Avis :
Que c’est compliqué le monde du métal quand on déboule de nulle part et que l’on n’a pas forcément d’alliés ou de pistons. Combien de groupes s’essayent à la musique, puis arrêtent rapidement pour ne jouer que dans des garages afin de se sentir un peu vivant ? Combien de groupes tentent de sortir de l’anonymat, se tapent des tremplins gérés par des types qui ne pensent que brouzouf et sombrent aussi dans l’oubli ? Combien de groupes ont tenté de percer avec un album auto-produit, espérant, en vain que le succès arrive, comptant alors sur le partage et les réseaux sociaux ? Car c’est un peu ce qui arrive à Inerzia, groupe de métal espagnol qui a sorti en 2017 son premier album, Siete Cruces. Un album auto-produit, sorti dans l’indifférence générale et qui n’a pas permis au groupe d’avoir ne serait-ce qu’un peu de renommée dans le milieu fermé du Thrash. Mais à l’écoute de ce premier effort ambitieux, car il dépasse les 55 minutes d’écoute, on peut aisément comprendre pourquoi le groupe n’a pas fait plus parler de lui. Il montre ici toutes les limites de l’auto-production, avec un enregistrement faiblard, une voix qui ne percute pas assez et des rythmiques parfois saccadées. Bref, on est très loin du chef-d’œuvre.
Le skeud débute avec Superbia et dès les premières notes, on sent qu’il y a un truc qui cloche. Ce n’est pas dans la prestation technique, bien que celle-ci soit sans éclat, mais c’est surtout sur l’enregistrement en lui-même. On sent que ça a été fait dans un garage et non en studio. Le morceau résonne, la saturation est bien trop forte et cela entache grandement l’écoute. Mais ce n’est pas le seul défaut du titre. En effet, si les riffs au départ sont bons, ils déclinent au fur et à mesure du titre, au point de devenir transparent durant le refrain. Et l’autre déception provient clairement de la voix du chanteur et de la langue espagnole. Si le timbre est granuleux, on voit vite les limites du chanteur et l’utilisation de la langue espagnole dans ce style de Thrash ne fonctionne absolument pas. Mi Peor Enemigo démarre un peu mieux d’un point de vue rythmique. On s’éloigne grandement du thrash pour partir vers un Hard Rock plus classique, malgré un break qui donne fortement envie de headbanger mais qui ne reste pas dans le temps, ce qui est dommage. Pobreza de Poder est un titre qui manque d’à peu près tout ce qu’il faut pour faire un bon titre rock ou métal. Mou, sans génie, fainéant dans sa construction, le titre manque d’envergure, mais surtout d’une volonté de taper fort. Là, c’est trop gentil. Siete Cruces s’égare sur le chemin d’un mélange douteux entre Heavy et des pincées de Doom et si les couplets sont bien et plein d’énergie, l’ensemble se perd à cause d’une voix qui ne sonne jamais juste. Fort heureusement, Despierta !!! vient démontrer que Inerzia n’est pas un mauvais groupe qui n’est bon quà chanter dans les bars. Entièrement instrumental, le morceau est vraiment bon, maitrisé, technique et donne envie de se briser la nuque sur certains passages.
Malheureusement, le groupe retombe vite dans ses travers avec Cuando Amanece, une sorte de ballade qui a du mal à décoller et qui ne parviendra jamais à nous toucher. La faute, bien évidemment, à une production hasardeuse, mais aussi et surtout à un chanteur qui peine à faire ressentir des choses. Comme quoi, chanter juste dans le métal est une chose très importante. Fénix, del Cielo al Averno tente d’apporter une petite introduction et une touche que l’on pourrait presque trouver indienne (d’Amérique), mais très vite, le groupe se lance dans un semblant de Hard un peu fainéant avec constamment le même problème, ce chant granuleux qui ne peut pousser et qui manque d’ampleur. De ce fait, on ne ressent rien et on attend patiemment que quelque chose se passe. La Cicatriz part dans le même délire avec, en prime, une batterie hésitante qui enchaine les fausses notes et un riff dégueulasse, lourd, saturé, mou et sans aucune volonté de taper dans les tympans. Thalion est un morceau plutôt intéressant dans sa construction et dans sa démarche. Plus complexe que les autres titres, variant les rythmiques pour mieux nous toucher, Inerzia semble trouver un équilibre avec ce titre. Mais cela n’enlève rien au problème du chant… Sin Mirar Atras promet de gros riffs bien sales et c’est un peu le cas, dévoilant le titre le plus métal de l’album. Malheureusement, il reste à l’état végétatif du début à la fin, ne parvenant pas à soulever les foules. Enfin, Soy Lo Que Ves clôture l’album de la même façon que tout le reste, de façon presque sympathique, mais qui manque d’un peu de tout pour rendre l’ensemble vraiment écoutable.
Au final, Siete Cruces, le premier album d’Inerzia, est un semi-ratage comme il peut promettre de jolies choses pour l’avenir. Produit avec le cul, mixé par un manchot, le groupe espagnol n’a pas su bien s’entourer pour faire ce premier album qui a tous les atours d’un projet artisanal un peu foireux et fleure bon la peinture à papa qui se trouve dans son garage. C’est dommage, on entend bien que les musiciens ne sont pas des manches et que les influences sont bien là, mais ce n’est pas suffisant pour nous emporter complètement…
- Superbia
- Mi Peor Enemigo
- Pobreza de Poder
- Siete Cruces
- Despierta !!!
- Cuando Amanece
- Fénix, del Cielo al Averno
- La Cicatriz
- Thalion
- Sin Mirar Atras
- Soy Lo Que Ves
Note : 10/20
Par AqME