Titre Original : The Kiss of the Vampire
De: Don Sharp
Avec Noel Willman, Clifford Evans, Jennifer Daniels, Edward De Souza
Année : 1962
Pays : Angleterre
Genre : Horreur
Résumé :
Lors de leur voyage de noce, un jeune couple perdu dans un petit village d’Europe centrale accepte l’invitation du mystérieux docteur Ravna dans son château. Ils vont découvrir, lors d’un mémorable bal masqué, que la lugubre demeure abrite une secte vampirique.
Avis :
En 1962, il était déjà complexe de tourner autour du mythe du vampire. Il faut dire qu’entre les films de la Hammer et le Dracula de Tod Browning estampillé Universal, le monstre aux canines acérées avait déjà de beaux restes et il fallait se montrer novateur pour conquérir un public de plus en plus rompu au genre. Et il va s’en dire que si on compte aussi tous les spin-off autour du plus célèbre des suceurs de sang (Le Fils de Dracula, La Fille de Dracula, La Maison de Dracula, etc…), il fallait trouver un axe intéressant pour offrir des idées novatrices. Profitant alors d’un partenariat entre La Hammer et Universal, Don Sharp va signer son premier film en essayant de changer certaines choses autour du vampire pour donner aux spectateurs une autre facette de la créature et de cette malédiction. Arrive alors Le Baiser du Vampire, un métrage gothique mais résolument moderne, prenant le mythe du vampire à contre-pied.
La première chose qui frappe dans ce film, c’est que la plupart des codes sont conservés. On retrouve un jeune couple qui vient de se marier et qui tombe en panne au milieu de nulle part en pleine Europe Centrale. Après quelques rencontres étranges et une météo qui semble capricieuse, le couple se réfugie dans un hôtel où ils sont les seuls clients. Avant d’entamer la rencontre avec la créature, le film va tenter de garder des balises propres au film de genre et aux vampires de la Hammer. Personnages inquiétants et mystérieux, ambiance lugubre en pleine forêt avec un château en hauteur complètement isolé, auberge poussiéreuse et personnel semblant cacher un lourd secret, tout est fait pour que le spectateur sente le danger arriver. Un danger qui fut déjà évoqué lors d’une introduction sanguinolente avec un personnage que l’on pourrait comparer à Van Helsing. Bref, dans son départ, Le Baiser du Vampire est un film très classique qui ne renouvelle en rien les codes du suceur de sang.
On pourrait d’ailleurs croire que l’on voit un film lambda sur les vampires, mais Don Sharp va avoir une petite différence avec ses « héros ». En effet, si le couple de jeunes mariés peut sembler assez naïf, c’est ce qui sauve le film de la morosité. Rarement inquiété, toujours enjoué, le couple voit toujours le bon côté des choses et assume son aspect jovial et positif. En ce sens, on va rapidement se prendre d’affection pour ce couple qui semble uni, heureux et totalement crédible. En créant cette empathie, on va alors voir le danger arriver, dès l’entrée dans le château, avec cette famille bizarre, qui possède tous les atours d’une vieille noblesse mais qui aime la déco et l’aspect un peu rococo. Le fait de présenter des personnages assez crédules rend le film plus angoissant et le climax, lorsque la jeune femme se fait mordre, devient un tournant décisif et l’on sent toute la détresse du mari. C’est là la réelle force du métrage, en plus de proposer une nouveauté au niveau de la créature.
En effet, plutôt que de montrer un simple comte assoiffé de sang et hypnotisant ses victimes, on aura droit à une vraie secte avec un gourou, qui mord ses victimes afin d’engranger de nouveaux fidèles. Le film se montre alors assez malin, réussissant à montrer cela au détour d’une paire de scènes sans en faire des tonnes. La seule déception que l’on peut avoir, c’est que l’acteur prêtant ses traits au vampire n’est pas assez charismatique et manque d’ampleur. On est très loin des compositions de Bela Lugosi ou de Christopher Lee. Mais là encore, le film se rattrape rapidement avec le personnage énigmatique d’un professeur qui tâte de la bouteille et que veut lutter contre les créatures de la nuit. Le film change alors de style, délaissant le film de monstre pour aller vers la sorcellerie. Si cela peut sembler être un retournement assez facile et presque illogique, puisque tout le film suit une logique presque terre à terre, l’ambiance va s’en trouver changée et l’atmosphère va devenir encore plus lugubre. Il est juste dommage que la fin soit si ridicule.
Certes, il faut recontextualiser le film et ne pas oublier que tout cela se déroule en 1962. Mais il y a certaines choses qui sont vraiment flagrantes, comme cette attaque de chauve-souris en plastique. Ce final dénature tout le film et est totalement ringard. Il y a une incompréhension sur les choix esthétiques faits. On voit à l’écran que toutes les chauves-souris sont fausses et que les acteurs surjouent leur mort et de ce fait, plus rien n’est crédible et on pourrait presque croire que l’on est dans un nanar complètement fauché. Il aurait été plus judicieux de montrer les animaux vengeurs de loin, de présenter cette punition divine (ou démoniaque) comme un acte global, plutôt que de forcer le trait en faisant des gros plans sur des animaux en plastique tirés par des ficelles. Bref, c’est dommage car cette fin casse tout l’attrait du film qui, heureusement, demeure fort sympathique.
Au final, Le Baiser du Vampire est un film sur les suceurs de sang, mais qui essaye une approche différente. Nous avions déjà vu le vampirisme vécu comme une malédiction dans La Fille de Dracula, et ici, le réalisateur essaye de présenter cela comme une façon d’échapper à sa solitude et de créer une sorte de secte sataniste. Le film se veut agréable, restant dans les codes du film de vampire, mais essayant de s’en émanciper malgré un final grotesque et complètement raté. Bref, un film intéressant à plus d’un titre.
Note : 14/20
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Par AqME