Titre Original : Judgement at Nuremberg
De : Stanley Kramer
Avec Spencer Tracy, Marlene Dietrich, Richard Widmark, Burt Lancaster
Année: 1961
Pays: Etats-Unis
Genre: Drame Historique
Résumé :
En 1948, le juge Haywood est envoyé à Nuremberg pour présider le procès de quatre magistrats allemands accusés de trop de complaisance à l’égard du régime Nazi. L’un d’eux, Janning, se renferme dans un silence méprisant et, en écartant les témoignages et les films sur les camps de concentration, dit qu’il n’a fait qu’appliquer la loi en vigueur…
Avis :
Stanley Kramer est de ces réalisateurs dont l’histoire du cinéma a retenu plus les films que le nom et c’est bien dommage, car quand on jette un œil à sa filmographie, on découvre un auteur important. Un auteur qui avait une logique, un but et surtout un auteur qui voulait faire bouger les choses et les mentalités en mettant le doigt sur des sujets brûlants qui trouvent encore des résonnances aujourd’hui.
Après un bon début de carrière dans les années 50, Stanley Kramer ouvre les années 60 avec deux films à procès. En 1960, ce sera « Un procès de singe » et en 1961 « Jugement à Nuremberg« , film fleuve de plus de trois heures qui va reconstituer une partie du procès des magistrats du troisième Reich, quelques années après la fin de la guerre. Monument du septième art, chef-d’œuvre de mise en scène, pamphlet sur la justice et surtout réflexion incroyable sur le degré de culpabilité, d’un homme, d’une civilisation et au-delà de ça, du monde, Stanley Kramer livre-là un film tout simplement incroyable !
1948, le juge Haywood, un juge à la retraite, est envoyé à Nuremberg pour présider le procès de quatre hauts magistrats du régime d’Hitler. Sur le banc des accusés se trouve l’ancien juge Ernest Janning et ce dernier se terre dans un silence qui laisse transparaître tout le mépris qu’il peut avoir envers le magistrat et cette justice, qu’il juge inadaptée. Ce procès doit démontrer ou non si les quatre magistrats réunis sont responsables de leurs actes, alors que les dits actes, aussi cruels soient-ils, étaient en accord avec les lois du troisième Reich.
Le film de procès, c’est tout un art, et il peut se révéler être un exercice bien plus complexe qu’il n’y paraît, car plusieurs pièges peuvent se dresser sur sa route. On peut tomber dans un film qu’on connaît par cœur. On peut tomber sur un film qui s’enlise et n’arrive pas vraiment à se rendre captivant ou même intéressant, surtout quand on tombe comme ici, sur une œuvre de trois heures. On peut aussi tomber dans la caricature du procès à rebondissement. Ou encore, on peut tomber sur un film qui finalement se trouverait être un téléfilm, comme on en voit toujours sur TF1, le dimanche après-midi. Heureusement, il n’en sera rien et Stanley Kramer évite tous les pièges pour nous offrir un métrage aussi incroyable qu’il est riche et profond.
« Jugement à Nuremberg« , c’est un film fleuve de trois heures où l’on va peu de fois sortir de la salle d’audience et pourtant, malgré sa durée, jamais le film de Stanley Kramer se fait long, ou ne s’arrête sur des éléments qui trouvent peu d’importance. Non ici, tout est cohérent, logique et surtout pertinent. « Jugement à Nuremberg« , c’est une leçon d’écriture, alors même que l’on pourrait reprocher au film d’être classique. Parfaitement dialogué, parfaitement tenu et maîtrisé, au fur et à mesure que son intrigue évolue, Stanley Kramer rend son film aussi palpitant qu’intéressant. « Jugement à Nuremberg« , plus que de recréer le procès de l’époque, c’est un film qui s’arrête sur des sujets précis et il les développe le plus possible. Qu’est-ce qui fait qu’un homme est coupable ? Les dirigeants nazis, qui répondaient aux lois du troisième Reich, ont-ils outrepasser les lois ? Peuvent-ils être jugés coupables, quand les lois même étaient alors de leur côté et appliquées ? Puis au-delà de ces sujets très forts, voire très durs, « Jugement à Nuremberg » pose la question de la culpabilité et des regrets ou non. Puis plus loin encore, face à la montée du nazisme et l’inaction du reste du monde, voire parfois des collaborations ou des validations, le monde entier peut-il être tenu responsable de ce qui s’est passé ? Stanley Kramer, dans la plus élégante des mises en scène, passe tous ses sujets, et tellement plus encore, au crible, il livre un très grand film sur la justice, sur la notion de justice. Un film au final bouleversant et avec une morale nécessaire. Bref, c’est passionnant et passionné de bout en bout !
Si le fond est poignant, la forme l’est tout autant. Chef-d’œuvre de mise en scène et de montage, « Jugement à Nuremberg« , c’est le film qu’on ne voit pas assez tant Kramer sait parfaitement comment créer un intérêt à chaque instant et rendre importantes toutes ses scènes. Armé d’une caméra, toute en apesanteur, les scènes d’audiences sont folles et font assurément partie ce que l’on a vu de mieux dans le genre. Stanley Kramer passe d’un personnage à l’autre, d’une émotion à une autre avec une aisance et une fluidité dingue. On reste scotché devant tant de talent et alors que le film approche de ses soixante ans, il n’a pas pris une ride.
Enfin, que dire de ce casting, si ce n’est citer tous ces acteurs réunis qui livrent, petits et grands rôles, des performances de très hautes volées. En trois heures défileront, Spencer Tracy, Burt Lancaster (MAGISTRAL !), Richard Widmark, Maximilian Schell, Marlene Dietrich, Montgomery Clift, Judy Garland, William Shatner…
« Jugement à Nuremberg » est un sacré morceau de cinéma. Classique du cinéma américain, chef-d’œuvre incontournable, drame puissant, historique et nécessaire. Pamphlet pour la justice, réflexion incroyable sur la notion de cette dernière et sur la responsabilité des actes d’une nation… À bien des arguments, des choix et des scènes, « Jugement à Nuremberg » se pose comme l’un des plus grands films de son réalisateur, si ce n’est le plus grand ! Bref, obligatoire !
Note : 20/20
Par Cinéted