
Auteur : Arthur Morgan
Editeur : ActuSF
Résumé :
La communauté Steampunk existe-elle ? Le Steampunk est-il réactionnaire ? Le steampunk est-il punk ? Voici quelques-unes des questions que ce livre aborde de front, sans préjugé et avec franchise, à travers plusieurs chapitres et interviews de spécialistes. Un livre indispensable pour repenser le steampunk à l’aulne des questions d’aujourd’hui.
Avis :
Avant de commencer toute pseudo analyse de cet ouvrage (pseudo car je n’ai pas la prétention de dire que je fais une vraie analyse de fond), il est de bon ton de rappeler ce qu’est le Steampunk. Pour le commun des mortels, il s’agit d’une mouvance artistique qui vise à se grimer en mélangeant les costumes du XIXème siècle, à tendance plutôt victorienne, avec des rouages et autres éléments qui évoquent un courant industriel. Et ça s’arrête-là. La plupart des gens y voient un divertissement, ou à la rigueur une façon rigolote de s’habiller en étant quelqu’un d’autre, mais globalement, ça ne va pas plus loin. Alors que le Steampunk est bien plus que cela. En effet, c’est un courant qui couvre tous les médiums culturels, allant de la littérature jusqu’au septième art, en passant la bande-dessinée, la musique et même le lifestyle.
Etrangement, ce courant riche n’a pas eu le même impact que la Fantasy ou la Science-Fiction, alors même que l’on retrouve dans quasiment toutes les conventions des gens qui évoquent le steampunk, et qui sont costumés comme tel. La réponse se trouve-t-elle dans ce livre d’Arthur Morgan, figure émérite du mouvement Steampunk, ayant déjà co-signé deux ouvrages sur le sujet avec Etienne Barillier, autre éminence de ce genre ? En quelque sorte, on peut dire que oui, mais c’est réellement le genre de question qui n’a pas vraiment de réponse attendue. A Toute Vapeur essaye surtout d’aborder le genre sous d’autres angles, et notamment sur son fond, à savoir si le Steampunk, et les vaporistes (nom donné aux français qui se costument en Steampunk et font partie d’une communauté), permet de critiquer le passé pour offrir un meilleur avenir, et plus de diversité.
Car oui, à travers cet essai, on va découvrir que l’univers Steampunk, aussi riche soit-il, demeure assez cloisonné, mettant en avant des personnages issus de la bourgeoisie, ou d’un milieu confortable, et laisse peu de place à d’autres catégories sociales. Tout comme il s’agit d’un mouvement né dans les pays occidentaux, et les pays orientaux ont moins de porte d’entrée dans ce monde. Arthur Morgan essaye, à travers diverses analyses et interviews, de mettre en avant un mouvement qui essaye de s’ouvrir, mais qui n’a pas encore connu une explosion, permettant alors de se faire connaître du grand public, et donc de se faire plus inclusif. Fort heureusement, à travers divers exemples, on va voir que le Steampunk s’ouvre tout de même à l’autre, et a tendance à évoluer, pour se faire plus conscient.
Comme dit à travers divers témoignages, le Steampunk est un genre qui végète un peu en sous-marin. S’il n’a jamais connu d’éclat, il reste toujours présent, en filigrane dans divers médiums, et il faut parfois creuser pour trouver des ouvrages qui sont dans cet univers. En gros, le Steampunk existe et existera toujours, mais il faut croire qu’il n’aura jamais le véritable éclat d’une Fantasy par exemple. Pour autant, cela ne veut pas dire que le mouvement se meurt, bien au contraire, il pullule sur le net, avec des sites spécialisés, et des figures qui continuent à le faire vivre, via notamment des tutoriels pour customiser des armes ou des costumes. Le livre met bien cela en avant, avec de nombreuses références que l’on peut aller piocher, et une bibliographie assez importante, qui donne des pistes de lecture très alléchantes.
Bien évidemment, à travers ce livre, Arthur Morgan interroge sur le racisme, le colonialisme, l’impérialisme, et toutes les critiques que l’on peut faire sur une communauté qui, au départ, se fichait pas mal de toutes ces problématiques. L’aspect politique revêt pourtant une importance capitale, dans le sens où le Steampunk pourrait être utilisé pour critiquer le système d’aujourd’hui, en s’employant à détourner le système d’hier. Là encore, le livre véhicule des pistes de réflexion, sans émettre de jugement sur les personnes qui se costument, en disant même qu’une prise de conscience est en train de se faire. Tout comme l’accueil de minorités qui se greffent de plus en plus au mouvement. L’approche est maline, et surtout, elle permet de réfléchir à cela, sans émettre de jugement sur les vaporistes.
Au final, A Toute Vapeur – Le Steampunk en Question est un essai fortement plaisant, qui permet de mettre en avant un sous-genre qui n’a jamais vraiment connu d’explosion, mais qui continue à vivre, en sous-marin, et qui se permet aujourd’hui d’être plus critique envers le système, et donc d’amener plus de fond à un courant qui, au départ, ne se voulait presque que divertissant. Bref, les vaporistes et amoureux du Steampunk seront certainement comblés par cet ouvrage, et l’érudition dans le domaine de son auteur donne alors envie de se plonger dans de nombreux romans qui, jusqu’alors, étaient passés sous les radars.
Par AqME