Titre Original : The Portrait of a Lady
De: Jane Campion
Avec Nicole Kidman, John Malkovich, Shelley Duvall, Martin Donovan
Année: 1996
Pays: Etats-Unis, Angleterre
Genre: Drame, Romance
Résumé :
A la fin des années 1800, Isabel Archer, jeune Américaine en visite chez ses cousins anglais, choque son entourage par son esprit libre et aventureux. Son cousin Ralph, phtisique incurable, l’aime en secret. Elle part à Florence où une amie la jette dans les bras de son amant, Gilbert Osmond. Isabel l’épouse. Quelques années plus tard, elle découvre qu’elle a été manipulée. Elle affronte son mari et retourne auprès de Ralph, qui lui avoue son amour sur son lit de mort.
Avis :
Cinéaste néo-zélandaise, Jane Campion est l’une des réalisatrices contemporaines les plus importantes. Tournant assez peu, mais toujours de manière cohérente, depuis la fin des années 80, elle s’est bâti une filmographie admirable, qui a trouvé un sommet en 1993, avec le chef d’œuvre « La leçon de piano« , film qui s’est vu récompenser de la Palme d’Or au festival de Cannes. Jane Campion reste à ce jour la seule femme à avoir remporté une Palme d’Or. Trois ans après avoir été Palmée, Jane Campion est de retour sur les grands écrans avec « Portrait de femme« , un film historique porté cette fois-ci par une Nicole Kidman grandissante.
Sublime, fascinant et mélancolique, ce quatrième film pour Jane Campion est un petit bijou de destin. Avec ce film, Jane Campion s’attarde aussi bien dans un film romantique que dans un drame social, qui décrit la place, ou plutôt le rang, des femmes dans la société de la fin des années 1800. Et alors que le film a fêté ses vingt-deux ans d’existence, il n’a pas pris une ride et l’on en ressort toujours autant touché et conquis. Bref, l’un des plus beaux films de la réalisatrice.
Isabel Archer est une jeune Américaine qui est en visite dans sa famille sur le vieux continent. Très vite, la jeune femme se fait très apprécier par la société de l’époque. Isabel noue de jolis liens avec son cousin Ralph Touchett. Quand son oncle, le vieux Mr Touchett, meurt, il lui laisse une petite fortune. Isabel, qui est du genre aventureuse, part alors rejoindre son cousin qui est parti pour quelques temps à Florence. Accompagnée de son amie, Mrs Merle, elle fait la connaissance de Gilbert Osmond, un homme très intéressé, mais ça, la jeune femme ne le sait pas encore…
Bienvenue dans l’Angleterre de la fin du XIXe siècle. Bienvenue dans un monde strict, austère, fermé, réglé. Partant d’une intrigue pour le moins classique, qui parfois, sur certains de ses aspects, aurait un peu tendance à me rappeler « Les liaisons dangereuses« , Jane Campion offre un film qui est aussi convenu qu’attendu et surtout original. Si l’intrigue est classique, la réalisatrice prend ici le point de vue et l’évolution d’une femme dans ce monde-là. Une femme différente qui ne rentre pas forcément dans les cases préconçues de cette société et c’est ce qui fait toute la saveur et la beauté de ce « Portrait de femme« . D’ailleurs, si l’on y regarde de plus près, hormis quelques rôles masculins tous très bons (Martin Donovan, John Malkovitch, Viggo Mortensen, Richard E. Grant, Christian Bale), « Portrait de femme » aurait très bien pu avoir un S dans son titre, tant tous les portraits de femmes (à l’image de sa sublime scène d’ouverture) y sont décrits et menés avec talent.
Ainsi, le film va peindre plusieurs portraits à plusieurs échelles. Plusieurs portraits qui vont être aussi sublimes qu’ils sont magnifiques et troublants. Premièrement, il y a le personnage incarné par une divine Nicole Kidman qui après le rôle déluré et génial de « Prête à tout », nous montre un autre visage. Le rôle d’Isabel Archer est beau, très riche, très nuancé. Nicole Kidman est passionnante, logeant son personnage quelque part entre le romantisme, l’assurance, le drame et la naïveté. Il y a quelque chose chez cette femme, dans le regard qu’elle porte sur le monde qui l’entoure, sur la bienséance et la frustration que cette société bien trop réglée offre, qui nous bouleverse. L’intrigue évolue sur facilement une bonne dizaine d’années, mais elle aurait pu tenir sur une vie entière, tant la cinéaste et son actrice ont su captiver notre attention et finalement, les deux heures vingt que dure « Portrait de femme » nous paraissent bien trop courtes.
Si les hommes évoluent autour d’elle et sont tous excellents que ce soit dans l’écriture des rôles, que dans les comédiens qui les incarnent, j’ai plus envie de m’attarder sur les autres « Portrait de femme » que le film nous offre. Ainsi, dans cette histoire, on trouve un rôle des plus troublants. Un rôle tenu par une Barbara Hershey incroyable qui crève l’écran. Une Barbara Hershey très justement Oscarisée. Si Isabel Archer est douce et naïve, Mrs Merle est tout son contraire et elle en est aussi passionnante que la première. Passionnante dans sa force, dans son envie de s’élever, dans son jeu de manipulation et dans toutes les révélations que ce sublime scénario lui réserve. On retiendra aussi dans les femmes qui gravitent ici, des rôles intéressants et beaux pour Shelley Duvall, Mary-Louise Parker ou encore la grande Shelley Winters.
Vous l’aurez compris, scénaristiquement parlant et dans son interprétation, « Portrait de femme » est aussi beau que passionnant, et ce constat ne s’arrête pas là, puisque le film est tout aussi superbe dans son esthétisme. La mise en scène de Jane Campion est magnifique. « Portrait de femme« , c’est une œuvre d’art qui dans un sens est peut-être plus beau à regarder que sa « … leçon de piano« . Chaque plan est un tableau qui nous émerveille la rétine. Le film tient aussi de très beaux moments de grâce où la réalisatrice arrive à faire passer énormément de choses avec peu d’éléments. Là, comme ça, on pense d’emblée à la caresse d’une joie, capable de créer le plus grand des désirs. Franchement, ce film est tout autant éligible à une Palme d’Or que le précédent !
« Portrait de femme » est donc un bijou. Un bijou de parcours, d’émotion, d’interprétation et de mise en scène. Jane Campion tutoie le chef-d’œuvre. « Portrait de femme » est beau, tendu, naïf, dur, manipulateur, et ce scénario est tout simplement passionnant. Bref, c’est une très belle et très grande réussite.
Note : 17/20
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Par Cinéted