
Avis :
En France, quand on est un groupe de métal qui officie dans un sous-genre de niche (ici, le Death progressif et technique), il est très difficile de trouver un label qui puisse vous produire. Fondé en 2013 à Nancy, Fractal Universe va aller du côté de l’Italie pour trouver un label, Kolony Records, afin de pouvoir sortir leur premier album. Le succès étant au rendez-vous, le groupe va se faire draguer par un label plus imposant, Metal Blade Records. Le label américain possède un roster impressionnant, et cela est une opportunité pour les français de se faire encore plus connaître. Après deux albums, et pour une raison qui semble inconnue, les français ont décidé de partir chez M-Theory Audio, un autre label américain, mais moins connu. The Great Filters est donc le quatrième album des frenchy, qui aussi l’arrivée d’un tout nouveau guitariste.
On le sait, avec Fractal Universe il faut s’attendre à être surpris. Déjà parce que chaque morceau se révèle assez long et complexe, mais aussi parce qu’il s’agit d’un Death Métal progressif qui ajoute des petites touches de saxophone, l’un des instruments de prédilection du leader. Et cela va s’entendre dès le premier titre. The Void Above débute de façon percutante avec un chant growlé, de gros riffs, avant de s’adoucir un petit peu, avec un chant clair et quelques éléments plus progressifs. On aura droit à quelques notes un peu jazzy en son milieu, donnant alors une dimension très étrange au titre. Mais c’est aussi ce qui fait le charme du groupe, qui aime nous perdre dans des chansons ambitieuses, en mélangeant des sonorités qui semblent antinomiques, mais qui fonctionnent grâce à un certain génie créatif. Bref, comme à son habitude, le groupe nous surprend habilement.
En abordant The Great Filter, le groupe propose autre chose. Si les riffs et l’intonation du morceau demeurent « Death », on reste tout de même sur quelque chose de plus doux, notamment avec un chant clair un peu nasillard, et une conclusion qui se fait au saxophone, avec quelques saillies jazzy. Le résultat est surprenant, et il faudra plusieurs écoutes pour réellement apprécier ce morceau. Causality’s Grip sera un titre plus virulent, plus percutant, avec un échange de chant clair et de chant growlé, puisant sa force dans un gros solo sur le dernier tiers. Le résultat est fort, notamment d’un point de vue technique, même s’il demeure assez « classique » dans sa construction, ou dans les sonorités qu’il utilise. The Seed of Singularity sera plus singulier. Le morceau est plus insidieux et s’infuse avec le temps, notamment dans ses ruptures assez brutales et inattendues.

Comme, par exemple, ce passage au saxophone qui se couple avec un blast tonitruant à la batterie. Très clairement, Fractal Universe aime prendre des risques, et c’est souvent payant, même s’il faut plusieurs écoutes pour en comprendre toute la richesse. The Equation of Abundance va dans le même sens. Il s’agit d’un titre étrange, complexe, qui démontre tout le talent technique du groupe, mais aussi sa faculté à repousser les limites. Ici, le démarrage est très lent, presque Shoegaze dans l’esprit, puis le saxophone va faire son apparition en même temps qu’une forte montée en tension pour aboutir à un chant growlé de toute beauté. Le titre est très travaillé et il est très intéressant, car il se dévoile un peu plus à chaque écoute. Specific Obsolescence rentre un peu plus dans le vif du sujet, et s’octroie un petit plaisir en jouant avec les textures.
Par exemple, le chant crié s’allie avec un rythme assez lent, avant de laisser place à un chant clair qui s’accompagne d’une rythmique syncopée, permettant alors au refrain de prendre plus de puissance, et de mieux nous marquer. Dissecting the Real continue son travail de sape avec des passages étranges, des sonorités assez inattendues et un résultat qui est dur à appréhender de prime abord. Concealed sera dans le même moule, mais son introduction tonitruante va nous mettre tout de suite dans le bain, avec une forte envie de faire headbanger les foules. Le groupe varie les plaisirs, et prouve qu’il est très inspiré. Enfin, A New Cycle va aller vers un Death Métal progressif à tendance presque symbiotique, un peu à la manière de Sybreed et c’est très bon. Et le groupe nous offre un petit final sur ce titre qui est une très belle réussite.
Au final, The Great Filters, le dernier album en date de Fractal Universe, est une vraie petite réussite, même si la galette reste difficile à éprouver. Continuant dans ce Death métal à la fois technique et progressif, les français jouent avec les codes du genre pour nous balader dans un univers unique, complexe, parfois surprenant, mais qui retombe toujours sur ses pattes. Bref, si l’on est peut-être un poil en dessous du précédent album, on reste sur un disque de qualité, qui sort des sentiers battus, et qui fait du bien dans un monde métallique qui peut parfois tourner en rond.
- The Void Above
- The Great Filter
- Causality’s Grip
- The Seed of Singularity
- The Equation of Abundance
- Specific Obsolescence
- Dissecting the Real
- Concealed
- A New Cycle
Note : 16/20
Par AqME