Auteur : Camille Brissot
Editeur : Syros
Genre : Fantastique
Résumé :
Depuis 2022, les Maisons de départ ressuscitent le morts grâce à des reflets en quatre dimensions qui reproduisent à la perfection le physique, le caractère, et le petit je ne sais quoi qui appartient à chacun. Les visiteurs affluent dans les salons et le parc du manoir Edelweiss, la plus célèbre des Maisons de départ, pour passer du temps avec ceux qu’ils aiment. Daniel a grandi entre ces murs, ses meilleurs amis sont des reflets. Jusqu’à ce qu’il rencontre Violette, une fille imprévisible et lumineuse… Bien vivante.
Avis :
La maison des reflets est un livre étonnant au sujet dur. La mort, la perte d’un être cher ainsi que les différentes façons de gérer ce manque et le deuil, sont tous des sujets au centre de ce roman. L’idée de permettre aux vivants de rester en contact avec leurs morts n’est pas une notion nouvelle ou originale. D’autres œuvres littéraires, et même des films, mettent en avant ce principe. L’humain lutte contre la mort et la fin avec tous les moyens qui sont à sa disposition.
Dans cet univers créé par Camille Brissot, un monde finalement pas très éloigné du nôtre, la technologie est bien avancée et un développeur 3D un peu trop ambitieux a décidé de créer la première maison de départ : un lieu où les vivants pourraient côtoyer des images 4D de leurs morts, des illusions, des fantômes, contrôlés par une IA puissante pouvant reproduire chacun de leurs gestes et de leurs attitudes. Cela permettrait à ceux n’y parvenant pas, de dire au revoir correctement ou de prendre le temps de faire leur deuil. Hérésie, mensonge, stupidité, innovation, miracle ? Chacun se fera son avis sur la question à la lecture de ce roman. Tous les avis y sont présents, chacun représenté par des personnages plus ou moins importants, mais ayant tout de même leur mot à dire.
Daniel est le personnage principal et a pris l’habitude de vivre avec les reflets, ces représentations virtuelles des morts que les familles ont souhaité voir vivre éternellement. Pour lui, ce sont des amis, des camarades qu’il fréquente constamment dès qu’il met ses lentilles spéciales lui permettant de voir la 4D créée par l’intelligence artificielle gérant toute la maison de départ où il vit. On suit Daniel pas à pas et ses journées n’ont finalement rien d’extraordinaire. Il suit des cours avec une professeure particulière, a un père souvent absent car trop absorbé par son travail de faiseur de merveilles, vit avec une mère virtuelle et reste cloîtré dans la maison de départ, tout à la fois effrayé et fasciné par le monde extérieur qu’il ne connaît pas. Son quotidien change quand il fait la rencontre de Violette, une jeune fille qui déborde de joie de vivre et qui n’a rien à voir avec les reflets que le jeune homme connaît.
Le roman n’a rien d’un récit d’aventures et, pourtant, on se sent happés par le quotidien de Daniel. Certains rebondissements du livre sont attendus quand certains sont vraiment bluffants. Le lecteur s’attache aux personnages et à la détresse du héros. L’auteure nous offre ici un roman philosophique qui fait réfléchir et qui nous apporte de multiples pistes à ce propos. Les versions animées par une IA sont-elles finalement de vraies personnes avec une identité propre ? Peut-on vivre avec des illusions et réussir tout de même à faire son deuil ? Nos souvenirs de la personne décédée sont-ils plus ou moins criants de vérité que l’image créée par une IA à partir de données basées sur ces mêmes souvenirs ? L’illusion façonnée est-elle une vraie représentation de la personne décédée ou une coquille vide ? Est-il sain ou malsain de vouloir tromper la mort avec des fantômes ? Autant de questions qui peuvent amener à débattre. Le livre cible clairement les adolescents mais reste plaisant à tout âge, surtout lorsque l’on est sensible et que l’on porte un intérêt au principe et à toutes les questions soulevées par les maisons de départ.
L’écriture est calme, douce et poétique. Rendre un tel roman aussi plaisant quand le thème de la mort est présent dans tous les mots est un travail de qualité qu’il est important de soulever. L’auteure sait décrire les pires sensations avec de belles images et nous apaisent constamment avec succès, choisissant chacun de ses mots avec justesse. Le rythme du livre est si lent que l’on a l’impression de planer. La maison des reflets est une œuvre frôlant l’univers onirique qu’il est agréable de découvrir et qui permet une évasion fantastique.
La couverture est belle et illustre à la perfection le thème de l’ouvrage. Le livre n’est pour autant pas extraordinaire à cause des caractères prévisibles des personnages, des intrigues souvent attendues et de rebondissements quasi absents. On retient surtout la poésie qui se dégage de cette œuvre et nos propres réflexions qui nous poursuivent après la lecture.
Note : 16/20
Par Lildrille