septembre 26, 2025

Rodin – Sculpter l’Ennui

De : Jacques Doillon

Avec Vincent Lindon, Izia Higelin, Séverine Caneele, Bernard Verley

Année : 2017

Pays : France

Genre : Biopic, Drame

Résumé :

À Paris, en 1880, Auguste Rodin reçoit enfin à 40 ans sa première commande de l’Etat : ce sera La Porte de L’Enfer composée de figurines dont certaines feront sa gloire comme le Baiser et le Penseur. Il partage sa vie avec Rose, sa compagne de toujours, lorsqu’il rencontre la jeune Camille Claudel, son élève la plus douée qui devient vite son assistante, puis sa maîtresse. Dix ans de passion, mais également dix ans d’admiration commune et de complicité. Après leur rupture, Rodin poursuit son travail avec acharnement. Il fait face et au refus et à l’enthousiasme que la sensualité de sa sculpture provoque et signe avec son Balzac, rejeté de son vivant, le point de départ incontesté de la sculpture moderne.

À 60 ans, enfin reconnu, il devient le sculpteur le plus célèbre avec Michel-Ange.

Avis :

Il est évident que bien souvent, les biopics arrivent à pic pour susciter un intérêt auprès du public. Que ce soit pour fêter un anniversaire, un centenaire ou encore les actions d’une personne importante, chaque biopic profite d’un bon timing pour attirer les foules dans les salles de cinéma. Et par la suite, bien évidemment, pour acheter du produit dérivé, comme des vinyles si c’est sur un chanteur ou encore des visites de musée pour un artiste. En 2017, c’était le centième anniversaire de la mort de Rodin, et Jacques Doillon était pressenti pour faire un documentaire sur le sculpteur. Mais à force de recherches, le réalisateur a écrit des phases de fiction, et c’est alors qu’il décide d’en faire un biopic particulier, s’arrêtant surtout sur la relation toxique entre Rodin et Camille Claudel, puis sur son œuvre maudite, son fameux Balzac qui se fera détruire par les critiques.

Dès le départ, le film nous place dans l’atelier de Rodin, qui discute avec sa jeune élève, Camille Claudel. On sent une complicité entre les deux artistes, et on va rapidement les retrouver dans un lit. Rodin est alors en effervescence car il vient, pour la première fois en quarante ans, d’avoir une commande de l’état, à savoir la porte des enfers, inspiré de La Divine Comédie de Dante. Mais le film ne va pas forcément tourner autour de cette œuvre, mais plutôt autour de l’artiste, de son côté animal et habité lorsqu’il se retrouve dans son atelier. On va alors suivre une petite partie de sa vie, de sa séparation avec Camille Claudel, jusqu’à son exil à Meudon pour sortir de Paris et de son aspect étouffant. Puis le film de dériver vers une sculpture particulière, Balzac, qui sera le premier échec de Rodin.

« Il sera alors difficile de ressentir de l’empathie »

Ce parti pris de la part de Jacques Doillon est assez risqué, car il entremêle la vie de l’artiste avec la vie de l’homme, sans réellement nous expliquer comment on en est arrivé là. Par exemple, on pourrait croire que Camille Claudel est sa femme, mais en fait, il trompe sa femme, que l’on va voir plus tard, sans qu’elle ne soit mentionnée. Le fait de faire comme ça ne donne pas forcément de crédit à l’homme, qui semble être un coureur de jupons, ce qui se confirmera par la suite, où il va coucher avec quasiment toutes ses élèves et ses modèles. Il sera alors difficile de ressentir de l’empathie pour lui, même dans son travail. Car s’il est aimable avec ses assistants, il reste habité par sa passion, et demeure un personnage peu prolixe, voire parfois pénible dans ses attentes et ses recherches.

Et ne pas ressentir de l’empathie pour un personnage dont c’est le biopic, c’est mal barré pour la suite. Car en plus, ce ne sera pas le seul protagoniste pour lequel on ressentira un certain dégoût. En effet, Camille Claudel est détestable du début à la fin. Si on sait qu’elle va finir sa vie à Montfavet, proche d’Avignon, dans un asile psychiatrique, le film ne lui rend pas service. Elle se sert constamment de la notoriété de Rodin pour ensuite lui reprocher d’être dans son ombre. Elle est exigeante, faire souscrire des contrats à Rodin en lui faisant tourner la tête, puis elle le rejette comme un malpropre. Si Izia Higelin signe une composition tout en nuances, il n’empêche que l’on va ressentir une profonde antipathie pour le personnage. Et il en va de même avec des personnages connus, comme Paul Cézanne qui apparait comme un dépressif fragile.

« le film est très académique. »

En plus de personnages auxquels on ne s’attache pas, le film est très académique. Ce n’est pas en livrant quelques chapitres avec la voix de Vincent Lindon qui reprend du Rodin que ça change quelque chose. Le film est relativement terne, il manque de vie, et semble presque figé, comme les statues de l’artiste. La vie n’apparait qu’à la toute fin, alors que Rodin s’éteint petit à petit, à travers des modèles lubriques où la femme devient presque un objet. Jacques Doillon ennuie plus qu’autre chose dans ce long-métrage qui possède des passages sans grand intérêt. Il manque un souffle épique. Il manque une étincelle à ce film pour le rendre passionnant, ou tout du moins pour rendre Rodin magnétique et énigmatique. De plus, on n’a pas forcément envie d’en savoir plus sur sa vie à la fin du film, ce qui marque bien le peu d’intérêt qu’il suscite.

Au final, Rodin est un biopic qui se veut auteurisant, mettant en scène un sculpteur frivole, torturé, mais qui dont la vie n’a pas l’envergure de ses créations. Jacques Doillon se complait dans une mise en scène qui se veut classieuse, mais qui manque de rythme et d’envie de cinéma. En fait, ce long-métrage a tous les atours d’un drame français à destination d’un public bobo, qui doit certainement se toucher la nouille devant les œuvres de Rodin et de Claudel. Non seulement, nous ne sommes pas le public ciblé, mais en plus de cela, on reste sur le carreau, la faute à une ambition moindre et une prétention sans nom.

Note : 07/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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