mars 19, 2024

Le Silence et la Fureur – Nicolas d’Estiennes d’Orves et Natalie Carter

Auteurs : Nicolas D’Estiennes D’Orves et Natalie Carter

Editeur : XO Editions

Genre : Thriller

Résumé :

Un lac perdu de l’Ontario, et au milieu, une petite île escarpée où souffle le vent mauvais du soupçon.
Max King, pianiste adulé dans le monde entier, y vit reclus dans sa maison, prisonnier de ses obsessions et de ses cauchemars.
Il y a dix ans, un drame l’a condamné au silence : la moindre note sur le clavier provoque en lui d’effrayantes douleurs.
Pour cet immense artiste, la musique est devenue un bourreau.
Mis à part sa gouvernante, Max King ne voit personne. Ni sa femme Fiona, ni son fils Luke, qui a quitté l’île et que tout le monde surnommait le « petit prince ».
Un futur pianiste de génie, comme son père.
Le retour de Luke résonnera comme un cataclysme sur cette terre maudite.
Et du silence jaillira bientôt la fureur.

Avis :

Ce roman à suspens, tel un huis-clos, nous embarque sur une île à la fois macabre et lumineuse, dans un pays froid, le Canada. Le lecteur est souvent mal à l’aise tant l’atmosphère décrite est étrange et pleine de mystères. La description de l’île et du climat apportent un suspens et des sensations sournoises à la lecture. La couverture représente d’ailleurs efficacement ce lieu maudit.

Le lecteur est souvent sur le qui-vive, en attente et même en demande après s’être bien imprégné des personnages et de l’intrigue. Il est difficile de s’arrêter en plein milieu : on veut savoir ce qui va se passer et on veut tout comprendre. Les informations tombent au compte-goutte pour mieux nous asservir jusqu’à la toute fin. Une fin que l’on pourrait qualifier de perturbante, notamment au niveau moral, ce qui n’étonne finalement pas pour un thriller. Une fin qui n’est en tout cas pas décevante, au contraire, malgré le malaise ressenti après avoir refermé le livre. Ce roman n’est ainsi pas à conseiller aux âmes sensibles.

Trois personnages ont leur importance : Susan, Max et Luke. Max est, plutôt était, un grand pianiste qui a perdu son envie et son ambition suite à un terrible accident. La musique le fait maintenant souffrir et ses moments d’angoisse sont fréquents. C’est un personnage très antipathique, que l’on n’apprécie pas vraiment au début étant donné qu’il semble n’aimer personne et être totalement renfermé sur lui-même.

Susan, une jeune femme qui l’aide à vivre et qui s’occupe de sa demeure, est celle qui nous le fait paraître plus humain et c’est d’ailleurs vers elle que va notre attachement. On la plaint rapidement, surtout que de nombreuses scènes nous la font apparaître avec son mari qui se plaint de sa promiscuité avec le musicien et du temps qu’elle passe avec lui et non avec sa famille. L’écriture est telle que Susan nous paraît être le pilier de ce livre. Cette sensation est accentuée par le fait que les auteurs ont séparé le livre en chapitres mais également en parties dont Susan est la narratrice. Suivre ses pensées et ses questionnements nous la font aimer davantage.

Luke, le fils de Max, génie tout comme lui, possède également ses moments de narration, notamment après la première partie du roman, moment où il revient sur l’île. Luke est un personnage que l’on a du mal à cerner étant donné que les visions des autres personnages à son égard changent du tout au tout. Son père, sa mère et Susan ne le considèrent pas de la même manière et cette pluralité nous le font paraître étranger, voire même nous font avoir pitié de lui et de l’éducation difficile qu’il a reçue. Il nous semble être un petit garçon mal aimé, fruit d’un génie et d’une ambitieuse qui lui ont mené la vie dure. Au fil du récit, Luke prend davantage de place et défie souvent Susan. Ses démarches pour aider son père et lui redonner goût à la musique se multiplient et prennent une part importante dans le récit.

Le roman laisse une place non négligeable à la musique et à la poésie qu’elle fait naître en chacun de nous. Le lecteur aura l’impression de vivre un véritable combat dont la finalité est la libération du talent de Max et de toutes les mélodies qu’il bloquait en lui. La musique est réellement l’héroïne de ce roman car c’est autour d’elle que tout tourne. Max ne serait rien sans elle, Susan n’aurait jamais eu la vie qu’elle a vécue et Luke ne serait probablement pas né. De plus, la musique et tout l’argent qu’elle peut rapporter, constituent le gagne-pain des habitants de l’île et des alentours. Jusqu’où seraient-ils prêts à aller pour que Max reprenne du service ?

Le début du roman nous apporte déjà quelques réponses et c’est d’ailleurs un choix étonnant de la part des auteurs que de nous révéler une partie de la fin dès les premières pages du livre. Contre toute attente, cela n’enlève rien au suspens ni à l’envie de savoir comment cela a pu se passer.

La fin est étonnante et malsaine. Les personnages n’étaient finalement pas ce qu’ils semblaient paraître. Le lecteur s’est bien laissé berner grâce au talent de Natalie Carter et de Nicolas D’Estienne D’Orves qui nous ont menés en bateau. On se sent dupés mais contents de l’avoir été. Le rythme lent et l’intrigue sans accroc du début et du milieu, finissent par se transformer en une suite d’évènements plus ou moins tragiques et inattendus qui nous coupent le souffle. Ce n’est qu’arrivé vers la fin que l’on comprend le but du roman ou du moins ce qu’il voulait nous faire comprendre. La bonne majeure partie du livre nous semble être une histoire certes sombre, mais loin du thriller que l’on espérait tant tout se passe finalement plutôt bien et sans encombre. Les dernières pages nous révèlent cependant que l’on avait tort et que ce que l’on avait cru comme acquis, n’était en fait que chimère et fantaisie.

Thriller à suspens et thriller psychologique, Le silence et la fureur est un roman à la fois lyrique et  sinistre. Il nous montre jusqu’où l’Homme est prêt à aller pour obtenir ce qu’il désire et nous questionne sur notre propre humanité, sur notre moralité ainsi que sur l’idée que nous nous faisons de la justice. Il apporte également quelques pistes sur la façon de gérer et de se souvenir de drames du passé que l’on penserait avoir vécus. Une réflexion intéressante, menée tambour battant par des auteurs machiavéliques et tenue par des personnages complexes. Un moment de lecture qui ne laisse pas indifférent.

Note : 16/20

Par Lildrille

Lildrille

Passionnée d’imaginaire et d’évasion depuis longtemps, écrire et lire sont mes activités favorites. Dans un monde souvent sombre, m'évader et fournir du rêve sont mes objectifs. Suivez-moi en tant qu'auteure ici : https://www.2passions1dream.com/. Et en tant que chroniqueuse aussi là : https://simplement.pro/u/Lildrille.

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