De : Henry Miller
Avec Willem Dafoe, Scott Speedman, Peter Stormare, Clea DuVall
Année : 2007
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller
Résumé :
Stan Aubray, un détective enquête sur un dossier dont la manière de tuer est similaire à celle d’un cas récent. Au fur et à mesure de l’enquête il se rend compte que l’issue du premier meurtre n’est pas celle à laquelle il avait pensé.
Avis :
C’est au milieu des années 90 que David Fincher va frapper un grand coup avec Seven. Thriller sulfureux qui s’appuie sur les sept péchés capitaux, le réalisateur avait trouvé le juste équilibre entre une imagerie glauque, voire gore, et une enquête portée par des personnages torturés et passionnants. Bien évidemment, cela a fait des émules, mais sans jamais réussir à capter l’essence même du film. On peut citer le pénible Les Cavaliers de l’Apocalypse avec Dennis Quaid, ou encore Intraçable avec Diane Lane, mais globalement, on reste dans un registre qui va de loupé à insipide. Sorti directement chez nous en DVD en 2018, Anamorph est un film de 2007 qui s’inspire du long-métrage de Fincher pour mettre en avant un tueur en série qui s’inspire d’une méthode artistique, l’anamorphisme, où une œuvre prend une autre forme en fonction de son angle de vue.
Le film débute de façon étrange, avec une mise en scène qui est vraiment moche. On va voir qu’un homme, le « héros », se fait nommer à un haut grade dans la police suite à son arrestation (ou plutôt au meurtre) d’un tueur en série qui s’inspirait de l’art pour mettre en scène ses victimes. Comme il s’agit d’une sorte de flashback, le cinéaste a cru bon de filmer un peu de travers, de mettre en avant un montage chaotique et de foutre un filtre gris et flou pour bien montrer qu’il ne s’agit pas du présent. Cette mise en route est déroutante et peut faire craindre le pire pour la suite, surtout quand on sait qu’il s’agit d’un DTV et d’un film à petit budget, malgré un casting assez solide, en la présence de Willem Dafoe, Scott Speedman et Peter Stormare.
« le film va subir un lourd tribut, un ventre mou bien trop long. »
Mais fort heureusement, la réalisation se « lisse » par la suite, devenant normale, et évitant alors des filtres et autres montages expérimentaux qui ne servent à rien. Le scénario s’appuie sur le tueur du début pour mettre en avant de nouveaux crimes qui semblent s’inspirer du tueur. On pense alors à un copycat, on peut être tenter de chercher un coupable parmi les proches de ce commissaire, puisque visiblement, il s’en prend à ses proches, ou dans des lieux proches de sa maison. Mais le film va subir un lourd tribut, la faute à un ventre mou qui sera bien trop long. En fait, l’histoire parle énormément de ce commissaire sans que l’on ressente de l’attachement pour lui. Pourquoi va-t-il voir cette femme qui du don de sang ? Pourquoi aime collectionner les vieux fauteuils ? On ne saura rien sur lui.
Bien évidemment, si l’on ne ressent pas de l’empathie pour le personnage principal, il va être compliqué de s’impliquer dans l’histoire, et encore plus dans cette enquête. Enquête qui piétine, sans pour autant accumuler beaucoup de cadavres, et dont les mises en scène, aussi macabres soient-elles, peinent à convaincre. De plus, pour en revenir aux personnages, les protagonistes secondaires ne sont pas bien mis en avant. L’acolyte du personnage principal est transparent au possible. Et on ne parle même pas des autres qui gravitent autour, comme le brocanteur qui aide à l’enquête, ou encore cette jeune femme qui fait du don de sang. On a la sensation de louper un train, ou que le scénario ne sait pas vraiment quoi faire de ce petit monde. Il semblerait qu’il manque une grosse demi-heure au film pour être plus complet et compréhensible.
« L’ensemble manque d’écriture, de liant, et surtout de fond »
Car oui, nous servir des meurtres dégueulasses, ainsi qu’un personnage central torturé par une ancienne enquête ne suffit pas à faire un bon background pour un film. Il faut aussi un antagoniste intéressant, et là, c’est le calme plat. On ne saura jamais de qui il s’agit, ni même ses motivations. La résolution finale est assez risible, et tient plus du hasard que de la véritable enquête. En fait, il manque vraiment de la cohérence au film pour être totalement appréciable. On a parfois la sensation de passer du coq à l’âne d’une scène à l’autre, ne sachant pas bien ce que veut nous raconter le réalisateur. L’ensemble manque d’écriture, de liant, et surtout de fond, car on a vraiment l’impression de suivre une enquête qui ne mène à rien, sinon à l’arrestation d’un fou qui semble aimer l’art et les natures mortes.
Fort heureusement, le film se rattrape sur deux points. Le premier est sur son ambiance qui est vraiment morbide. Est-ce la qualité du DVD, mais les teintes sont très ternes, on alterne souvent entre le noir, le bleu et le gris, donnant au film un sentiment désespéré et glauque. C’est intéressant, même si à la longue, c’est fatiguant. On aura aussi quelques mises en scène de cadavres bien sales, ajoutant alors à la folie du tueur, que l’on ne va malheureusement pas connaître outre mesure. Et enfin, on peut citer un excellent Willem Dafoe, qui incarne bien ce commissaire marqué par une précédente enquête, et qui doit affronter deux démons, celui qu’il a à l’intérieur de lui, ne se pardonnant pas son acte manqué, et celui, bien réel, qui continue ses atrocités en se rapprochant de ses proches. L’acteur montrait déjà tout son talent.
Au final, Anamorph n’est pas un film inintéressant. Si on peut lui reprocher d’être trop décousu et de ne pas apporter suffisamment de poids à ses personnages et à son tueur, il possède tout de même quelques bons points, comme son ambiance délétère et son acteur principal qui fait tout pour donner corps à son personnage torturé. On peut aussi relever quelques mises en scène cadavérique intéressante, même si ça reste de l’habillage. Bref, un thriller qui est loin d’être à la hauteur de Seven ou du Silence des Agneaux, mais qui a le mérite d’essayer…
Note : 11/20
Par AqME