juillet 20, 2025

Night Shot – Found-Footage à la Française

De : Hugo König

Avec Nathalie Couturier

Année : 2018

Pays : France

Genre : Horreur

Résumé :

Une jeune blogueuse spécialisée dans l’exploration urbaine (urbex) décide d’aller visiter un gigantesque hôpital abandonné. Comme toujours elle part seule et de nuit avec son cameraman, afin de faire vivre en direct ses aventures à ses followers, avec une particularité : ne jamais couper la caméra ! Mais ce soir le lieu qu’elle a choisi va lui faire vivre un véritable cauchemar !

Avis :

À la fois aventureuse et fascinante dans la découverte de lieux oubliés, l’exploration urbaine reste une activité aux multiples attraits. Au cinéma, elle reste peu représentée. Tout juste peut-on évoquer Urban Explorer ou Catacombes. À l’image de ce dernier métrage, Night Shot s’immisce dans le registre du found footage. Au-delà d’une volonté de s’essayer à un style particulier, celui-ci demeure accessible aux réalisateurs débutants ou indépendants. En effet, il ne nécessite que peu de moyens pour travailler son atmosphère ou son histoire. Il convient toutefois d’avoir un minimum de maîtrise technique pour ne pas sombrer dans un amateurisme opportuniste.

Face à une masse de productions plus ou moins notables, Hugo König ambitionne de tourner Night Shot en un unique plan-séquence. Dans le septième art, cette particularité technique constitue l’une des plus remarquables. Exigeant une préparation méticuleuse, elle est également l’une des plus complexes à gérer. Bien que le résultat ne soit pas aussi probant qu’escompté, on se souvient néanmoins du film de Gustavo Hernández, The Silent House, qui proposait une approche similaire. Pour le présent métrage, ce choix de mise en scène renforce l’immersion toute subjective à laquelle on est en droit de s’attendre. Par ailleurs, il s’avère cohérent pour reproduire le travail de la vidéaste.

« À bien des égards, l’endroit demeure stupéfiant. »

On distingue ainsi un discours qui interpelle le spectateur, le reléguant au statut de viewers ou de followers. Bien que l’on ne remarque aucune dénonciation ou velléité cynique quant à ce format, le sentiment d’implication fait illusion, même s’il n’y a aucune interactivité. Une autre particularité de Night Shot réside dans son cadre. En écho à l’une des règles d’or de l’urbex, aucun nom n’est donné. Malgré la divergence géographique entre la fiction et le lieu réel, il s’agit pourtant du sanatorium d’Aincourt. À bien des égards, l’endroit demeure stupéfiant. S’il est propice à un tournage horrifique, il constitue un véritable témoignage du passé tourmenté de ce type d’établissements.

Ici, l’exploration urbaine emprunte des méandres labyrinthiques. Dans les sous-sols ou les étages, on appréhende le sanatorium dans toute sa complexité. La gestion spatiale accroît la sensation d’absences de repères, et ce, en dépit de quelques indices. À croire que l’endroit lui-même souhaite faire s’égarer sciemment ses visiteurs, par un agencement capricieux et aléatoire. L’exiguïté des corridors contraste avec la vastitude de la structure. De nuit, l’hôpital arbore les atours d’une antichambre de l’enfer. On notera aussi que la notion de danger tient à deux registres. L’un privilégie le pragmatisme avec la présence d’éventuels squatteurs. L’autre joue la carte du surnaturel et de la hantise.

« il est vrai que le scénario n’affiche pas une grande originalité. »

Pour ce dernier point, il est vrai que le scénario n’affiche pas une grande originalité. On ressasse les histoires de maltraitance et les expérimentations humaines inhérentes à de tels endroits. De même, les manifestations demeurent assez prévisibles et confèrent parfois à des clichés grossiers. Mention spéciale aux portes qui claquent (ou tombent), ainsi qu’à la séquence avec la planche de ouija. L’appréhension et la suggestion d’une présence invisible s’avèrent plus efficaces que les phénomènes eux-mêmes. Contrairement à d’autres productions, on notera quelques efforts pour préserver la lisibilité de l’action dans les moments les plus intenses, ambiance sonore discordante à l’appui.

Au final, Night Shot est un found footage non dénué d’intérêt. On apprécie le travail technique sur un plan-séquence de 90 minutes et cette atmosphère lugubre qui émane du cadre. L’exploration spatiale de l’environnement demeure maîtrisée, tout comme cette volonté d’alterner entre le rationnel et le surnaturel. Enfin, jusqu’à un certain stade de l’histoire. Toutefois, on émet des réserves quant aux éléments censés effrayer le spectateur. Même s’ils s’avèrent pertinents dans ces circonstances, il s’agit de subterfuges éculés. Contrairement au périple dans l’hôpital, on regrette aussi une évolution narrative linéaire et un démarrage assez poussif avant de se dynamiser. Il n’en demeure pas moins un effort louable et rare dans le paysage cinématographique de l’hexagone.

Note : 13/20

Par Dante

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