De : Jason Stone
Avec Susan Sarandon, Topher Grace, Donald Sutherland, Ellen Burstyn
Année : 2015
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller
Résumé :
Hazel Micaleff, inspectrice de police, voit son quotidien bouleversé par l’arrivée d’un tueur en série dans sa petite ville tranquille d’Ontario. Aidée de deux inspecteurs, Hazel découvre que le tueur a sévi dans d’autres villes aux alentours. Elle met alors tout en œuvre pour trouver le responsable de ces meurtres.
Avis :
Dans l’univers très fermé du thriller américain mettant en scène un tueur en série, il y a deux écoles. La première, très sombre, très crue, n’hésite pas à montrer des meurtres effroyables pour choquer mais aussi lier son affaire sur thème précis. On retrouve des films comme Seven de David Fincher, le très mauvais Les Cavaliers de l’Apocalypse de Jonas Akerlund ou encore le plus que limite Intraçable avec Diane Lane. La deuxième école est plus subtile, moins gore, et se focalise beaucoup plus sur la psychologie des personnages plutôt que sur les meurtres et sur une ambiance particulière qui favorise un mal-être oppressant. On peut bien évidemment parler de Fargo des frères Coen qui rentre parfaitement dans cette catégorie. Alors bien évidemment, on pourrait croire que le mélange des deux thrillers serait une bonne idée et conviendrait parfaitement à donner un film hybride, à la fois malsain et psychologique, à la fois gore et délétère. Sauf que cela ne sera pas le cas avec The Calling du jeune réalisateur Jason Stone, car le film, qui essaye de mixer Seven avec Fargo, ne trouvera jamais le bon équilibre pour insuffler un quelconque relent de nouveauté.
Il faut dire que le film ne part qu’avec un seul bon point, celui de Susan Sarandon au casting dans un rôle atypique et la mettant en danger. Mais l’actrice reste assez « safe » de ce côté-là, sa carrière parlant pour elle et elle n’avait pas vraiment besoin de ce film pour montrer qu’elle sait tout jouer. Enfin, tout… Elle demeure tout de même bien en deçà de ses capacités dans ce film où elle incarne un shérif en pleine dépression, ne trouvant pas l’amour et vivant encore chez sa mère, une ancienne juge. Sans forcer ses expressions ou donner un quelconque élan à son personnage, elle reste assez monolithique dans sa composition, même lorsqu’elle voit ce qu’elle n’a pas réussi en l’image du jeune Topher Grace, incarnant un jeune policier ambitieux. Et finalement, c’est bien là l’un des problèmes majeurs de ce film, c’est qu’il n’arrive jamais à donner une épaisseur à ses personnages, les stéréotypant tous dans cette enquête qui se veut sulfureuse. On aura bien du mal à s’accrocher à ses policiers si antinomiques et pourtant si proches, qui semblent finalement peu concernés par l’enquête. En fait, on se retrouve devant un thriller qui veut mettre en avant une volonté auteurisante, que ce soit dans le rythme, dans les personnages, dans la mise en scène ou encore dans l’ambiance.
Jason Stone choisit de présenter un paysage rural américain en plein hiver dans un bled qui n’a pas pour habitude d’avoir des problèmes. Si ce cas de psychopathes chamboule un peu les mœurs de l’équipe, on ressent tout de même une envie de coller au plus possible à Fargo des frères Coen. Si l’aspect enneigé et paumé participe à ce lien de filiation, on pense aussi au personnage de Sarandon, une policière blasée aux méthodes peu orthodoxes. Sauf que The Calling manque d’à peu près tout ce qui fait le charme du film des frères Coen. Il manque clairement un rythme au métrage pour accrocher le spectateur. Dès le départ, cette nonchalance que l’on retrouve dans la mise en scène ne quittera jamais le film qui se contente de faire du plan par plan et de narrer une histoire rocambolesque sur fond religieux. C’est-à-dire qu’à aucun moment le film ne s’emballe ou propose une vraie vision de quelque chose. On reste sur des rails, à plat et on suit cette histoire sordide sans passionner ou inclure le spectateur dans l’enquête. D’autant plus que la dissemblance entre les meurtres horribles, montrés frontalement, et l’ambiance délétère ne fonctionne jamais, la faute à une non prise de risque et à cette volonté de « choquer mais pas trop ».
Et c’est là qu’on arrive au fond du problème de The Calling. Le cinéaste ne sait pas sur quel pied danser et cela se voit dans le film. Il ne sait pas s’il doit y aller à fond et proposer un sujet qui fera polémique, ou bien adoucir son propos pour ne dire les choses qu’à moitié. Du coup, on se retrouve face à un film qui n’a pas le bon équilibre entre ce qui est sulfureux et ce qui reste du domaine puritain. On a donc un propos osé sur l’église et cette croyance qu’en effectuant des meurtres sur des personnes mourantes, récitant une prière, on peut ressusciter un mort et un constat assez léger, n’incluant pas la bêtise de la religion. On a des passages sanglants avec des gorges tranchées, mais on n’appuie pas trop l’aspect fanatique. Même la fin va dans ce sens, essayant de perturber le spectateur avec un fait attendu et finalement pas si malsain que ça envers l’église. Le film ne semble jamais prendre un réel parti et ne va pas au bout des choses, certainement pas peur de choquer ou de se voir conspué à sa sortie.
Au final, The Calling est une déception, car on aurait pu en attendre davantage de ce thriller avec Susan Sarandon. S’il se laisse regarder sans trop de problème, il demeure trop inoffensif pour pleinement convaincre et ne va pas au bout de son concept, préférant se reposer sur la facilité plutôt que de rentrer dans le lard. Bref, un énième thriller transparent sur fond de religion et de fanatisme qui n’arrive pas à la cheville de Seven de David Fincher.
Note : 09/20
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par AqME