Avis :
Qu’attendre d’un groupe mythique comme Rammstein après dix ans d’attente ? C’est une question totalement légitime que l’on peut se poser tant le groupe avait fait un quasi silence radio et ne proposait rien de nouveau à l’horizon. Fin d’un groupe mythique, fatigue global de tout le groupe ? Peut-être, mais ce que l’on sait, c’est que deux des membres n’ont pas chômé, puisque Richard Z. Kruspe, le guitariste, a monté son propre groupe avec Emigrate, et Till Lindemann, le frontman et chanteur, a sorti un album solo. Si pour ce dernier, son album ressemblait un peu trop à du Rammstein mou du genou, avec Emigrate, Kruspe se fourvoyait complètement dans un pseudo hard rock presque FM sans grand ambition. Quoiqu’il en soit, les deux têtes pensantes du groupe n’étaient pas encore à faire un septième album pour le groupe allemand ayant vendu le plus de disque au monde tout en gardant leur langue maternelle. C’est alors que déboule un album éponyme dix ans après le moyen Liebe ist für Alle Da, laissant espérer aux fans de la première heure un retour en force des rois du métal industriel. Qu’en est-il vraiment ? Rammstein frappe-t-il fort ou se repose-t-il sur ses lauriers ? Ou, hérésie pour les aficionados, la formation change-t-elle de style ? Verdict.
Le skeud débute avec le premier hit du groupe, à savoir Deutschland. Accompagné d’un clip sublime et sulfureux, le groupe a rapidement fait parler de lui, et c’est ainsi que le buzz est né. Cependant, le morceau est une pure réussite, dans tous les sens du terme. C’est grandiloquent, les riffs sont inspirés, la production est tout juste incroyable et globalement le morceau possède une réelle aura fédératrice. C’est puissant, beau, touchant et ça synthétise tout ce que l’on peut attendre d’un groupe aussi mythique que Rammstein. Comme entame d’album, on peut difficilement faire mieux. Directement derrière arrive Radio, le titre qui a le plus divisé les fans. En effet, le clavier est mis à l’honneur, la rythmique est relevée mais demeure très classique et il s’agira du titre le plus mercantile de tout l’effort. Néanmoins, après plusieurs écoutes, le morceau se révèle plus intéressant qu’il n’y parait et les riffs sont tout de même bien saisissant, tout en reconnaissant au premier coup d’oreille la patte du groupe. Le plus surprenant viendra par la suite avec Zeig Dich. Le titre commence avec des chœurs féminins dans une sorte de mélopée classique, faisant irrémédiablement penser à un chœur de messe. Bien rapidement, le groupe se recentre sur ce qu’il sait faire de mieux, de gros riffs puissants, un refrain ultra efficaces et même une montée crescendo dans la grandiloquence, terminant le titre avec les chœurs, les riffs, la voix du chanteur, un joli melting pot qui donne une grosse envergure au titre. On sera plus dubitatif sur Ausländer qui pour le coup mélange deux genres presque antinomiques, l’eurodance et le métal. Si c’est très entrainant grâce à un rythme endiablé, le mélange des deux genres surprend et s’avère un poil trop pop pour convaincre totalement. Il faut par contre saluer la prise de risque du groupe qui laisse vraiment beaucoup de place aux claviers de Christian Lorenz. Avec Sex, le groupe revient à quelque chose de plus pur, de plus Heavy dans la façon de faire, et même si ça reste plus sage qu’à l’accoutumée, le titre est très réussi et le pont, avec le solo, est très puissant.
Cependant, c’est avec Puppe que le groupe retrouve sa vraie verve d’antan. Commençant tout doucement, à la manière d’une ballade, l’ambiance demeure malsaine et pesante durant tout le début du titre. Puis d’un coup tout s’emballe, la machine se met en branle, Till se lâche complètement sur le chant, brisant même sa voix par moment, et on se retrouve face à un titre maladif, puissant, qui montre que le monstre Rammstein n’est pas à cours d’idées et peut proposer des moments de grâce comme celui-ci. Derrière, le groupe enchaine avec Was ich Liebe, un morceau relativement intéressant, très classique dans sa construction, qui ferait presque office de bouche-trou dans l’album, mais qui fonctionne malgré tout, que ce soit grâce aux gimmicks de la formation, ou sa montée crescendo vers quelque chose de lourd et qui correspond encore une fois au groupe. Oui, c’est plus calme, plus commercial, mais ça marche et il y a toujours ce côté fédérateur dans le refrain qui donne envie d’hocher la tête. Avec Diamant, le groupe lâche la ballade de l’album. C’est doux, c’est tendre, c’est d’une beauté qui transcende et même la langue n’est plus une barrière tant c’est touchant. On ressent une vraie émotion dans ce titre, qui touche au plus profond et qui, malheureusement, n’est pas assez long, ne dépassant pas les deux minutes trente. Derrière ce tendre moment, on se retrouve avec les claviers aériens de Weit Weg, un titre qui marque beaucoup moins, un peu à la manière de Was ich Liebe, mais qui pourtant, fonctionne sur l’instant et laisse une bonne impression. Sur Tattoo, les claviers sont remisés au placard et ce sont les guitares qui reprennent leur droit pour un moment puissant, bien lourd et qui fait headbanger d’entrée de jeu pour ne plus jamais s’arrêter. Un morceau qui fait penser au début du groupe et ça fait un bien fou. Enfin, avec Hallomann, Rammstein clôture son album de façon correcte avec un titre à l’ambiance malsaine, plutôt calme au départ, mais qui monte petit à petit pour devenir un gros moment métal indus en puissance.
Au final, Rammstein, le dernier album de Rammstein, est plutôt une bonne surprise. Si certains fans se disent très déçus par la prolifération des claviers et son aspect un peu trop gentillet et moins marquant, le groupe teuton évolue et propose une version un peu plus calme, mais qui a des choses à dire et qui n’en oublie pas pour autant son public. A la fois nerveux, touchant et parfois plus mercantile, Rammstein joue avec les codes qu’on lui connait pour sortir un septième effort qui marquera peut-être moins que les précédents mais qui possède son aura, sa propre identité. Et de toute façon, un Rammstein, même un peu moins bien, reste bien au-dessus du panier de nombreux autres groupes de métal contemporains.
- Deutschland
- Radio
- Zeig Dich
- Ausländer
- Sex
- Puppe
- Was ich Liebe
- Diamant
- Weit Weg
- Tattoo
- Hallomann
Note : 16/20
Par AqME