Titre Original : 10 000 B.C.
De : Roland Emmerich
Avec Steven Strait, Camilla Belle, Cliff Curtis, Joel Virgel
Année : 2008
Pays : Etats-Unis, Afrique du Sud
Genre : Aventure
Résumé :
10 000 ans avant notre ère, au coeur des montagnes… Le jeune chasseur D’Leh aime d’amour tendre la belle Evolet, une orpheline que sa tribu recueillit quelques années plus tôt. Lorsque celle-ci est enlevée par une bande de pillards, D’Leh se lance à sa rescousse à la tête d’une poignée de chasseurs de mammouths. Le groupe, franchissant pour la première fois les limites de son territoire, entame un long périple à travers des terres infestées de monstres, et découvre des civilisations dont il ne soupçonnait pas l’existence. Au fil de ces rencontres, d’autres tribus, spoliées et asservies, se joignent à D’Leh et ses hommes, finissant par constituer une petite armée.
Au terme de leur voyage, D’Leh et les siens découvrent un empire inconnu, hérissé d’immenses pyramides dédiées à un dieu vivant, tyrannique et sanguinaire. Le jeune chasseur comprend alors que sa mission n’est pas seulement de sauver Evolet, mais la civilisation tout entière…
Avis :
Très solidement installé à Hollywood depuis le début des années 90, Roland Emmerich est le réalisateur allemand le plus américanisé qui soit. Et en bon cinéaste américanisé, il s’est jeté corps et âme dans le film de divertissement. Des films qui, on le sait, sont tous plus démesurés les uns que les autres, et bien souvent, dans ses films, l’Amérique en prend plein la tronche, pour preuve, des films comme « Independence Day« , « Godzilla » ou encore « Le jour d’après« . Les années 2000 ont plutôt bien commencé pour Roland Emmerich qui, avec « The Patriot » et « Le jour d’après« , vient de s’offrir deux jolis scores au box-office et au-delà de ça, il a surtout réalisé deux films très sympas.
Quatre ans après « Le jour d’après » et son dérèglement climatique, Roland Emmerich change d’époque, et s’aventure dans un film qui, s’il est intéressant sur le papier, demeure une étrangeté, doublé d’un sacré navet. Voulant encore une fois offrir du grand spectacle, posant sa caméra en pleine préhistoire (enfin…), « 10 000 » est un film qui, au lieu de divertir, laisse place à la sidération, et d’où l’on tourne notre regard dans ce projet, force est de constater que rien ne fonctionne, rien ne marche et au-delà de ça, on n’y croit pas une seule seconde. Bref, Roland Emmerich s’est pris les deux pieds dans un câble qui traînait sur le plateau et dans sa chute, il a emmené tout le monde.
Il y a très longtemps de cela, dans la montagne enneigée habite la tribu des Yagal. La vieille mère du village, à l’arrivée d’une jeune orpheline aux yeux bleus, découvre une prophétie. Cette dernière dit que lorsque viendra la dernière chasse du Manac, le nouveau chef de la tribu sera élu, de par son courage. Ce chef épousera la jeune orpheline, c’est alors que viendront les démons à quatre pattes, et ces démons enlèveront des membres des Yagals…
Sur le papier, « 10 000 » est un film qui pouvait donner envie, car il s’aventure dans une époque assez peu mise en images au cinéma, la préhistoire (enfin…) et l’idée que ce soit Emmerich qui mette en scène cette époque-là, donnait plutôt envie, car Emmerich, du point de vue du spectacle et du divertissement, a un joli savoir-faire et de manière générale, je dois bien avouer que j’ai un petit faible pour le cinéma du réalisateur. Mais voilà, une fois passé ça, il n’y a rien qui va ici. On peut même dire qu’il est difficile de savoir par où commencer tant d’où que l’on tourne notre regard, « 10 000 » nous laisse sur le carreau. C’est même à croire que toutes les mauvaises décisions ont été prises en même temps, pour nous entraîner là-dedans. On peut même se demander qui a osé valider ça. Bref.
Pourtant, le film de Roland Emmerich avait plutôt bien commencé, avec une bonne ambiance et une chasse au mammouth qui, si elle a pris un sacré coup de vieux, dégageait quelque chose de plaisant. On pourrait aller plus loin en disant que globalement, tout ce qui se passe en période de préhistoire est plutôt sympathique à suivre. Mais ça n’aura pas duré, car une fois les démons à quatre pattes arrivés, « 10 000 » part totalement en vrille. Dans son scénario, Emmerich tenait une idée intéressante, celle qui, au travers d’une « mission » de sauvetage, voit évoluer les civilisations (pourquoi pas, j’ai envie de lui laisser le fait d’avoir tenté ça). Cette évolution fait alors passer l’intrigue d’une tribu préhistorique à la construction des pyramides d’Egypte, avec au passage un tour chez les Massaïs.
Ainsi, au départ, il y a du « oui » dans ce film, mais, au final, plus le scénario de « 10 000 » se dévoile et plus ce « oui » véhicule ses débilités, ses n’importe quoi et il se transforme en un beau et grand « non » qui peut faire rigoler. Franchement, le scénario, c’est du très grand n’importe quoi qui n’a aucun sens. « 10 000 » ose tout, avec une histoire d’amour ridicule, avec des rencontres improbables, avec des méchants qui asservissent les populations qui viennent de très loin pour construire une pyramide pour un dieu vivant entouré de bouddhistes… Oui, oui, c’est vrai, « 10 000 » ose ça. Et le tout est servi par une narration qui donne autant envie de rire que de pleurer, voire même les deux en même temps, avec ses voix off qui se veulent imposantes, mais qui sonnent plates au possible. Bref, Emmerich, ses scénaristes et ses acteurs se prennent terriblement au sérieux, mais cette grande aventure à travers les âges et les terres, nous laisse catastrophée. Le récit mélange tout sans aucune cohérence, persuadé que ces prophéties (car il y en a plusieurs) vont faire l’affaire, or ça ne marche pas, et malgré le rythme effréné du film, on finit par s’ennuyer grandement.
Dans cette affaire, le film nous offre aussi des personnages risibles, auxquels on ne croit pas une seule seconde. D’ailleurs, on n’est pas sûr que les acteurs y croient vraiment eux aussi. Franchement, entre les gueules de méchants pour faire des méchants, et les héros bien trop lisses et beaux pour incarner des hommes de la préhistoire, plus ce film avance, et plus il est compliqué de lui donner du crédit.
Du côté de la réalisation, là encore, ça ne marche pas. Comme je le disais, c’est dommage, car le film tient une belle ouverture, mais ça s’arrête là, car le reste est une catastrophe. « 10 000« , c’est un rythme effréné, et pourtant, rien n’y fait, rien n’est surprenant (hormis cette histoire qui part à vau-l’eau) et l’on s’ennuie grandement. De plus, le film a pris une immense tarte dans la tronche, avec ses bébêtes numériques qui sont laides. D’ailleurs, tout ce qui est numérique dans ce film laisse à désirer. Enfin, pour ceux qui ont envie de crocs, sachez alors que son affiche (qui donne sacrément envie) est un mensonge terrible, car sur deux heures de film, ce tigre aux dents de sabre apparaît très clairement une minute, et encore, on n’est pas sûr de la minute pleine de présence.
« 10 000 » est donc dans son récit, son idée et son visuel, une expérience des plus étranges. Il y avait matière pour faire un film intéressant, et ça, même avec cette idée saugrenue, mais rien n’y aura fait, plus « 10 000 » avance et plus il se fait ridicule et risible. Dans les mauvais Emmerich, dans les navets ou les déceptions, « 10 000 » peut prétendre à cocher la case du nanar (tu me diras dans une filmographie, il en fallait bien un…).
Note : 06/20
Par Cinéted