avril 20, 2024

Ju Dou

De : Zhang Yimou et Fengliang Yang

Avec Gong Li, Baotian Li, Li Wei, Zhang Yi

Année : 1991

Pays : Chine, Japon

Genre : Drame, Romance

Résumé :

Dans la Chine rurale des années 1920, Ju Dou est achetée par Yang Jin-shan, le vieux propriétaire d’une teinturerie qui rêve d’avoir un héritier mâle. Parce qu’elle tente de résister à ses assauts, la jeune femme subit régulièrement les déchaînements de violence de son mari. Elle se réfugie dans les bras du neveu de ce dernier, qui vit sous le même toit et essuie également les brimades du vieil homme.

Avis :

Réalisateur phare de ce que l’on appelle la cinquième génération, Zhang Yimou s’est imposé dès son premier film, le superbe « Le Sorgho Rouge« , qui décrochera d’ailleurs l’Ours d’Or du festival de Berlin. Dès lors, Zhang Yimou a le champ libre chez lui. Sans perdre de temps, il se relance dans une réalisation, et après la Chine des années 30, Zhang Yimou va changer de style et s’essaie au thriller avec le confidentiel « Code Name : Cougar » (qui demeure encore et toujours inédit chez nous).

On dit souvent que le troisième film est décisif dans la carrière d’un cinéaste et Zhang Yimou passe ce cap avec assurance et beauté, imposant avec « Ju Dou » un drame cruel qui peint la vie d’une femme opprimée dans une société d’hommes. Tenu par une magnifique et intense Gong Li, parcouru par une mise en scène d’une très grande beauté, Zhang Yimou fait de « Ju Dou » un drame Shakespearien qui installe définitivement son réalisateur dans le paysage du cinéma Chinois et au-delà de ça, comme un très grand réalisateur.

Chine, dans les années 20, Ju Dou est achetée par un vieux propriétaire de teinturerie. L’homme n’a qu’un souhait, avoir un héritier mâle pour perpétrer sa lignée. Ju Dou est maltraitée par le vieil homme, qui ne lui épargne rien. Dans cette maison, le vieil homme habite avec son neveu et le jeune homme est fasciné par la jeune femme. Peu à peu, une attirance naît et une histoire d’amour commence. Mais comment faire pour vivre cette histoire ?

Superbe, magnifique, beau, dur, injuste, cruel, « Ju Dou« , le troisième film de Zhang Yimou fait partie de ces films qui dégagent irrémédiablement quelque chose qui impacte le spectateur. Quelque chose qui poursuit même son spectateur à la sortie de la séance, tant l’histoire de ces amants maudits dans ce petit village perdu quelque part en Chine est touchante.

« Ju Dou« , c’est dans ses grandes lignes, une histoire assez clichée, Zhang Yimou nous parlant d’une femme maltraitée qui se jette dans les bras d’un amant pour fuir l’horreur de sa vie et trouver un peu de réconfort. Ce genre d’intrigue, on l’a déjà vu, mais ce qui fait la force du film de Zhang Yimou, c’est tout ce que le metteur en scène va mettre autour. C’est tout ce qu’il va laisser transparaître de la Chine de cette époque-là, de cette société patriarcale, des traditions, des non-dits et des jugements. Zhang Yimou tient son intrigue jusqu’au bout de cette dernière et mieux encore, il nous surprend, livrant un récit qui est à des lieues de ce que l’on aurait pu s’imaginer. En déroulant son histoire d’amour sur une dizaine d’années, en ne cessant de renouveler l’histoire de ces amants maudits, « Ju Dou » a tout d’un grand drame Shakespearien. Cette histoire nous touche aussi profondément qu’elle nous tient en haleine, ne sachant où et comment ces personnages vont bien pouvoir s’en sortir et surtout si oui ou non, ils vont pouvoir vivre, simplement et amoureusement. Bref, cette intrigue est sublime, tristement, durement et cette dernière est renforcée par une mise en scène des plus somptueuses.

« Ju Dou« , c’est un film qui dégage dès ses premières images une ambiance, une chaleur, une luminosité. Avec « Ju Dou« , Zhang Yimou travaille énormément sur les couleurs et les intérieurs. Sa photographie est brillante, et laisse installer quelque chose de très chaleureux, qui va contraster avec les drames et l’horreur de la vie de son héroïne. Zhang Yimou travaille énormément sur les cadres, faisant de chacun de ses plans un tableau superbe, puis plus loin encore, Zhang Yimou travaille beaucoup les textures, les matières, les tissus, le bassin de teinte, le séchage, ce qui donne à son film quelque chose d’intéressant à regarder, lui offrant presque de la poésie. On sent vraiment que le cinéaste prend plaisir à filmer aussi bien ses amants et leur histoire, que la teinturerie, qui va être le témoin de cette histoire d’amour interdite.

Avec « Ju Dou« , Zhang Yimou refait appel à celle qui sera sa muse (et son épouse) dans la première partie de sa carrière, la magnifique et talentueuse Gong Li. Zhang Yimou en fait une star et il ne fait nul doute que le rôle de Ju Dou a dû y contribuer tant Gong Li illumine le film dans chacun de ses plans. Incroyable, puissante, bouleversante, le rôle de cette femme martyrisée qui essaie comme elle peut de vivre, fait partie des meilleurs rôles qu’elle ait tenu et une fois vu, sa romance, son histoire d’amour avec Baotian Li (puissant lui aussi) est inoubliable. À noter le rôle effroyable tenu par Li Wei, qui en vieux propriétaire de teinturerie et surtout bourreau de son épouse est difficilement supportable.

« Ju Dou » est donc une grande œuvre. Film magnifique, étonnant, puissant et intense, « Ju Dou » est aussi cruel, que beau et intime dans son histoire d’amour. Tenu par un couple de cinéma magique, Gong Li et Baotian Li, « Ju Dou » est tout simplement inoubliable et avec ce film, Maitre Yimou s’installe définitivement dans le paysage du cinéma chinois, mais en plus de ça, il pose encore plus les bases du cinéma qu’il va explorer dans les années 90.

Note : 17/20

Par Cinéted

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