là encore, c’est un bon sujet que Yukiko Sode explore. Ainsi, avec toutes ces ficelles et d’autres encore, « Aristocrats » est vraiment ultra intéressant et on prend vraiment plaisir à se laisser entraîner dans ce Tokyo qu’on n’a pas vraiment l’habitude de voir.

Un Tokyo qui est par ailleurs magnifiquement filmé. Il faut dire que le film de Yukiko Sode est tout bonnement magnifique à regarder. La réalisatrice filme la ville comme un véritable personnage, avec ses caractères et ses codes selon les quartiers et là encore, c’est ultra intéressant. Puis de manière générale, « Aristocrats » est un film qui a de l’élégance, avec un choix de couleur superbe, des cadres qui sont très beaux et des mouvements de caméra délicats qui donnent la sensation d’être témoin indiscret du spectacle qui se joue devant nous.

Puis enfin, dernier point, et pas des moindres, « Aristocrats« , c’est aussi un trio de comédiens qui sont tous excellents de bout en bout de film. Trois comédiens qu’on se plaît grandement à découvrir, et dans une certaine mesure à suivre. Ainsi Mugi Kadowaki, Kiko Mizuhara et Kengo Kora tiennent tous des personnages très riches, qui s’imposent naturellement à nous et malgré l’ennui parfois que le film peut provoquer, on a en permanence envie de suivre ces personnages et de savoir où cette histoire va nous emmener.

Car oui, voilà, derrière tous ces bons et très beaux arguments, « Aristocrats » est un film qui a parfois du mal à fonctionner pleinement, car il a une fâcheuse tendance à étirer beaucoup de ses scènes. Malgré tout le décor et l’intérêt pour cette histoire et ses personnages, « Aristocrats » traîne en longueur. Yukiko Sode aurait gagné à faire quelques coupes et à resserrer son film et son intrigue, ce qui lui aurait fait gagner en dynamisme. On peut lui enlever facilement une bonne demi-heure, que ça ne changerait pas l’intrigue.

Une intrigue qui d’ailleurs manque aussi d’émotion, car si les personnages sont touchants, on ne peut pas dire non plus qu’ils nous bouleversent, ce qui est bien dommage, là encore, en injectant plus d’émotion, le film aurait gagné. Après, ce manque d’émotion peut aussi s’expliquer face au sentiment étouffé des personnages et des mondes dans lesquels ils évoluent.

Je ressors donc très partagé de cet « Aristocrats« , car il est clair que le film est très riche et dans ce qu’il raconte, il est vraiment très intéressant. Yukiko Sode sonde très bien la société japonaise à travers les portraits de ces trois personnages (et plus encore comme celui de la meilleure amie de Mikki), mais voilà, face à cela, on a du mal à être totalement pris, car ce film qui ne dure que deux heures, donne la sensation d’être bien plus long tant il a souvent du mal à avancer. Quoi qu’il en soit, malgré la déception, ne serait-ce que pour ce regard apporté, les sujets abordés, ou encore ces acteurs et actrices que je découvre, je ne regrette finalement pas de m’y être arrêté.

Note : 12/20

Par Cinéted

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